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Poésie libre
Cyrill : Tranquille
 Publié le 07/02/23  -  11 commentaires  -  2419 caractères  -  186 lectures    Autres textes du même auteur

Cité Teisseire. Années 70.


Tranquille




Dans ce quartier
où l’armée de béton rivalise souvent avec un drap tendu
si blanc
si nu
si dépourvu
ballant à la haie grise de ces vains balcons s’assemblant
aux vingt balcons suivants

Dans ce quartier
dont le charme insolent se grise à l’imprévu
d’un drame suspendu
où l’arme parfois blanche et quelquefois s’est tue
revanche d’être et même piètre ici
l’envie au corps encore en vie sous l’avalanche
d’incidents aux fenêtres en brisures d’étoiles

Dans ce quartier
chiure sur la toile
où fleurit en parterre
de proche commensal en poche de futal et de deal en prison un sentiment prospère
et servile
et précaire
où les portes cochères n’ont pas droit de cité
les cages d’escalier faisant très bien l’affaire

Dans ce quartier ta-dam
fresque sur macadam où souffle le ramdam de mille et un quidams
où je suis presque né – est-ce qu’un jour j’y mourrai ?
des boubous colorés croisent des blancs de peau
un indigène athée toise des oripeaux
les chalands égarés vaguent à reculons

Allons chantant allons matant tire lire
mon beau quartier
où les genoux cagneux et les douces frimousses
les immenses yeux noirs sous les cils harmonieux d’enfance buissonnière irisent d’un espoir
le vieux Mahmoud aux dents d’or

Alors jouant des coudes alors alors sombres cadors
et geôliers de l’empire lire lo
affûtent leurs appeaux
placent leurs pions au pied du mur les calent alentour
ombres à l’abri des tours
négocient pied à pied les bons petits bonbons d’une trêve sans envergure
d’un non-rêve inventaire
d’une paix sans repos
d’un répit à la dure
(Hocine knock-out en loques doute de toute… c’est Tafer)

Dans ce quart-monde-là ce ban-là de la ville aux foyers obérés des loyers modérés
à point d’heure du matin lorsque tout dort enfin

[smiley=evil]
tranquille
pas de bile
[/smiley]



Hocine Tafer Grenoblois balèze
ancien boxeur
a représenté la France aux J.O. en 76
mais on s’en contrefiche.


 
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   natile   
27/1/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
aime un peu
Surement un bel hommage à un quartier apprécié par l'auteur mais j'ai plus la sensation d'une chanson que d'une poésie.
Pas mal de répétitions qui alourdissent le verbe. l'idée est sincère et bonne mais l'écriture manque de fluidité.

   Tomoe   
7/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
J' ai participé a un débat sur les " quartiers " et bien il en ressort que la notion de quartier , c'est à dire un territoire d'habitants n'existe plus que dans les citées .
Mon grand père m'avait dit a ce sujet que " de son temps " il y avait les beaux quartiers, repliés sur eux mêmes et sans vie extérieure apparente et les faubourgs . Que chaque faubourg avait sa fanfare, ses majorettes, sa boule de fort , ses deux ou trois cafés importants etc . et parfois sa "réputation plus ou moins bonne " Qu'ils se retrouvaient pour des défilés de chars ou autres, en compétition joyeuse toujours . Quand les citées sont apparues , ça a tout changé . M' a dit pourquoi mais la ce serait long à rapporter
Moi votre poéme j' aime beaucoup , ça me donne envie de m' y promener histoire de m ' en imprégner . Lieu et gens . Non pas comme une touriste de la misère , mais pour y trouver une empathie .
Et le dernier vers
A point d'heure du matin lorsque tout dort enfin . C'est pour un jeune universel , hyper centres, quartiers, villages , c'est la conclusion des soirées prolongées Et en plus ça sonne super

   Anonyme   
7/2/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Pour une fois je trouve que la disposition en centré de votre poème lui donne plus de force, elle m'évoque la verticalité des barres d'immeubles d'une « cité », comme qu'on dit. J'aime bien aussi la large amplitude des longueurs des vers, j'y lis un message encourageant : il se passe toujours quelque chose, dans un mouvement incessant d'où peut émerger le pire comme le meilleur.

Je suis bien incapable d'évaluer la pertinence du propos, clichés ou expérience vécue, je n'en dirai rien. Je remarque des endroits un peu faciles à mon goût, par exemple les retours à la ligne systématiques pour faire ressortir une liste d'adjectifs :
si blanc
si nu
si dépourvu
mais dans l'ensemble je dirais que votre poème swingue et dégage une belle énergie. J'ai apprécié la balade dans un univers pour moi autre. Un poil trop d'adjectifs peut-être selon moi.

   Eskisse   
7/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill,

J'ai trouvé l'écriture de ce poème originale et chatoyante de sonorités comme par exemple:
"l’envie au corps encore en vie sous l’avalanche
d’incidents aux fenêtres en brisures d’étoiles".

L'évocation me paraît convaincante tant elle trace les diverses vies qui animent ces quartiers.
D'ailleurs mes passages préférés sont ceux qui évoquent les habitants , passages pourvoyeurs d'émotions.

Un thème qui est généralement peu traité en poésie. Ca fait du bien de le voir sous l'oeil du poète .

   Pouet   
7/2/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Slt

"Tranquille", je sais pas si c'était une façon de dire "bonjour" dans les années 70 ?...
Je connais de plus ou moins loin certaines cités de Paris ou région parisienne (jeunesse) et de lyon (travail), plutôt années fin 90-2010. Grenoble, j'ai dû traverser une fois la cité Arlequin et en garde un très vague souvenir de bitume bariolé, comme son nom l'indique, pas plus.

Dans les quartiers on peut pas dire ça s'arrange hein, côté misère sociale, insalubrité, inégalité, sentiment d'exclusion, trafic, criminalité... Mais y a pas que ça hein, y a la "vie" - aussi - l'enfance, l'amitié, le jeu, le vieillesse, l'espoir, le travail, les platanes en plastique...

Ce que j'ai aimé dans ce texte c'est retrouver un peu de ça -toujours actuel - ce rendu aigre-doux, ce petit chant, cette mélodie du macadam où s'entrecroisent le beau et le réel, la merde et l'abandon.

Mon passage marquant:

"Dans ce quartier
dont le charme insolent se grise à l’imprévu
d’un drame suspendu
où l’arme parfois blanche et quelquefois s’est tue
revanche d’être et même piètre ici
l’envie au corps encore en vie sous l’avalanche
d’incidents aux fenêtres en brisures d’étoiles"

Comme une ritournelle-uppercut.
Et puis c'est bien de citer Tafer (connaissais pas) au pays de Brahim Asloum...

   fanny   
7/2/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
J'ai trouvé ce tableau des cités fidèle, juste et vivant.

La forme et la présentation collent parfaitement au décor et retranscrivent bien son énergie, sa variété et le tempo vif dans lequel le pire et le meilleur se côtoient perpétuellement.

Les problèmes rencontrés, les tensions, mais aussi la dynamique puissante, les liens sociaux et la riche mixité culturelle de cette époque sont très bien rendus, et même si la situation semble se dégrader, cet hommage touchant et original reste d'actualité sur bien des points.

Je ne te dis pas encore bonsoir Cyril, il n'est pas point d'heure, mais bon, tranquille quoi, tranquille.

   Vincente   
8/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Si "l'ambiancement" installe bien plus qu'un décor, une enveloppe quasi charnelle que le lecteur va endosser au fil des vers, car il y a une sorte de véracité qui imprègne la lecture, mais ce qui prend beaucoup de place dans l'écriture sont les rebondissements sonores et les jeux de mots inspirés. La fusion entre tous ces champs d'expression s'opère d'ailleurs bien, je n'ai pas eu de sensation de trop.

J'ai été séduit par l'opposition très visuelle de ce premier passage :

" où l’armée de béton rivalise souvent avec un drap tendu
si blanc
si nu
si dépourvu
"

De même par ces trois suivants :

"Dans ce quartier
dont le charme insolent se grise à l’imprévu
d’un drame suspendu
"

où la sensation d'une suspension, d'un monde entre deux, la paix (la douceur) et la rugosité toujours se confrontant, "d'une paix sans repos / d'un répit à la dure".

J'ai beaucoup aimé aussi cette jolie trouvaille très évocatrice qui parvient à combiner avec fluidité les jeux de mots et l'ellipse du sens porteur ("droit de cité" dans ses deux sens – porte/cage : pas de porte accueillante mais une cage qui doit suffire… - et puis les affaires/business qui s'y font. )

" où les portes cochères n’ont pas droit de cité
les cages d’escalier faisant très bien l’affaire
"

Bien aimé aussi ces petites notes qui viennent comme sifflotant pour colorer l'atmosphère, et montrer que dans ce "gris", l'on peut aussi se sentir parfois léger, le regard ému par d'autres colorations éparses qui y dorent le quotidien. Le ton d'ailleurs se veut un brin badin dans un final décalé… qui rejoint la "tranquillité" déclarée du titre.

   Myo   
8/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill,

Il y a toute une atmosphère dans cet écrit.
Une originalité dans le propos, un métissage de mots, d'images, de parfums qui lui donne une consistance, une émotion toute particulière.

Des jeux de mots à foison, de bien belles trouvailles, une certaine tendresse pour ce quartier où le pire côtoie le meilleur, ou la mort, la détresse côtoient la vie dans toutes ces couleurs.

Bravo aussi pour la présentation qui ajoute au propos.

Myo

   Cyrill   
10/2/2023

   ferrandeix   
11/2/2023
Poème très évocateur de ce que peut représenter un "quartier" (cité), quoique le propos reste relativement sibyllin, et par cela poétique. On en retire, me semble-t-il, une impression de non-dit, comme s'il était tabou d'évoquer une réalité dérangeante, celle d'un lieu mal famé. La description est volontairement inaboutie, elliptique.

La prosodie, caractérisée par des vers centrés, très disproportionnés (certains très longs, d'autres très courts, peut paraître inélégante... à moins qu'elle ne traduise volontairement le chaos de ce quartier, son aspect subversif et la gêne psychologique de l'évoquer.

   senglar   
12/2/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill,


Il y a de l'incandescence ici, c'est un poème-chanson entêtant, du rap savant (Oui, quand même !) (Mais si, ça existe !). Que dire ? Ça scande ! Ça scande ! Ça scande ! On reconnaît une époque, celle où l'on a voulu (ou prétendu) faire le bonheur des hommes mais où on les a enfermés dans des clapiers (Jean Ferrat l'a chantée/dénoncée en son temps et puis le film ''Elle court elle court elle court la banlieue'' avec Higelin (?)), c'était l'époque d'avant, celle du début, des promesses. On lit une époque, celle d'aujourd'hui où les clapiers bien propres et hygiéniques (mais si !) sont devenus cloaques, les paradis consuméristes artificiels et où l'ascenseur social n'a pas fonctionné, pauvre Tafer !

Edifiant !

J'aime particulièrement (entre autres) :
''…
négocient... les bons petits bonbons d'une trêve sans envergure''
Un rêve non-rêve, une trêve sans envol, une illusion illusoire. L'arnaque jusqu'au bout !

Au début j'aurais inversé :
'(Où un drap tendu rivalise avec une armée de béton)'
C'est lui qui vient détonner, l'autre est déjà là, bien installé.
Bon c'est à toi de voir :)


Un « Tranquille » qui décoiffe, suis plus puceau désormais. Pas sûr que ce soit une bonne chose !

Ben Merci quand même...

Senglar


Edition : Je viens de ire les autres coms ; aurais-je été exagérément pessimiste. Diantre ! Je m'en vais lire ton forum.


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