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Poésie contemporaine
czerny31 : Le ver et le corbeau, ou « Réincarnation » [Sélection GL]
 Publié le 25/08/14  -  7 commentaires  -  3552 caractères  -  86 lectures    Autres textes du même auteur

Une fable dans laquelle j'ai imaginé un contrôleur des impôts réincarné en asticot et qui se voit, dans une métaphore, traité par un corbeau comme il a traité lui-même un poète. La poésie qu'il a par son travail malmenée se ligue pour reprendre ses droits, et cette personne voit son sort changer sous l'influence de clichés poétiques.


Le ver et le corbeau, ou « Réincarnation » [Sélection GL]



En haut d’un cerisier, sortant d’un bigarreau,
Pointait le bout du nez, tout en dodelinant,
Sans nulle autre question, et bien nonchalamment,
Un curieux habitant, des plus humbles qui soient, un superbe asticot.

Sa danse envoûtante, sa liberté naissante, à nulle autre pareille,
Sa sensation de paix, son appétit de vivre, et sa tranquillité,
Sa demeure trouvée, dans ce fruit si douillet
Lui faisaient apprécier, et non pas sans délice, les rayons du soleil.

C’est en ces circonstances, que le trouvant si beau,
Vers lui s’acheminait une masse foncée,
Une météorite, bec et griffes acérés,
Convaincue de remplir, sans attendre, son ventre de corbeau.

Alors la peur le gagne, il ressent le danger et voit sa vie filer.
Par bribes seulement, quelques vues, quelques mots,
Eh oui, souvenez-vous, ce n’est qu’un asticot !
Reviennent quelques scènes, qu’il n’a jamais vécues, ressurgies d’un passé.

Il se revoit baignant en totale clarté, en pleine vérité,
Méditant ses actions, arrosé de lumière des limbes de la vie.
Il a deux bras, deux jambes, c’est en humain qu’il vit.
Remontent, ses envies, ses passions, son métier.

Il rentre vers son huis, fier de lui, de sa tâche empirique.
Il n’a, et c’est certain, pas volé son dîner.
Sa hiérarchie, c’est sûr, va le féliciter en voyant le dossier.
Il est un employé de la fonction publique.

Il vient de redresser les comptes d’un poète.
Ce fou, ce farfelu, n’était qu’un délinquant.
Il ne déclarait pas les piécettes données, en bon contrevenant,
Échappant à l’impôt, ça va être sa fête.

Ce voyou ignorait, du moins le prétendait, qu’il devait au Trésor,
Rendre compte et régler chaque rime qu’il rêvait,
Chaque sourire ou chaque bout de pain, que pour son art il recevait.
Sans ce contrôle et cette perspicacité, il sévirait encore.

Laissant là l’illuminé rompu, brisé, juste bon à se pendre,
Il remonte la rue, caressant son cartable.
D’ici quelques minutes, il va se mettre à table.
L’écrivain ne vit plus d’avoir vu tant de haine, son monde n’est que cendres.



Dans le ciel passe alors une blanche colombe, qui lâche une brindille,
Juste un épi de blé, du travail de la terre, tout gorgé de soleil.
Il a des reflets d’or et de couleur de miel.
Un chat dort non loin, tout près d’un pot de fleurs où poussent des jonquilles.

Le recevant sur lui l’animal endormi fait tomber, quel dommage,
Le grand pot de fleurettes rempli, sur le chapeau de qui ?
De notre fonctionnaire qui sombre sans un cri.
Son chapeau de feutrine n’aura rien amorti, de ce septième étage.

Déjà autour de lui, pour la paix de son âme,
S’affairent des ménestrels, pour l’éloge funèbre.
Des oiseaux, des lutins, arrivent aussi des zèbres,
Tant de songes étranges qu’a créés le poète, au fond de sa cabane.

Ce cortège bizarre suit deux grands chevaux blancs,
Rend un dernier hommage en allant vers l’éther.
Tout être reste aimé, d’un poète ruiné, voire même un fonctionnaire.
Le corbeau conclura, la griotte en gobant.

Depuis lors, les artistes, se tournant vers la lune,
S’essayent à trouver la raison du destin,
À cette histoire une finalité, à cette fable une moralité.
Retournez à vos plumes,
Sans souci, sans peiner,
Car de moralité, il n’y en a aucune.


 
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   margueritec   
8/8/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Moi qui n'aime pas les poèmes trop longs, j'ai eu plaisir à le lire plusieurs fois.

Que dire ? J'ai bien apprécié. Pourquoi ?

Revisiter le corbeau et le renard en transformant le renard en asticot réincarné et en s'écartant de la "fable-type"est déjà une trouvaille.

Et, quand on connaît la suite du poème, cette réincarnation d'un humain en asticot, c'est à dire selon les règles bouddhistes en être inférieur par rapport à l'humain, prend toute sa saveur.

Saveur amplifiée par cette sorte de joie benoîte de l'asticot, cf la 2° strophe :

"Sa danse envoûtante, sa liberté naissante, à nulle autre pareille,
Sa sensation de paix, son appétit de vivre, et sa tranquillité,
Sa demeure trouvée, dans ce fruit si douillet
Lui faisaient apprécier, et non pas sans délice, les rayons du soleil.")

que vient agrémenter la suite du poème : cet asticot était un homme de devoir :

"Ce voyou ignorait, du moins le prétendait, qu’il devait au trésor,
Rendre compte et régler, chaque rime qu’il rêvait"

qui ne savait pas apprécier la beauté du monde et des rêves. Pire, il entravait la joie des mots, de l'écriture, de la nature.

Bien vu , même si un peu facile, l'effet papillon avec la blanche colombe (symbole de paix !), la brindille (fruit de la terre), le chat (bien aimé des poètes), la chute meurtrière du pot de jonquilles : dame nature vengerait-elle le poète décrypteur du monde ?

Beaucoup de douce ironie également lors de l'enterrement, quand les "songes étranges" du poète vinrent accompagner le cortège mortuaire, beaucoup de lucidité :

"Tout être reste aimé, d’un poète ruiné, voire même un fonctionnaire",

ce qui est confirmé par le dernier vers :

"Car de moralité, il n’y en a aucune".

Il fallait oser une fable sans moralité, où le manichéisme apparent est plus subtile qu'il n'apparaît, voire nié.

Merci pour ces beaux moments passés en lisant votre poème si riche et si dense.

   Robot   
9/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Je me suis amusé sur ce texte, sur l'idée de ce texte. j'y ai trouvé cependant quelques lourdeurs, surtout ce passage que j'ai eu du mal à négocier et ou l'on sent que vous aussi avez eu de la peine à construire.
"Ce voyou ignorait, du moins le prétendait, qu’il devait au trésor,
Rendre compte et régler, chaque rime qu’il rêvait,
Chaque sourire ou chaque bout de pain, que pour son art il recevait.
Sans ce contrôle et cette perspicacité, il sévirait encore."
- je vous conseillerais au moins cet allégement [du moins prétendait-il] au lieu de "du moins le prétendait"
Je me suis régalé des deux premiers quatrains
Par contre, à un moment donné, au 5ème paragraphe on ne sait plus si vous parlez de l'asticot ou du fonctionnaire à cause de l'excès des "il" dont on ne sait plus à qui ils font référence.
La fin est plaisante et somme toute, il y a une morale ou tout au moins un enseignement:
"Depuis lors, les artistes se tournant vers la lune,
S’essayent à trouver, la raison du destin,"

   Anonyme   
18/8/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

Une belle histoire qui m'a fait sourire, j'aurais préféré lire un échange entre le ver et le corbeau, mais cette réincarnation ne concerne que le ver.
Un fonctionnaire sans cœur qui aime son métier est décrit ici avec vivacité et humour, le ton est enjoué, ironique, une belle verve poétique.

Je ne me suis pas ennuyée, et le placement de la ponctuation
offre à la parole différentes nuances. C'est vivant, coloré, grinçant, un bon rythme, bravo.

petit bémol: je trouve l'incipit beaucoup trop long.

   LeopoldPartisan   
18/8/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Florent Pagny je t'ai reconnu !!

Que dire sinon que c'est pour moi un peu, beaucoup caricatural, ce que justement ne sont heureusement pas les vrai fables...

Il n'y a pas ici, cette finesse dont se servait qu'il soit humoriste (je pense ici à Fernand Reynaut dans son rôle du garde barrière) ou ce que d'aucun appellait les moralistes Esope, la Fontaine, Brassens, Brel etc.

Ceci bien sûr n'engage que moi.

   Anonyme   
25/8/2014
czerny31

Pas marrant de se réincarner en asticot. Même superbe, même au sein d'un bigarreau.

On se retrouve livré à la voracité d'un corbeau comme dans sa vie de poète à celle du percepteur.

J'ai bien aimé cette fable délicieusement déjantée et dépourvue de toute moralité.

Merci czerny pour ce bon moment.

   Anonyme   
25/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Quels pouvoirs les poètes n'ont-ils pas ?
J'aime beaucoup votre façon de raconter. Je ne sais comment dire, elle est "lumineuse", pas simple et pas complexe.
J'ai travaillé à une époque dans des studios d'enregistrement et j'étais toujours surpris à l'enregistrement d'un speaker : il se raclait la gorge puis commençait par sourire avant de commencer à parler. Cela changeait immédiatement le ton, l'atmosphère du texte. On dirait que vous écrivez comme cela.
Et finalement, il y a quand même une morale...

   Donaldo75   
30/9/2015
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour czerny31,

J'avoue m'être bien marré à la lecture de cette fable, assez truculente même si je trouve quelques vers assez longs et moins chantants. Le début, surtout, est fort plaisant à lire, puis le rythme s'essouffle au milieu, avec une impression de remplissage, avant de reprendre sur la fin. J'ai eu l'impression que tu comblais le manque d'inspiration, certaines fois, par des vers plus heurtés, moins simples à réciter.

Merci pour le partage et le bon moment passé. Je vais payer mes impôts.

Donald


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