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Poésie classique
Damy : Le dormeur des Landes
 Publié le 02/04/14  -  9 commentaires  -  2144 caractères  -  467 lectures    Autres textes du même auteur

Une visite des mêmes lieux à un siècle et demi d'intervalle.
Écho à Théophile Gauthier.


Le dormeur des Landes



Le pin des Landes
Théophile Gautier (1811-1872), España

On ne voit en passant par les Landes désertes,
Vrai Sahara français, poudré de sable blanc,
Surgir de l’herbe sèche et des flaques d’eaux vertes
D’autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc ;

Car, pour lui dérober ses larmes de résine,
L’homme, avare bourreau de la création,
Qui ne vit qu’aux dépens de ce qu’il assassine,
Dans son tronc douloureux ouvre un large sillon !

Sans regretter son sang qui coule goutte à goutte,
Le pin verse son baume et sa sève qui bout,
Et se tient toujours droit sur le bord de la route,
Comme un soldat blessé qui veut mourir debout.

Le poète est ainsi dans les Landes du monde ;
Lorsqu’il est sans blessure, il garde son trésor.
Il faut qu’il ait au cœur une entaille profonde
Pour épancher ses vers, divines larmes d’or !


En janvier 1999, le cyclone Klaus a décimé plus de 200 000 hectares de la forêt de pins qui en compte environ 1 million. En juillet 2010, le scolyte (coléoptère xylophage) a rongé 1,5 million de mètres cubes de bois sur pied. Je ne vois dans ces fléaux ni la main de Dieu, ni le fruit du hasard.

Le dormeur des Landes
Écho

Bientôt, je ne verrai que des landes désertes
Quand les vents violents, voulant saigner à blanc
La forêt de papier, les coucheront, inertes,
Ces hommes tant épris des profits du pin franc.

Le soldat fantassin en mon rêve s’arc-boute
Sous les asseaux du ciel (ouragans du Grand Tout ?)
Et finit par casser. De l’armée en déroute,
La raison du climat en est venue à bout.

La résine a séché, serpente Mélusine
Qui ne sifflera plus que dans du sable blond
Sans pouvoir rebâtir la plus petite usine.
La Fortune aurait fait aux richesses faux bond ?

L’aède est comme un fou, déclamant à la ronde
Sa prophétie impie, oracle de la mort.
Il faut qu’il ait à l’âme une frayeur que gronde
La vérité des vers pour le peuple qui dort.


 
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   Ioledane   
19/3/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Ce poème part d’une belle idée, et d’un bel hommage à ces arbres malmenés. J’y relève un vrai souci de la formule poétique, et d’intéressants jeux sur les sonorités (« des vents violents voulant saigner à blanc », « des profits du pin franc », « Qui ne sifflera plus que dans du sable blond », « La vérité des vers »).

« Ouragans du Grand Tout » aurait mérité selon moi mieux qu’une parenthèse.

L’écho à Théophile Gautier est intéressant, avec notamment une proximité de rimes et de construction sur les premier et dernier quatrains.

Cependant, certains passages me paraissent étranges, voire incorrects :
- « les coucheront, inertes, / Ces hommes tant épris » : le vent couche les hommes ? je n’ai pas compris.
- « la raison du climat en est venue à bout » : je pense que le « en » n’a rien à faire dans cette phrase, étant donné qu’on a juste au-dessus « De l’armée en déroute ».
- « serpente Mélusine » : est-ce ici le verbe serpenter ? dans ce cas la phrase est mal tournée ; est-ce un féminin pour « serpent » ? je n’en trouve nulle part la trace.
- « sans pouvoir rebâtir la plus petite usine » : je ne vois pas du tout ce que vient faire là l’usine.
- « Il faut qu’il ait à l’âme une frayeur que gronde / La vérité des vers » : la tournure et le sens me paraissent assez curieux.

En somme, ce poème bâti sur un intéressant parti-pris de départ, par endroits joliment décliné, est malheureusement envahi (à mes yeux) d’une somme de maladresses qui en atténue le plaisir de lecture.

   Miguel   
21/3/2014
 a aimé ce texte 
Pas
C'est une grande imprudence d'avoir ainsi cité, en entier, le poème de Gautier. Le texte de notre onirien pâtit terriblement de ce voisinage. Où sont le souffle, l'âme, l'élégance du poème cité ? Les pauvres vers qui le suivent font bien piètre figure, auprès. Le soldat blessé qui veut mourir debout est quand même autre chose que ce fantassin. Pourquoi la forêt est-elle de papier ? Pourquoi des vents violents coucheront-ils, inertes, des hommes ?
Je connais "assauts", mais pas "asseaux". Le "en" du vers 8 est de trop car il reprend "l'armée en déroute". L'interrogation du vers 12 est mal formulée ; il faut : "La richesse aurait-elle fait...", on est en classique tout de même. Et cet aède comme un fou ? On ne voit pas Homère ni Hésiode ... Je pense que le "que" du vers 15 usurpe la place d'un "qui". Non, décidément, ce poème donne surtout envie de remonter le curseur et de relire Gautier.

   Anonyme   
2/4/2014
Bonjour

J'avais lu ce poème en espace lecture sans en deviner
l'auteur, et maintenant que je sais, c'est... une déception !

Deux choses à noter du poème de Gautier :
il partage mon point de vue sur l'homme;
il répond au forum que Robot avait ouvert sur la tristesse des
écrits poétiques en général.

Que dire de ce pastiche ? Ou au mieux de cette suite ?

Qu'il se lit en face de celui de Gautier dans un miroir déformant !

Le pari était difficile, trop, certainement.
Je ne vois pas bien ce que l'auteur a voulu signifier
avec ce texte.Que les ans passent et les problèmes demeurent ?
ou s'accentuent ?

Je ne mettrai pas d'appréciation mais comme je l'ai déjà dit
une fois : peut énormément mieux faire !

Hananké

   Anonyme   
2/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour.
J'aime beaucoup votre poème.
Il y a si longtemps que je n'ai vu la landes mais je pleure aussi d'autres arbres, remplacés par du béton.
Ceci dit, j'ai la chance d'en planter aussi.
;-)
Je n'aime pas du tout les parenthèses en poésie. Cela me donne l'impression que l'auteur n'assume pas ses mots.
Et puis "ouragants du Grand Tout ", je ne comprends pas.
Moi aussi je sens que les éléments manifestent de plus en plus leur colère à l'égard de l'homme.
Votre poème devrait réveiller des consciences . Il faut le recevoir avec ses imperfections car à trop s'arrêter sur la forme, on n'en perçoit plus le fond.
Merci pour ce cri.

   troupi   
2/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Damy.

D'une, j'ai adoré relire ce beau poème de T.G.
Il faut une certaine audace pour oser cet exercice périlleux et je trouve que vous vous en sortez très honorablement car votre poème me plait, et même un peu plus.
Je ne m’attarderai pas si de menues imperfections dérangent, je ne les vois pas, n'étant pas compétent pour juger du classique.
Certains me jugeront un peu trop clément mais que voulez-vous ; j'aime les arbres et ceux qui savent en parler. A bientôt. Troupi.

   leni   
2/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut Damy Il fallait oser ce saut périlleux arrière!
La critique de la forme me passe au dessus de la tête Elle peut trouver ses raisons Personnellement votre texte me touche Vous êtes
dans le registre "Troupi" Vous donnez une âme aux arbres

Sans regretter son sang qui coule goutte à goutte,
Le pin verse son baume et sa sève qui bout,
Et se tient toujours droit sur le bord de la route,
Comme un soldat blessé qui veut mourir debout.


voilà cet arbre existe et ces vers pour moi sont superbes


En bref c'est votre sensibilité qui me plait:le fond

Merci Salut cordial Leni

   Anonyme   
2/4/2014
Bonsoir Damy. En 99 j'habitais Mont de Marsan et j'ai vu la forêt après le passage de Klaus. Quoi que pour moi ce ne fut qu'un phénomène météo, je comprends très bien ce que vous voulez exprimer.
Ensuite vous avez, en quelque sorte, choisi de donner, à titre de comparaison, une suite au Pin des Landes de T. Gautier et là, le pari était risqué... N'est pas Gautier qui veut !
Au premier quatrain, je suppose que la forêt de papier fait référence aux usines de pâte à papier... à moins que ça ne soit pour illustrer sa fragilité. Le mot profit met ici une note vénale que j'aurais pour ma part évitée.
Le second quatrain est à mon goût assez mal ficelé et difficile à interpréter. L'asseau est un marteau de couvreur mais je ne sais pas ce qu'est le Grand tout.
Vers 8, "La raison du climat en est venue à bout" pourrait se transformer en "sera venue à bout" pour redonner à la phrase une construction logique.
Premier tercet, je suppose que Mélusine nous ramène aux serpents .
Pour que les vers suivants aient un sens, il faudrait je crois un point après blond :
Sans pouvoir rebâtir la plus petite usine.
La Fortune aurait fait aux richesses faux bond ?

Quant au tercet de chute, il comporte un message envers les tristes sires que nous sommes mais il est assez mal tourné et bien peu explicite.

Voilà mon avis, amical et sincère... Je ne mettrai pas d'appréciation. Je sais que vous pouvez mieux faire, je sais aussi qu'il est plus facile de critiquer que de bâtir ce genre de poésie classique. Je suis sûr que vous me comprendrez... Bonne soirée Damy !

   senglar   
2/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Damy,


J'ai trouvé ton poème plus altruiste que celui de Flaubert finalement bien égoïste auto flagellant s'épanchant - tel un pin blessé - celui-là je l'ai trouvé collant et je lui préfère de très loin l'albatros de Baudelaire.

Cet aède écolo vole en ce qui me concerne la vedette à cette pauvre Cécile qui n'en finit pas de couler ;-) Puisse-t-elle ne pas passer par les Landes et que Mélusine renaisse du sable blond et siffle à nouveau entre les cimes des grands pins qui, j'en suis sûr, renaîtront de la sève de ta plume allante et salvatrice :)

Quelle allure en effet et quel balancement, quelle métrique !

Continue ainsi de bâtir ton oeuvre Ô Poète !


brabant :)))

Bon, je retourne au PSG, pauvre de lui ! lol... Euh... pauvre de moi 3-0 pour Paris :) Comprends pas, Chelsea a marqué deux fois ;)

   newman   
11/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
j'ai lu ce poème et je l'ai trouvé très beau, particulièrement le dernier quatrain.
les mots sont forts et parfois doux voir même douloureux.
ce qui m'a gêné un peu c'est "ouragan du grand tout",cela casse le vers.ce n'est qu'un détail dans ce très beau poème.

merci pour nous et pour les Landes.


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