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Poésie en prose
Dolybela : Aux Amants – II
 Publié le 14/09/20  -  9 commentaires  -  1971 caractères  -  145 lectures    Autres textes du même auteur

Dance me to the end of love...


Aux Amants – II



La nuit a libéré l'élan que le soleil altérait. Prisonnier dans ta robe moirée, déjà ton cœur brûle de se mouvoir. C'est l'heure des tangos chuchotés dans les ténèbres diaprées du soir où les étoiles et ton pas souple se sont donné rendez-vous. Je t'offre mon bras pour mêler nos solitudes, que tes soupirs rouges se dénudent pendant que ta pudeur de velours expire. C'est minuit sur le cosmos, l'heure pénétrante. La douceur passe et se pose, un loup d'argent intense autour de son regard d'allumeuse. Ainsi s'ouvre l'ère des lunes gibbeuses et des songes.
Tes cheveux sont un rêve, amoureusement sombre.
Nos corps interviennent et s'attirent. Je prends ta taille qui tremble de désir. Je saisis ta surprise, lorsque, de même qu'à la brune l'océan allonge sur lui la nuit sidérale en reflets opalescents, je te renverse, te bascule, te couche dans mes bras et capture au vol ton souffle haletant.
Je me penche sur tes courbes, ma sirène. Les contours de ta bouche s'échouent à un baiser de la mienne. Je voudrais crier, mais une hardiesse vaine et stupide m'emporte, vers tes yeux où les promesses deviennent solides.
Le toucher de tes doigts sur les miens provoque nos désarrois en un écho sublime, j'ai mal à ma chair, je voudrais aller au-delà des corps, qui même dans la danse empêchent notre accord absolu. Nous ne serons pas un, et ce cri sibyllin que poussent les amants éperdus n'est qu'un chant de détresse face à l'impossible dépassement des formes.
Je te repousse alors, quand ma tendresse caresse la naissance de tes seins, quand ta peau sursaute. Illusion, l'essence ne s'effleure ni ne se déflore. La voilà, notre grande tragédie et sur la piste au milieu des mille étoiles nous dansons ma belle sybarite jusqu'à ce que le temps cesse, jusqu'à l'abolition des noms et des larmes, notre véritable hymen. Pour l'heure laissons au poète le charme de ta jambe lasse autour de la mienne, laissons-lui les mots, et prenons ce qui reste.


 
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   papipoete   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
bonjour Dolybela
C'est par de telles lignes, que vous me faites regretter de ne pas m'être appelé Carlos Rivarola... et d'avoir pu approcher et prendre toutcontre moi Maria Nieves... tant pis, je me contentais de regarder ces couples sur la piste du bal jadis, que l'auteur décrit si bien dans son poème !
La deuxième strophe est à ce titre, si intense ( je saisis ta surprise... haletant )
Je suis un " troll " invisible lové entre vous-deux, et je suis vraiment heureux !
Tout est poésie dans cette subtile prose, si ce n'est ( pour moi ) ce " nos corps INTERVIENNENT " que j'aurais préféré remplacé par un mot plus langoureux ; mais ce n'est que mon avis devant cette scène dont, si je devais ressusciter, je voudrais être l'acteur...

   Cristale   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Comment aurais-je pu sans remords passer à côté de cette lecture ?
La sensualité y est telle que j'aime en cueillir la délicatesse de chaque image.
Une plume aguerrie et brûlante m'enchante en ce matin caniculaire... le ventilo va perdre ses hélices ^^.

"Je saisis ta surprise, lorsque, de même qu'à la brune l'océan allonge sur lui la nuit sidérale en reflets opalescents, je te renverse, te bascule, te couche dans mes bras et capture au vol ton souffle haletant."

"Illusion, l'essence ne s'effleure ni ne se déflore. La voilà, notre grande tragédie et sur la piste au milieu des mille étoiles nous dansons ma belle sybarite jusqu'à ce que le temps cesse, jusqu'à l'abolition des noms et des larmes, notre véritable hymen. Pour l'heure laissons au poète le charme de ta jambe lasse autour de la mienne, laissons-lui les mots, et prenons ce qui reste."

Un tango charnellement poétique du plus bel effet qui laisse un délicieux frémissement sur la peau.

Bravo Dolybela !
Je vais aller découvrir vos autres publications...

Cristale

   Stephane   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Je ne sais pas pourquoi mais ce tango m'a fait penser au "Tango de la vieille garde" d'Arturo Perez-Reverte, sublime roman s'il en est.

Ici tout s'accorde pour une danse endiablée, au sens propre comme au figuré, et parfois on ne sait plus vraiment si l'on est sur la piste où sous les draps, quoi que les draps pourraient aisément évoquer une piste de danse, vu le contexte.

Une très jolie prose, merci.

Stéphane

   Anonyme   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Pas
On a pu me reprocher le ton de mes commentaires. Je ne fais pourtant que traduire avec la plus grande sincérité ce que je ressens à la lecture d’un texte. Je ne cherche ni plumage ni réciprocité de plumage, je suis sûr que chacun ici fait de même.
Je sais aussi que je suis un mauvais lecteur, ce qui devrait atténuer la sécheresse de mes arguments.

Je ne vous cacherai donc pas que ce type de poème en prose a le don de m’exaspérer. Beaucoup de falbala pour un tango au clair de lune.

J’aime beaucoup cette phrase de Julien Green dans son journal : « Il y a des dialogues d'un lyrisme un peu ridicule, des phrases qui ne pouvaient venir que sous la plume d'un jeune écrivain ardent et naïf »

- L’excès de romantisme débridé crée des métaphores à l’emporte-pièce. Ainsi l’affaire de la sirène unijambiste qui surgit en plein coït de l’océan et de la nuit sidérale, et qui retrouve soudain sa deuxième jambe de danseuse de tango pour l’enrouler autour de la cuisse du partenaire. Ça serait pas plutôt une queue de poisson ? Je veux dire par là qu’il faut rester raisonnable quand on file une métaphore.

- Cette autre image : « Je voudrais crier, mais une hardiesse vaine et stupide m'emporte, vers tes yeux où les promesses deviennent solides ». Solides ?? Ça me fait penser à la Gorgone Méduse plutôt qu’à une sirène. Elle avait en effet le pouvoir de pétrifier tout mortel qui croisait son regard.

- « Quand ma tendresse caresse la naissance de tes seins »
Le poème nous a beaucoup allumés, mais apparemment ils ont encore besoin d’un peu de réflexion. C’est vrai que nous n’en sommes qu’au II.

- « Pour l'heure laissons au poète le charme de ta jambe lasse autour de la mienne ». J’ai l’impression que le danseur de tango m’a tenu la jambe plus longtemps que celle de sa partenaire.

Pour moi, donc, une effusion, un trop-plein de rêveries bavardes qui conduisent à la somnolence des sens plutôt qu’à leur effeuillage. Un tango corse.

Une consolation : peut-être un scénario pour le défunt Eric Rohmer ? Le retour du Rayon vert ?
Bellini

   Angieblue   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je trouve qu'il y a quelque chose de cosmique dans la description de l'impossible fusion totale de ces deux corps qui s'attirent sans ne pouvoir faire qu'un.
C'est une écriture assez philosophique qui interroge sur l'angoisse de la solitude, le vide de l'existence. L'acte charnelle est, en ce sens, une souffrance car il n'annule pas cette fatalité de la vacuité.

J'ai vraiment aimé ces passages:
"Le toucher de tes doigts sur les miens provoque nos désarrois en un écho sublime, j'ai mal à ma chair, je voudrais aller au-delà des corps, qui même dans la danse empêchent notre accord absolu. Nous ne serons pas un, et ce cri sibyllin que poussent les amants éperdus n'est qu'un chant de détresse face à l'impossible dépassement des formes."

"l'essence ne s'effleure ni ne se déflore. La voilà, notre grande tragédie et sur la piste au milieu des mille étoiles nous dansons ma belle sybarite jusqu'à ce que le temps cesse, jusqu'à l'abolition des noms et des larmes, notre véritable hymen."

C'est magnifiquement dit!
Cette tragédie existentielle symbolisée par cette danse sensuelle visant à ne faire qu'un mais qui n'atteindra jamais cette recherche de plénitude et d'absolu, sauf peut-être dans la mort 'l'abolition des noms et des larmes".
La mort où notre énergie se mêle à l'univers et au tout.

J'ai vraiment apprécié cette deuxième moitié du texte, mais moins la dernière phrase qui clôt le poème ainsi que tout le début.
Il y a de belles formulations, mais aussi quelques fioritures ou banalités inutiles comme:
"ta pudeur de velours"
"tes cheveux sont un rêve amoureusement sombre"
"taille qui tremble de désir"
"regard d'allumeuse"
Le "ma sirène" est vraiment inutile et too much.

Par contre, j'ai apprécié " les "tangos chuchotés"et "l'heure pénétrante".
Enfin, je préfère quand ça reste cosmique, éthéré, implicite et philosophique.
J'aime toujours autant l'originalité de votre style qui ne se contente pas de décrire mais intellectualise. Il faut juste épurer davantage pour éviter les quelques lourdeurs inutiles.

   Pouet   
15/9/2020
Slt,

j'ai beaucoup aimé la dernière phrase.

Et paradoxalement, j'ai trouvé pour le coup que le "poète" en faisait un peu trop. Le texte est à mon sens un peu chargé et les images pas toujours inédites, je ne vais pas détailler mais le "cœur brûle", la "robe moirée", "mêler nos solitudes"... Ce début ne m'a pas trop emballé. Il m'a semblé aussi en fin de lecture que les répétitions ("nuit", "heure", "étoile", "bras...) ne participaient pas à "alléger" l'ensemble.

J'ai toutefois bien aimé ce passage: "un loup d'argent intense autour de son regard d'allumeuse." Là, je trouve une très belle inspiration, originale.
Ainsi que: "Les contours de ta bouche s'échouent à un baiser de la mienne." qui me semble bien vu.

Voilà, un texte qui n'est évidemment pas mal écrit, mais dans lequel j'ai eu du mal à me plonger.

   Lariviere   
20/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

J'ai beaucoup aimé ce texte en prose, bien rythmé, ce qui fait toute la beauté de l'exercice.

Il y a une atmosphère très singulière, non dénué de fantaisie ou de fantasque (au bon sens du terme) une atmosphère vraiment poétique présente du début à la fin, presque dans chaque vers. Le texte est bien construit, l'écriture maitrisée, la ponctuation impeccable. Sur la musicalité, rien à redire non plus les allitérations et autres consonances ainsi que la construction des phrases donnent toute sa fluidité et sa sonorité profonde au thème de cet "élan nocturne" si passionné et si passionnant !

Bravo, merci pour cette belle lecture et bonne continuation

   AESpes   
20/9/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Est-ce un rêve ? Un fantasme ? Un éveil à la sensualité ? Qu'importe, la poésie est là, "c'est minuit sur le cosmos" et vous nous emmenez danser dans la nuit des beautés sensorielles.

   fried   
7/5/2021
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Dolybela,

J'ai aimé dans votre introduction cette référence à une chanson de Léonard Cohen, "Dance me to the end of love"

Elle annonce bien votre jolie prose.
Il y a de très jolis vers comme "Tes cheveux sont un rêve amoureusement sombre"
Il est beau ce désir
désir de faire plus qu'un en corps et en esprit, un vrai plaisir de lecture. Merci pour ce partage.


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