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Poésie en prose
Dolybela : L'autre femme ou Monologue avec moi-même
 Publié le 31/07/20  -  6 commentaires  -  2861 caractères  -  107 lectures    Autres textes du même auteur

Et, comme à la dérive, un instant les déchirures rebelles fustigent sans raison mon intérieur.


L'autre femme ou Monologue avec moi-même



Son visage a les yeux fous et les cheveux au vent. Elle veut courir, parce qu'elle sait que s'attarder sur la souffrance n'en vaut pas la peine. Elle ne répond de rien à personne, elle bondit au lieu de gambader, dévore et sans se maîtriser elle lit des soleils furieux, s'accapare le grenat outragé de leurs rayons. Elle se baigne dans les ondes de la folie et lorsque ses veines bouillonnent, elle sait plonger dans le flot cristallin de la lune et éclater son regard à tant regarder l'astre sournois, se mouvoir dans l'insolente transcendance de l'indécente lueur. Oui. Oui elle a mal de rage, oui son cœur est chaos. Et malgré tout, aucune cascade d'eau sélénite, aucune brûlure incarnat ne soulage sa colère. Elle ne sait que le mouvement, que l'ondulation des membres, l'exhibition sensuelle de son ventre tendu au monde. Elle est toujours enceinte d'un monstre. Elle se sent prête à ravager les univers pour devenir le centre et le sens de tout, pour se conquérir elle-même par la sédition de toute vulnérabilité. Et le rire de la démence écorche la couche de boue sur son visage. Souveraine terrible, elle se sait le droit de réduire, car alors elle n'a plus peur d'elle-même.
Ma sauvage, comme je comprends ta douleur et comme j'aime cette aura d'une haine inadmissible. Ta fureur me fait tellement envie que j'en crève, alors quand tu t'enfuis, quand tu décides de mettre le cap sur le grand inconnu des forêts et des gouffres, lorsque tes crocs aspirent à parcourir chaque atome de chair vivante, lorsque tu hurles le mal, que ton poison déborde, qu'il s'agit là de la seule expérience métaphysique possible, celle du crime, de la blessure ouverte assumée, du sang répandu, de la soif de pouvoir, de la nourriture antichrétienne, lorsque tu recueilles en ton corps l'essence de cette énergie noire en course folle dans tes organes, lorsque tes larmes deviennent autant de morsures, lorsque ton délire transforme en force ta souffrance, mon Autre, ne te sens pas réprimée. Je ne veux pas contenir ton cri, je veux toi ; je ne veux pas que tu m'abandonnes à l'ennui du bien, je veux cette beauté menaçante qui avance, résiste, survit, jouit et méprise, qui d'un regard ridiculise l'ennemi qu'elle s'invente. Alors quand tu pars, quand tu t'écartes de la route des anges, laisse-moi ne pas te suivre d'un regard envieux mais te poursuivre pour danser avec toi.
Je veux le goût de la promesse mortelle à la commissure de mes lèvres, je veux pour moi seule un morceau de nuit, et effrayer loups, chouettes, diablesses et bacchantes, bouleverser les cosmos, retourner à l'ancestrale négation des êtres. Nous perdre au néant. Ma sœur, ne m'oublie pas dans ta fuite, prends-moi par la taille et déverse en moi un peu de ton venin. Et s'il ne reste plus rien de nous au matin que deux créatures immondes, elles au moins, seront réconciliées.


 
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   Anonyme   
4/8/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

Le travail est énorme - cela va de soi - mais cet éboulement de mots étouffe un peu la matière vive, bien que laissant intacts & le sens & l'émotion.

La poésie vibre à tout moment, elle a de grands airs, elle accroche le regard & saisit l'âme parfois mais ne me convainc pas au final.

Je n'ai pas été entraîné dans cette lecture comme dans les précédentes (car je n'ose douter de l'autrice).

"Je veux le goût de la promesse mortelle à la commissure de mes lèvres, je veux pour moi seule un morceau de nuit, et effrayer loups, chouettes, diablesses et bacchantes, bouleverser les cosmos, retourner à l'ancestral négation des êtres. Nous perdre au néant. Ma sœur, ne m'oublie pas dans ta fuite, prends-moi par la taille et déverse en moi un peu de ton venin. Et s'il ne reste plus rien de nous au matin que deux créatures immondes, elles au moins, seront réconciliées."

Cette fin est magnifique cependant et sauve ma lecture.

Merci de ce partage

Commenté en EL

Edit du 04 août 2020 : je modifie mon appréciation de bien - à beaucoup + après relecture

   Anonyme   
13/7/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour,

Une prose impressionnante, je me suis retrouvée happée par les deux facettes de la narratrice.
Violence et sensualité émanent de ce texte dense, resserré. La mise en page, en ouvrant le poème peut sembler très compact, et ainsi pas très engageant, mais il m'a suffit de commencer la lecture pour oublier ce détail.(Peut-être un retour à la ligne plus parqué, ou un interligne après "car alors elle n'a plus peur d'elle-même" aurait été le bienvenu.

Je regrette un peu le titre, enfin la seconde partie du titre qui dévoile clairement la double personnalité de cette femme.

L'expression est riche, poétique. Le tourment est présent, en phase avec le sujet.
Ces "tu" et "je" omniprésents dans la seconde parie de la prose appuie la rage, mais aussi l'amour, l'attrait pour cet autre soi-même, ce rapprochement entre elles deux, quand le "elle" du départ signifie une observation détachée.
J'ai particulièrement aimé :
"Elle ne répond de rien à personne"
"Elle ne sait que le mouvement, que l'ondulation des membres, l'exhibition sensuelle de son ventre tendu au monde."
et tout l'ensemble, en fait.

Une très habile et percutante prose sur un sujet assez terrible.
Bravo et merci du partage.
Éclaircie

   Pouet   
31/7/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Salut,

j'ai bien aimé lire ce poème sous forme de dichotomie existentielle, de miroirs brisés, d'échos intérieurs, de lucidité en surplomb.

Il y a comme un léger parfum de Lautreamont au féminin si jamais cela veut dire quelque chose. En tout cas de la fureur et du mystère..

Parfois l'expression se fait un peu "lourde" tant au niveau des sonorités que dans une espèce de surenchère langagière, de touffeur sémantique, par exemple: "l'insolente transcendance de l'indécente lueur".
Pourtant cette surcharge semble bien coller au thème, flamboyante jusqu'à l'aveuglement.

Dans l'ensemble, j'ai apprécié ma lecture de "soleils furieux"..

Merci.

   Lulu   
31/7/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Dolybela,

Le titre de votre texte m'a interpellée, mais il n'est pas ce qui m'a plu dans ma lecture car je l'ai vite oublié et interrogé ce texte dans ce qu'il suggère de dualité, comme s'il y avait deux soeurs et pas nécessairement un double d'un "soi-même", mais alors je suis peut-être en dehors de l'intention d'écriture. Ceci étant, j'ai aimé un certain allant dans ce texte, un rythme et ce côté clair qui m'est apparu dans le regard porté sur un soi et sur cette autre.

J'ai particulièrement aimé la dernière phrase qui sonne comme un espoir. Je dis "comme un espoir", mais cette comparaison est en-deçà de mon ressenti. J'ai vraiment lu une façon sincère qui m'a touchée.

Le titre serait peut-être à revoir, mais cette impression est toute subjective. Dans le texte, il semble que la poésie court entre les lignes et c'est là ce qui compte.

Merci de ce partage, et bonne continuation.

   Angieblue   
1/8/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Hello,
Je perçois dans cette dualité une recherche de l'équilibre du soi.
L'écriture est fascinante et furieuse.
L'autre soi diabolique et monstrueux veut tout dévorer dans une course folle pour annihiler le temps. Cette folie, cette révolte cache peut-être une peur de la mort, de la vacuité, qui se mêle à une rage de vivre.
J'ai beaucoup aimé cette poésie riche en images sombres, cette prose violente, fantastique et métaphysique.
Il y a un vrai style.

   MissNode   
1/8/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Toute première impression venue de la mise en page : un gros paquet de mots dans quasi un seul bloc (pas un saut de ligne)... difficile de prendre sa respiration pour entrer dans le texte.

Puis arrive la profusion d'images poétiques, plusieurs par (longue) phrase.
Et des images puissantes, avec leur impact de poésie.
J'ai eu envie de faire la pause entre chacune d'elles pour en savourer les trouvailles, quitte à me paumer dans le sens des phrases.

Mon avis est que l'auteur n'a pas eu conscience d'écrire là davantage un "récit poétique" qu'une "poésie en prose", un récit avec des émotions et personnages très vivants et perceptibles.
Mais même la poésie et les récits gagnent à être aérés dans leur présentation, au risque de pêcher par trop de richesses accumulées jusqu'à l'indigestion parfois.

D'où mon bémol dans mon évaluation. Votre poésie mériterait d'être davantage mise en valeur par des alinéas plus nombreux, et sauts de lignes après chaque phrase par exemple.


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