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Poésie libre
Edgard : Encore elle
 Publié le 11/10/13  -  8 commentaires  -  2359 caractères  -  185 lectures    Autres textes du même auteur

Petite fantaisie, qui tortille les mots les vers les rimes et tout le tintouin, comme on fait d’un zeste de citron… J’espère qu’on ne prendra pas au tragique le dernier vers… aucun pêcheur, aussi balourd soit-il, ne s’est jamais ainsi « fait la belle »… à ma connaissance !


Encore elle



Et qui caquette au bord de mon canal
Où j’pêche, banal,
Sans rien pêcher jamais ?
J’ai bien r’gardé
Sur l’onde où se mirent les branches
Ayant perdu le goût de dire
Et j’ai fait « non ! si tôt ?
C’est déjà elle ? »
Et puis le miel
D’un p’tit accord de lyre,
Un chapeau jaune et des zœils de pervenche,
Elle ? qui caquette et qui marche sur l’eau ?

Elle si légère et qui danse et qui tourne !
Chapeau fleuri et ruban de taffetas,
Air de dimanche…
Lèvres au goût d’ambroisie ?
Mais dans ses zœils,
S’y mouille qui s’y penche ;
Pluie ou soleil, soleil ou pluie ?
Sur maint écueil
On se heurte on se noie…
Ce p’tit nuage qu’elle met toujours en moi !
Sauf que si tu t’retournes
Elle est plus là.

Elle qui barbote dans le bleu matinal
Où j’rêve, banal,
Sans jamais rien penser ?
Œil de pervenche et jolis bras d’opale
Et gazouillis d’zoiseau.
Ayant perdu le goût des mots,
J’ai bien r’gardé
Et j’ai fait « bon » d’la tête,
« C’est encore elle », fluette,
Un chapeau jaune… elle glisse dans l’aurore
En babillant dans les paillettes d’or.

Œil de pervenche, gambettes de roseaux,
Des petits pieds
Pour des chaussons de vair,
Des reins de bayadère,
Boucles dorées
Au parfum de bon foin
Bercées tranquilles
Comme épis en été.
Toi le malin,
Toi qui tranche les fils,
Touche pas mon p’tit bateau :
On dirait qu’elle m’invite au fond de l’eau…

Un chapeau jaune et des zœils de pervenche !
Aussi des hanches
Aux rondeurs de voyelles,
Petits seins lisses
Comme des lunes blanches.
Par ce chenal,
Plus d’un voilier s’est fait lier les ailes ;
Dans ses zœils clairs
Un drôle de petit zair
De rire de cristal…
Sauf que si tu t’y glisses
Tu t’y perds.

Elle ! qui jaspine sur mon miroir étale
Où j’rame, banal,
Sans jamais voir le mal.
J’ai bien r’gardé :
Le chapeau jaune, ce charme d’avalanche,
J’ai beau douter,
Dans l’aube blanche,
C’est elle encore…
Et j’ai fait « bon d’accord »
Ayant perdu le goût de fuir :
« Ce s’rait l’bon moment pour la belle
C’est un chouette endroit pour mourir. »


 
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   Anonyme   
11/10/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Pensant (à tort) avoir identifié l'auteur de ce poème, je ne l'ai pas commenté en Espace Lecture, mais me suis promis de le faire si publication.

Parce qu'il m'a beaucoup plu ! J'ai adoré ce ton allègre, virevoltant, léger pour parler du tragique. J'ai trouvé en plus des expressions charmantes et insolites :
"jolis bras d’opale"
"des hanches
Aux rondeurs de voyelles"
"ce charme d’avalanche"...

C'est très charmant, cette ambiance bucolique pour parler de la mort qu'on rejoint en fin de compte parce qu'elle a l'air bien gentille, et puis que ça va bien, quoi, marre de ne rien pêcher jamais ! Le rythme sautillant s'accorde à merveille avec le propos et les liasons mal-t'à propos.
Adorable et glacé comme un bassin clair de torrent sous le soleil... du très beau boulot, pour moi. Un léger bémol pour la longueur : il me semble que vous pourriez raccourcir légèrement l'ensemble pour qu'il soit encore plus alerte ; tel quel, le mouvement me paraît un poil ressassant.

   Pimpette   
11/10/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément
NON!
IL est beau ce dernier vers!
Quand on est vraiment en poésie, en gaieté, en amour....on a souvent envie de mourir...c'est le bon moment...
Tout le reste est très réussi et je jubile!

La poésie de notre époque est là, toute légère, fragile, LIBRE!
"Ce p'tit nuage qu'elle met toujours en moi!
Pimp' heureuse

Je ne cite rien du tout...inutile...

   Anonyme   
11/10/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Edgard.
Une description inhabituelle de la Camarde, et de loin !
Ici, jolie femme envoûtante " légère qui danse et qui tourne ". On aurait presque envie de la suivre et tant pis si c'est un aller simple...

De belles images tout au long (il l'est peut être un peu) de ce texte.

" Petits seins lisses
Comme des lunes blanches ". C'est celle que je préfère hihi.

   placebo   
11/10/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Votre texte m'a donné envie de me remettre à l'apprentissage du vocabulaire, c'est un travail de toute une vie :) Je ne connaissais ni jaspiner, ni vair, bayadère. Rien que pour ça, merci.

J'aime beaucoup l'expression dans l'ensemble, le terme de libre me semble coller parfaitement à cette poésie. Il y a des accents paysans, d'autres aristocrates, avec derrière une sorte de candeur.

Thème récurrent mais très bien renouvelé.
Bonne continuation,
placebo

   senglar   
11/10/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Edgard,


Se faire la belle, '''entre le ciel et l'eau''', le contrejour et le miroir qui laisse deviner une sirène. Ne pas se jeter à l'eau, les sirènes sont des menteuses, celle-ci vous repêchera pour vous abandonner sur la rive.

Les pêcheurs ne sont jamais pris au sérieux, ce sont des amoureux du dimanche.


Entortillé comme du fil à pêche mais le tintouin emporte un sourire complice :)

Senglar-Brabant

   pieralun   
12/10/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Un p'tit mélange de Brassens (j'avais l'plus bel amandier du quartier.......un joli p'tit ecureuil en jupon....), un soupçon de Renaud, un p'tit air de Trenet.

Je suis très admiratif: comment arrivez avec vos petites abréviations, vos p'tits mots lâchés comme cela presque au hasard de la ligne, à faire quelque chose d'aussi frais, d'aussi joli, d'aussi coloré?

Je suis très admiratif: comment arrivez vous à rendre la Mort si légère, finalement attrayante, en la dévoilant avec juste ce petit vers de chute, un petit vers de génie.

Je suis très admiratif, car non content de nous servir un texte truffé de poésie, vous aidez Pimpette à faire courir un vent de fraîcheur sur notre site
Bravo Monsieur! Et chapeau bas.

   Anonyme   
7/3/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
La souffrance nous permet de prendre conscience que nous sommes en vie. La joie que nous allons mourir. (S’y mouille qui s’y penche).

Vous le dites ici à votre manière et, finalement, cela m'a beaucoup plu que vous me permettiez d'en reprendre conscience.
J'ai préféré y lire l'amour d'une femme contrairement à d'autres...
Je n'aime pas trop cette manière -un peu titi parisien- de zozoter, d'imposer les liaisons et d'élider (j'pêche...) mais il y a une telle sincérité que vous exprimez ici quelque chose d'humainement universel. Pour les hommes amoureux d'une femme ou de la mort ? Cela ne revient-il pas au même si c'est vraiment absolu... ?
Merci.

   Francis   
7/3/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Mais qui se cache sous ces appâts ,un oiseau lyre, une sirène, une jeune fille au bain, la faucheuse déguisée en oiseau de paradis ?
Faut-il s'attacher au mât ou succomber ? Assis au bord de l'eau, le vieux pêcheur a beaucoup aimé l'endroit pour "mourir".


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