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Poésie libre
Eskisse : Alliés
 Publié le 13/02/25  -  7 commentaires  -  1453 caractères  -  128 lectures    Autres textes du même auteur


Alliés



Un gigantesque soleil de pinces à linge jaunes
dans le hall de l’école là tout là-haut sur le mur
avec des flammèches en guise de rayons
L’enfant a cinq ans
Il fixe le tout et trouve ça bizarre
cet entassement de pinces serrées à tout jamais
la colle dégouline sur les bords par endroits
Les décorations c’est toujours un peu du faux

Dans la cour s’ébrouent les ombres de son âge
figurines vivantes qu’on a mises autour de lui
L’enfant grimpe sur l’arbre au bois mort quand la place est libre
Il s’entortille inlassablement autour de ce bois mort vrillé sur lui-même
comme lui

Et l’enfant mange le ciel d’orange
happe le cotonneux des airs
en tourbillon perd l’équilibre finit par s’asseoir par terre

Des oiseaux invisibles
dans l’arbre aux racines cerclées de fonte
des grilles aux arbres comme s’ils pouvaient s’en aller…
masquent leur absence d’un gazouillis effronté
L’enfant se tord le cou, imagine un couple d’inséparables vus dans un livre
scrute désespérément leur apparition en vain, c'est le vide
et les pépiements s’éteignent

D’alliés, l’enfant n’en a pas

la tasse à café de papa est restée dans le placard ce matin
L’enfant l’a vu lui de la fenêtre disparaître au coin de la rue avec son sac de voyage
Papa a pas dit qu’il partait en voyage


 
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   Eki   
27/1/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Le temps d'une récréation, on peut rêver, jouer à pile ou face...
en y mêlant légèreté et gravité...
L'imaginaire d'un enfant confronté à la réalité...croire encore qu'on peut repeindre le ciel, croire que rien ne peut se défaire...
C'est tendre et touchant comme l'innocence de l'enfance.

   Dimou   
5/2/2025
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
Bonjour

Un seul être vous manque et tout est dépeuplé pas vrai ? Ce ne sont pas les petits camarades de cet enfant, ces "figurines vivantes", qui "salueront" son âme.

Un poème sur l'absence, l'écriture comporte ce qu'il faut de peps, de nature, d'images, mais manquera selon moi un peu d'émotion.

J'ai apprécié ce poème malgré des petits défauts, tel que cette répétition peu élégante qu'est la mention de ce "bois mort", qui n'apporte pas à la cadence, à l'ambition évocatrice de cette pièce, et qui aura heurté ma lecture.

On plonge dans l'esprit de l'enfant, par les réflexions qu'il se fait par exemple sur les arbres, mais pour un sujet aussi sérieux l'humour a t-il sa place, au milieu de ces traits d'esprits ?

Je n'ai pas pu ma laisser emporter totalement mais je trouve ce poème relativement interessant et l'ai apprécié.

Mais je suis bon client peut-être.

Au plaisir.

   Ornicar   
6/2/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Riche, sensible, poétique.

"Papa a pas dit qu’il partait en voyage" et pourtant, il s'en va "au coin de la rue avec son sac de voyage". Drame. Incompréhension. Tout part de là. Le père se sépare-t-il de la mère ? Les pensées et interrogations de l'enfant nous sont transmises en italique, et l'italique, c'est un peu l'aparté de la typographie.

L'enfant a tellement de mal à comprendre le monde des adultes que tout son environnement se dérobe à lui. Tout sonne faux et faux-semblants, vide et creux, comme si rien de tangible n'existait : ses camarades d'école ne sont que des "ombres de son âge", "des figurines vivantes... mises autour de lui", le bois de l'arbre est "mort", même les oiseaux sont "invisibles" et "masquent leur absence d'un gazouillis effronté" (au passage, belle image "oxymorique"). Tout un monde, son monde, s'écroule car "d’alliés, l’enfant n’en a pas". Il est seul, désespérément seul, pour affronter ce déchirement de sa petite hauteur, celle d'un enfant de 5 ans. Ce n'est pas pour rien, d'ailleurs, que ce vers ("D’alliés, l’enfant n’en a pas") est isolé au milieu du texte.

Dans son immense chagrin, ce tout jeune regard s'attarde alors et se fixe sur des détails à la fois insignifiants et surprenants comme les racines de cet arbre "cerclées de fonte" suscitant des réflexions incongrues ou cocasses qui le distraient un court moment de sa peine ("des grilles aux arbres comme s’ils pouvaient s’en aller...") Comme cela nous arrive encore à l'âge adulte, dans certaines circonstances. Bien vu et finement observé !

La tonalité générale est à la morosité. Pourtant, de cette grisaille ambiante, surgissent parfois de rares éclats de lumière, comme par exemple, ce "gigantesque soleil de pinces à linge jaunes", qui m'a tout de suite accroché à son fil, ou encore, ce "ciel d'orange".

C'est ainsi que j'interprète et reçois ce poème. Je me suis toutefois interrogé sur la signification du titre, "Alliés". Le père s'en va-t-il à la guerre ? On peut tout imaginer des raisons de ce départ. Le lecteur se trouve alors dans la même incertitude et les mêmes questionnements que l'enfant. Alors, pourquoi choisir ce titre intriguant ? J'ai bien un début de réponse qui vaut ce qu'il vaut : pour moi, tous les éléments du décor se liguent et "s'allient" contre l'enfant dans un mouvement de fuite générale et de faux-fuyants permanent.
Peut-être me suis-je fait un film après tout. Mais c'est un bon film.

   ALDO   
14/2/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Raconter c'est mentir,
alors le soleil de ce souvenir sera faux.

Mentir c'est décorer, indispensable parfois...

J'aime beaucoup retrouver la perte d'équilibre que sont souvent vos mots.

Et sous une belle tristesse jaune-orangée,
on se demande avec l'enfant
pourquoi nos racines n'ont pas été "cerclées de fonte " elles aussi

et pourquoi nous croiserons forcément Tout,
un beau jour de ciel d'orange,
au coin d'une rue,

avec un sac de voyage...

bravo

   papipoete   
13/2/2025
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
bonjour Eskisse
l'enfant tout seul, s'invente des copains qui crieraient dans la cour, comme à l'école... mais hélas ici, il n'y a que des ombres qui ressemblent à ces alliés, que le héro n'a pas.
presque ordinairement, dans cette vie où le petit désespérément s'ennuie, il a déjeuné seul une fois de plus dans sa vie ordinaire ; le bol de papa est resté dans le placard...hier, ne vit-il point la silhouette de son père disparaître au coin de la rue.
NB quand la lose est couleur primaire, et perpétuelle, on fait avec semble dire ce petit abandonné
" papa, t'es où ? papa où t'es " chantait Sromae...
le décor planté annonce la couleur, et l'on sent bien que l'on ne va pas rigoler ; mais je trouve l'approche un peu fastidieuse ( première strophe particulièrement )
celle des " grilles aux arbres " a ma préférence.

   Pouet   
13/2/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Slt,

l'entame, avec son soleil en pinces à linge me fait penser à un miroir de sorcière sans reflet, en déformation directe, plaquée ; d'où, plus loin,
"Les décorations c'est toujours un peu du faux".
L'ensemble donne l'effet d'un décor, d'une mise en scène de la réalité dont le petit garçon ne veut pas. La séparation des parents, on suppose le départ du père, est bien jouée dans ces inséparables qui peuvent tourner le cou bien plus que l'enfant qui, lui, ne peut fixer le passé. L'ensemble me plaît bien, la petite touche de la grille de l'arbre est bienvenue.
J'aurais peut-être utilisé la ponctuation dans ce texte pour alléger un peu, par exemple : "L'enfant, cinq ans, fixe le tout..." Je pense qu'il devait y avoir moyen d'utiliser moins de "petits mots" comme disait ma grand-mère, de resserrer peut-être un peu le texte, mais j'ai moi-même beaucoup de difficultés avec cela.

Quoiqu'il en soit le texte est visuel, onirique, émouvant. Réussi.

   Louis   
14/2/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Des pinces à linge associées, alliées, composent un soleil, et le soleil, c’est la joie, la gaieté, c’est la vie.
Ce soleil paraît l’image d’une union inséparable, définitive, perpétuelle : « pinces serrées à tout jamais ».
Mais ce soleil aujourd’hui paraît faux à l’enfant de cinq ans, personnage de ce drame poétique, qui l’a remarqué « dans le hall de l’école ».
Non, les choses ne tiennent pas ensemble définitivement. Ou ne tiennent entre elles qu’artificiellement ( « une colle qui a coulé »).
Le « vrai soleil », celui de la vie et de la joie, ne brille plus pour lui.
Il s’est brisé.
Il n' y a plus que ce soleil factice qui "pince" le coeur.

L’enfant, bien que très jeune, a compris.
L’apparent « départ en voyage du père », il n’ y a pas cru.
Il a compris la signification de son départ, il a senti que ses parents se séparaient.
Le départ ne peut être que la conclusion d’une situation parentale dégradée depuis un certain temps déjà, et il l’a ressentie, un enfant perçoit, ressent plus qu’on ne le croit ce qui se vit dans son milieu familial.

Le monde du petit garçon, tel qu’il l’a connu, s’est effondré depuis le signe même de la séparation, depuis le départ du père.
Toute la réalité lui semble avoir perdu sa consistance, y compris autrui ; aussi les autres enfants de l’école lui apparaissent-ils comme « des ombres de son âge ».
Ce qui était à ses yeux le plus solide, le plus ferme, le plus inébranlable ; ce qui, lui semblait-il, ne pouvait que durer toujours, ne pouvait être qu’une permanence, cette présence d’une famille, voilà qu’elle se brise, et se défait, et se désagrège.
Les autres ne lui apparaissent plus que « figurines vivantes » dans un théâtre d’ombres, où tout n’est que fugace et passager, quand la stabilité fait défaut.

Rien donc désormais à qui, à quoi s’accrocher vraiment.
Il y a l’arbre dans la cour de l’école.
Et l’enfant grimpe sur l’arbre.
On le sait bien que l’arbre constitue une figure symbolique de la famille, jusque dans les dessins d’enfants, l’arbre toujours "généalogique". Un refuge est recherché dans ses branches, une restauration de l’ordre des choses connu depuis la naissance, mais c’est un arbre « au bois mort » sur lequel s’est perché l’enfant qui reproduit alors, dans un déplacement métaphorique, sa situation vécue telle qu’il la perçoit.
L’arbre lui-même, comme son père, pourrait « s’en aller », n'est-ce pas la raison pour laquelle on l’encercle de « grilles » ?

Le ciel ne lui apparaît plus d’un bleu serein, mais inquiétant, « d’orange » ; il s’assimile ce ciel, « le mange », intègre cette inquiétude, de même qu’il absorbe et intériorise « le cotonneux des airs », qu’il « happe ». Comment l’air ne serait-il pas « cotonneux » désormais, quand plus rien n’a de solidité et de consistance ? Tout est d’ombre et de coton, comment pourrait-il rester debout ? Sur quoi pourrait-il trouver appui, et l’arbre est mort. Alors : « il perd l’équilibre et finit pas s’asseoir par terre »

Il cherche des « oiseaux invisibles » qu’il imagine appartenir à ces espèces de perroquets, que l’on nomme des « inséparables », comme les rosegorges. Il cherche, pour conjurer la division qui sépare ses parents, contamine toute réalité, et le laisse désemparé, ces « alliés » pour toujours, ces ailes de l’indissociable.
Drame de l’enfant, qui ne troue va pas dans le ciel ce qu’il cherche. Amer constat : « D’alliés, l’enfant n’en a pas ». Ses parents ne sont plus « alliés » ; nulle part, il ne trouve d’appui pour le soutenir, non, il n’a plus d’alliés.
Toute alliance lui semble perdue, tout est décousu ; lui-même comme toute chose se trouvent défaits.

Dans ce texte poétique, de façon brève et resserrée, le drame d’un enfant qui découvre la séparation de ses parents est bien rendu.
L’imaginaire par lequel il se représente la situation, faute d’un langage adéquat, est finement pénétré.

Merci Eskisse.


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