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Gemini
3/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
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Il me semble qu’on est en libre.
On se demande si "les pairs coupables" ne figurent pas le père de la mariée (c'est la tradition dans la remontée de la nef), et donc, symboliquement, le créateur des "mille douleurs passées"... aux airs de Satan. Ce texte à la fois empreint de pessimisme et d'optimisme, brille selon moi par son caractère volontaire d'affronter la vie en brut, avec toutes ses imperfections, et avec l’espoir, ou plutôt l’ambition, de la rendre meilleure : ("pour pallier les injustices passées"). Je trouve cependant que les "coupables" deviennent vite "repentis" et que "l'époux au visage de condamné" se mue bien rapidement en "miséricordieux". Il faut croire qu'une "sincère rédemption" est capable de cela (ou qu'il s'agit d'un voeu pieux, futur aidant :"J'épouserai", "sera", "adopteront", "se dévoilera"). Il y a quelque chose de religieux dans ce tableau (l'image du Sauveur et de son Sacrifice s'impose rapidement), brossé de façon fort originale et où les mots « oui » et « amour » n’apparaissent pas. Mariage de raison ? Je suis admiratif du dernier vers, brillant d'humanité, qui semble être guidé par la ferveur de la foi. |
Miguel
7/3/2024
trouve l'écriture
convenable
et
n'aime pas
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Les injustices passées ne doivent pas faire oublier les injustices présentes. Notre siècle ne donne guère envie de l'épouser, fût-ce en robe noire. Faut-il vraiment " vivre avec son temps" (avec toutes les horreurs dont nous sommes les témoins) ? Il est facile de dénigrer le passé ; ça aide à s'aveugler sur l'actualité. Ce mariage, avec sa robe noire et son pas lent, a des allures d'enterrement. C'est bien plus en rapport avec notre temps. La "parole libérée" ? Elle n'a jamais été aussi muselée. Quant à avoir "le coeur ouvert à ce qui est moi dans l'autre", quelle exemple d'égocentrisme : ne vaudrait-il pas mieux, mais c'est plus difficile, être ouvert à ce qui, dans l'autre, est l'autre, justement ?
Miguel, en EL |
papipoete
20/3/2024
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
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bonjour gujot
Tel un Jésus Christ laïc, le fiancé portant toutes les fautes du monde, s'en va vers une croix ( à toute forme, ansée et même svastika ) expier les fautes des " pairs coupables ", pour redonner une chance à la condition humaine. NB certes, il y a beaucoup de pécheurs, pauvres comme magnats, de sacrées ardoises à éponger contre un ultime don de soi, par le sacrifice d'un volontaire ; mais il y a " les autres ", bons, charitables, gentils, sans casier dont la liste emporte Blanc contre ce Noir, d'avant et céans ( Tsar, Blond, Petit Gros ) Bon, peut-être suis-je à côté de la plaque, mais voici ce que votre texte m'inspire. |
Cox
21/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
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Roh oui!
Le texte m’a enthousiasmé. De belles images toutes en simplicité mais très évocatrices, précises, pleines de jeu sur les contrastes. Et surtout une vraie réflexion, avec des idées nuancées qu’on arrive á livrer sans lourdeur et sans perdre en souffle : ce n’est vraiment pas si commun en poésie ! Un texte intelligent qui a beaucoup à dire en peu de lignes, alors qu'on voit trop souvent l'inverse (genre dans mes commentaires à rallonge 😁). La réflexion que vous proposez fera grincer les dents des boomers les plus inconditionnellement passéistes, mélodie toujours harmonieuse à mes oreilles 🤭 J'épouserai le siècle en robe noire Le noir sur le blanc, le deuil et les épousailles dans un seul vers pour ce mariage douloureux. Courageusement, on scelle l’union de notre destin à celui de notre époque, pour le pire d’abord, et le meilleur on verra bien. On le construira ensemble le futur, mais il faut bien commencer par un geste d’amour pour ça. On ne rejette pas, on a la force de faire cet acte difficile d’acceptation profonde, intime, mais certainement pas aveugle : on est conscient de ce que ça supposera de peine et de sacrifice. Je note que l’auteur est un homme : il y a là une inversion des rôles qui s’élève au-dessus des genres pour ce mariage symbolique qui n’est pas affaire de sexe. Là encore, une façon astucieuse de plonger le texte dans des questions d’actualité, dans une démarche d’ouverture et d’acceptation. Décidément, c’est qu’il y a à manger dans ce vers ! Ma traîne brodée des mille douleurs passées Chaque pas sera un témoignage de reconnaissance Une marche nuptiale vers la réconciliation Le texte est moderne : on accepte le présent, on se tournera vers le futur, mais on n’oublie pas le passé pour autant. La douleur encore une fois, est au centre de l’amour. Mais on sait « broder » les horreurs passées pour qu’elles servent à embellir le présent : jolie façon d’apprendre des erreurs de l’Histoire, sans les renier, pour tenter de les dépasser et aller de l’avant. Ce mouvement vers l’avant, cette « marche nuptiale » est calculée, mesurée à « chaque pas », et remplie de « reconnaissance » pour les sacrifices et les douleurs de ceux qui l’ont précédée. L’auteur fait preuve de plus de hauteur que ceux qui voudraient opposer les époques dans une dichotomie simpliste : ce n’est pas parce qu’il célèbre son temps qu’il dénigre le passé. La "réconciliation" de notre époque torturée (avec le passé ou bien avec elle-même?) est bien le but de ce mariage. C'est pour ça qu'on choisit d'aimer : non pas parce que tout il est beau et tout il est gentil, mais parce que l'amour est une nécessité pour apaiser la violence du siècle. À mon bras mes pairs coupables Adopteront le pas lent des repentis Rhôô, comment ça me plait, ça... ça me plait presque autant que Ferré qui chantait « les étoiles que [le Diable] sème dans le remords des assassins », et qui m’est venu en mémoire en lisant ces vers. C’est toute une génération, au bras de l’auteur pour ce mariage, bien sûr : une foule diverse mais unifiée dans le rôle d’être aimé. Et l’on est coupable : un mariage qu’on célébrera peut-être plutôt dans un tribunal que dans une église. Le remaords, la douleur, le jugement épousent l’amour lui-même, et c’est vraiment touchant. Une grande sincérité pour décrire les sentiments confus d’une génération un peu perdue, remplie de doutes existentiels et de paradoxes effrayants. La marche continue. Elle est toujours lente, comme le suggérait le découpage pas-à-pas des vers précédents. Mais cette lenteur qui était précédemment calculée pour prendre le temps d’un « témoignage » est maintenant plutôt le résultat de la honte. Beaucoup de choses se mêlent dans ces images simples au symbolisme complexe, très riche. Et pourtant tout reste cohérent, le texte se développe, prend de l’envergure et explore de nouvelles dimensions sans se contredire à chaque nouveau vers. Et l'époux aux multiples visages des condamnés se dévoilera Miséricordieux devant ma sincère rédemption Peut-être les vers qui me séduisent le moins, j’y vois surtout une répétition des idées précédentes : la multitude unifiée, le jugement, le remords (et la sincérité qui n’avait pas besoin d’être mentionnée parce que l’auteur a fait un travail suffisamment bon pour que je ne la remette pas en cause). On note cette fois que le remords a changé de camp : les repentis c’étaient les autres, maintenant c’est l’auteur. Ca répond peut-être à une question qu’on aurait pu se poser : est-ce que l’auteur se considère à part, détaché de cette foule dont il ne fait pas partie ? Je pense que non et que c’est simplement son point de vue interne qui l’incite à décrire la situation comme ça, mais ce partage de la culpabilité indique qu’il n’est pas différent et qu’il est bien, finalement, une part de la foule du siècle sans chercher á s’en distinguer. Tout le monde est juge, tout le monde est jugé et l'auteur ne s'y dérobe pas. La grandeur d'âme nést pas non plus son apanage puisque le siècle épousé saura aussi se montrer "miséricordieux" envers lui -coupable également- puisque finalement il ne font qu'un : c'est bien le sens de cette union après tout. J'épouserai le siècle comme on épouse un amoureux, le regard vif, la parole libérée et le cœur ouvert à ce qui est moi dans l'autre. Une belle conclusion, en forme de déclaration. « ce qui est moi dans l'autre » est important : il reprend les thèmes de la multitude unifiée et confirme encore que l’auteur ne s’imagine pas comme un être à part. La différence est là, elle est acceptée, elle est aussi transcendée. Le regard est « vif », clair, sans concession : oui, il l’a été tout le long de ce texte qui ne se voile pas la face et ne tombe pas dans le clichés simplistes d’un « camp »ou de l’autre. Il mène à une « parole libérée », comme on l’entend ici. Elle n’est pas libérée juste pour faire sa contestatrice bornée, elle reste guidée par la bienveillance et l’amour à « cœur ouvert ». On pourra peut-être reprocher ces expressions un peu convenues pour le final, qui risqueraient de lui donner un ton mièvre… Mais pour moi, la juxtaposition des idées et faite avec suffisamment de subtilité et de nuances pour éviter ce piège, et tout le reste du texte a réussi à préparer cette conclusion logique, comme un essor lyrique. Je suis vraiment conquis par ce texte intelligent et sensible ! Très impressionné par la concision des vers et la richesse du sens. Merci du partage |
Pouet
21/3/2024
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Slt,
l'époque n'est jamais la bonne, peut-être que mon âme se serait-elle mieux portée au 19 ème siècle. Je ne sais pas. Certainement, nous faisons partie du monde, jusqu'à un certain point d'effacement bien sûr, mais nous en faisons partie. Se repentir de ce qu'on est est un peu un voyage quotidien, en tout cas pour ma part j'ai le billet de train. J'ai une maladie . Celle de préférer l'ironie à la contrition. J'avoue aussi un insigne penchant pour les grandes idées et l'inaction. Les mariages, sans doute, me désespèrent. Célébrer une geôle de plus me dis-je... mais c'est vrai, l'Amour, c'est beau. L'amour de soi, l'amour du "prochain". Non, je n'ai pas de costume à ma taille de toute façon. Après c'est sûr, reste le fameux "monde à léguer à nos enfants", et là, le "moi dans l'autre" on y est en plein dedans... Comment on explique à son gamin de six ans que non ce petit qu'il voit à la télé c'est pas parce qu'il a le ventre gonflé qu'il meurt pas de faim, que si kevin veut pas se mettre en maillot de bain à la piscine c'est parce qu'il a des traces de ceinture sur le dos, que si Jasmina pleure tous les matins dans les toilettes c'est parce qu'on la traite de grosse baleine dans le car pour aller à l'école. Que la vie c'est comme ça. Toujours. Siècle après siècle. Pas une question de "Temps", juste de temporalité. Je ne sais pas si le texte est à pendre au premier degré, auquel cas je n'y adhère pas. Ou je le comprends mal. Ou je ne m'y reconnais pas. Ce qui est un peu la même chose. Je ne me suis pas senti à l'aise englobé par votre "Je" on l'aura compris universaliste grâce aux derniers mots du texte.. Bref, peu sensible au côté incantatoire trop marqué (effet sans doute voulu) à mon goût, je n'ai pas envie d'épouser je crois, ou "pardonner" ou faire "acte de contrition". Je ne veux ni faire table rase ni prendre dans mes bras. Je suis probablement trop lâche pour cela. Ou je me suffis à moi-même en la matière. Je suis mon propre pénitent. Après, à mes gamins ben... leur dire de trouver un petit coin de bonheur où ils le peuvent, de tenter de faire avec l'extérieur sans trop le subir et surtout de choyer l'esprit critique, la révolte des cœurs. D'apprivoiser les miroirs déformés. En tout cas ne pas demander pardon d'exister. Ah oui et ne pas oublier de leur tatouer sur le front "La lucidité est la blessure la plus proche du soleil" de Char. Et dire qu'en ce moment je lis Christian Bobin... Voilà c'est ce que m'a inspiré votre poème à un moment donné, mais cela ne présume en rien de sa qualité et ceci est parfaitement subjectif. Bien à vous. |
Graoully
25/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
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Bonjour,
Ce poème de la rédemption, de la volonté de rebâtir sur les ruines et les douleurs du passé, me charme, sans que je sache trop pourquoi, peut-être grâce à sa métaphore nuptiale que je trouve bien sentie, et à sa clarté (clarté qui ne se retrouve pas toujours dans le genre pratiqué ici, où l'on confond souvent profondeur et obscurité) et je n'ai rien de bien intéressant à ajouter, à préciser, qui pourrait être utile à l'auteur. G. |