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Poésie classique
Lapsus : La tentation Javert
 Publié le 09/11/09  -  15 commentaires  -  2250 caractères  -  341 lectures    Autres textes du même auteur

Il est des moments où la tentation Javert se fait plus forte que d'habitude.


La tentation Javert



Sur les quais de Paris se brise l'amertume
De ceux pour qui la vie a perdu sa beauté
Au temps où le ciel luit plus noir que de coutume.

Approchez-vous de l'eau, par un pas de côté
Regardez-vous en face et dépassez l'abîme,
Le portrait se veut flou puis tout en cruauté.

Nul parfum de narcisse au soir de la déprime
Quand vous semblez si bas et le monde si haut
Que poursuivre sa vie est en soi-même un crime.

Tentation Javert, elle est à fleur de l'eau.

Qui ne voudrait goûter la douce quiétude
Qui semble cheminer en ces froids paradis ;
Il est des lieux obscurs où meurt l'incertitude.

Se glisser dans ce lit, dans ces draps refroidis,
S'unir à l'eau qui dort par une calme étreinte,
Ce sont les soubresauts des plaisirs affadis.

La liberté enfin, sans l'ombre d'une astreinte,
Où la seule caresse ondule au fil de l'eau,
Le souffle retenu n'est plus une contrainte.

Tentation Javert, elle est à fleur de mot.

Se laisser dériver et - au fond - voir le monde,
Oublier la surface et son obscurité
Car les eaux sont vitraux dans le naos de l'onde.

Nous ne laisserons rien à la postérité,
Emportés par le temps, comme l'est une goutte,
L'ultime illusion est notre altérité.

Par un dernier plongeon s'achève notre route,
Il peut être opportun d'enlever son chapeau,
Mais c'est assurément le dernier pas qui coûte.

Tentation Javert, elle est à fleur de peau.


« Javert demeura quelques minutes immobile, regardant cette ouverture de ténèbres ; il considérait l’invisible avec une fixité qui ressemblait à de l’attention. L’eau bruissait. Tout à coup, il ôta son chapeau et le posa sur le rebord du quai. Un moment après, une figure haute et noire, que de loin quelque passant attardé eût pu prendre pour un fantôme, apparut debout sur le parapet, se courba vers la Seine, puis se redressa, et tomba droite dans les ténèbres ; il y eut un clapotement sourd, et l’ombre seule fut dans le secret des convulsions de cette forme obscure disparue sous l’eau. »
La mort de Javert – Les misérables [Victor Hugo -1862]


 
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   Anonyme   
9/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Lapsus, Bravissimo ! J'ai apprécié ce texte de bout en bout, peut-être un peu parce qu'il nous ramène à Hugo, mais surtout par la qualité de tes alexandrins. Quant à la chute, double chute si l'on peut dire, elle est magnifique...Mais c'est assurément le dernier pas qui coûte.
Juste une petite remarque, le hiatus et-au dans le vers :
Se laisser dériver et - au fond - voir le monde,
Merci de tout coeur pour ce superbe poème ! Alex

   Anonyme   
9/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Le poème est très bien écrit, des vers harmonieux et ciselés, structure "terza rima" tout en finesse.

J'aime beaucoup (entre autres) :

"Par un dernier plongeon s'achève notre route,
Il peut être opportun d'enlever son chapeau,
Mais c'est assurément le dernier pas qui coûte."

J'aime un peu moins le vers-refrain "Tentation Javert...", mais c'est très subjectif.

   brabant   
9/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Lapsus,

Qu'est-ce que la "tentation Javert" ?
Elle se traduit ici par un suicide, la tentation "Javert" serait donc la tentation du suicide. On se suicide pour échapper aux problèmes posés par la vie, devenus insurmontables. Ils peuvent être variés: santé, amour, argent, ..., avec toutes leurs variantes.

Quel est donc le problème de Javert ? Je relève:
"De ceux pour qui la vie a perdu sa beauté
...
Regardez-vous en face...
Le portrait se veut flou puis tout en cruauté.

Nul parfum de Narcisse...
Quand vous semblez si bas et le monde si haut
Que poursuivre sa vie est en soi-même un crime.
...
Il est des lieux obscurs où meurt l'incertitude.
...
La liberté enfin, sans l'ombre d'une astreinte,
...
Oublier la surface et son obscurité"
Le béotien ne distingue pas précisément les raisons qui poussent Javert à se suicider (or Javert n'est pas monsieur tout le monde; les raisons citées peuvent être celles de tout un chacun) malgré quelques éléments semés ici et là, mais trop généraux.

J'aime bien le fait qu'il enlève son chapeau avant de franchir le dernier pas.
C'est dans le texte un trait d'humour, mais là se trouve en fait la signification du suicide de Javert: il pose ((soigneusement sans doute)) sur le quai l' "uniforme", ou ce qui pourrait symboliser un certain statut social et moral et..., dont il ne s'estime plus digne.

Ceci n'est pas, à mon avis, montré clairement dans les différents éléments que j'ai relevés (je pense avoir été exhaustif dans ce relevé des raisons poussant au suicide le personnage du poème).

Javert est un homme qui a failli à son devoir quand son devoir s'est trouvé en conflit avec sa conscience, ce qu'il n'avait jamais fait auparavant; probablement ne se posait-il même pas la question.

Peut-être ce poème classique ("Il ((est)) opportun ((pour moi)) d'enlever ((mon)) chapeau" lol) aurait-il pu être l'occasion de définir un "syndrome Javert" (je hais le mot syndrome!) et jouer dans la cour d'Arte, de ne pas se limiter à une émission de télé-réalité en surfant sur la seule "tentation" javertienne ?... lol, je plaisante. Je ne suis pas arrivé à placer le mot "île", bien fait pour moi!

Le poème a beaucoup d'allure, les vers y sont égaux et la touche d'humour de la dernière strophe digne de nos cousins d'Outre-Manche, car l'humour on le sait n'est pas français. Alors bravo à toi! Re-chapeau! re-lol.

   David   
9/11/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Lapsus,

C'est très noir avec l'acte qui n'est pas nommé, remplacé par cette "tentation Javert" qui tombe juste. L'écriture classique reste assez intemporelle, elle n'est pas trop marqué par la référence à Hugo, son époque, sans excés inverse non plus. C'est un choix bien mené.

Pour moi, un nouveau mot dans un très beau vers :

"Car les eaux sont vitraux dans le naos de l'onde."

Une sonorité proche de celle d'un mot comme néant par exemple, j'ai appris que c'était une pièce de temple égyptien, un lieu important.

   pieralun   
10/11/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Beau texte vraiment, une impressionnante athmosphère noire et pesante, glaciale; retranscrite en vers comme V.H l'aurait certainement validée. Le tout emballé dans un texte fluide et beau de ses mots et de leur sonorité. Cerise sur le gateau, ce fil rouge tout en délicatesse par le mode d'interrogation qui rumine sans cesse sur un personnage qui, sans cesse, n'a jamais céssé de ruminer; la boucle est bouclée et l'on y trouve tout.

[fin du com modérée : aucun rapport avec le texte]

   Meleagre   
10/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Par ce poème, Lapsus renoue avec la grande poésie classique qu'il a déjà illustrée...
Les tercets en alexandrins sont très musicaux et harmonieux, ils gagnent à être lus à haute voix. Il y a de très beaux vers : le 1er tercet (une très belle introduction) ; "Quand vous semblez en bas et le monde si haut" ; "Il est des lieux obscurs ou meurent l'incertitude"...

Mais j'aime moins le refrain. Je n'aime pas trop cette structure grammaticale, avec une apposition au pronom sujet "elle" (structure un peu familière, déplacée dans ce poème classique) ; écrire "Tentation Javert" laisse sous-entendre que c'est un concept connu, figé, comme le complexe d'Oedipe ou l'effet Joule (il aurait d'ailleurs fallu écrire "tentation de Javert", à mon avis), or c'est une invention de l'auteur ; et, si le passage de "fleur de l'eau" à "fleur de peau", en passant par "fleur de mot" est très beau musicalement, il ne se justifie pas vraiment par l'évolution du texte.
Autre remarque grammaticale : j'aurais bien mis un " ? " après "Qui ne voudrait goûter la douce quiétude
Qui semble cheminer en ces froids paradis" ?
Et je ne comprends pas trop la construction grammaticale du 6e tercet ("La liberté enfin"...) : est-ce une phrase nominale (= on bénéficie enfin de la liberté), avec une relative qui a deux verbes différents ("La liberté ... Où la seule caresse ondule au fil de l'eau, / [et où] Le souffle retenu n'est plus une contrainte.) ? A moins que ce ne soit un complément circonstanciel : "[On trouve] la liberté [là] où la seule caresse... [et où] le souffle retenu..." ?
Merci Lapsus de m'éclairer sur ce point.

Dernière remarque, d'ordre plus général : je ne vois pas trop le lien avec l'épisode de Javert. Certes, on décrit bien la tentation d'un suicide par noyade, la tentation de se jeter à l'eau depuis "les quais de Paris" ; mais Javert n'est pas le seul à l'avoir fait. Le dernier tercet, très savoureux, rétablit le lien avec l'épisode des Misérables. Mais je vois mal les pensées développées ici dans l'esprit de Javert. Javert s'est suicidé parce qu'il a manqué à son devoir, parce que sa conscience lui a fait relâcher Jean Valjean, qui lui avait sauvé la vie. Il ne s'est pas suicidé, à mon avis, par "amertume", parce que sa vie avait "perdu sa beauté", ni pour "goûter la douce quiétude"... C'est peut-être un choix d'auteur, qui se respecte : Lapsus, si tu veux défendre cette vision de Javert, je suis partant pour un nouveau débat sur Oniris !

Cela dit, le poème est beau, harmonieux, et se lit très bien. Une belle évocation d'un suicide, sans complaisance ni mélodrame.
Merci Lapsus.

   wancyrs   
10/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Excelent travail que celui d'essayer d'entrer dans la tête de quelqu'un qui s'apprête à se suicider.
Pari tenu, car ayant fait l'objet d'une dépression, je pense que les mots utilisés sont justes :
Qui ne voudrait gouter la douce quiétude
Qui semble cheminer en ces froids paradis
Il est des lieux obscurs où meurt l'incertitude
Chose cruelle que cette tentation de Javert.

Merci Lapsus.

   Selenim   
10/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je ne suis pas gourmand de poésie mais celle-là m'a vraiment beaucoup plu.
Il se dégage de l'ensemble une tendre froideur qui m'a enveloppé dans son linceul de mots. les descriptions sont subtiles, les images épurée mais piquantes, les mots allongés avec délicatesse. Une parfaite maitrise des différentes ficelles de la poésie.

Je n'ai qu'un regret, ce vers que je trouve étonnement déplacé, intrus.
Nul parfum de narcisse au soir de la déprime

Merci

Selenim

   Lapsus   
11/11/2009
Vous souhaiterez peut-être lire les retours sur commentaires.

   Mr-Barnabooth   
12/11/2009
 a aimé ce texte 
Bien
C'est osé et bien composé ...
Certains alexandrins m'ont semblé néanmoins un peu fade... Surtout parmi ceux en rimes masculines.
J'applaudis l'originalité et l'alexandrin leitmotiv
Mr B. (de retour)

   ristretto   
14/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
sujet grave, traité ici vraiment de belle façon
et sans omettre cette pointe d'humour pour la chute

merci

   Anonyme   
1/12/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
J'ai toujours été fascinée, moi aussi, par ce passage des Misérables et la fin choisie de Javert, qui n'a pas su survivre à l'ébranlement de ses certitudes.
Sur une libre variation, Lapsus en fait ici un excellent poème. Le rythme des tercets en alexandrins, interrompu tous les trois tercets par ce vers décliné en leitmotiv, donne un bel effet à ce texte. Certains passages m'ont particulièrement plu :
"Sur les quais de Paris se brise l'amertume"
"Ce sont les soubresauts des plaisirs affadis"
et les deux derniers vers, délectables, à l'ironie grinçante.
Je n'ai que deux bémols :
- les hiatus ("La liberté enfin" : pourquoi ne pas inverser les mots ? + "et - au fond")
- la diérèse désuète sur le titre et le vers en leitmotiv, qui alourdit ma lecture, mais là c'est un ressenti purement personnel.
Une belle réalisation en tous les cas.

   Diane_K   
4/12/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai beaucoup aimé ce texte évoquant longuement un sujet grave sur un ton léger, je dirais presque serein et détaché.

Le dernier tercet - un chef d'oeuvre d'humour noir et de dérision -m'a même fait sourire !

Diane

   Anonyme   
14/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
C'est si simple et si bien décrit, j'imagine le décor et je visualise la scène comme dans de l'eau claire. C'est fluide, ça se lit tranquillement, pas une accroche qui freine le fil de la lecture.
Et mieux encor, les rimes je ne les ais pas entendus, aucune lourdeur.

Le thème du suicide est abordé avec pudeur et fragilité.

   Anonyme   
26/4/2010
Commentaire modéré

   Anonyme   
9/2/2017
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Ce poème est fait d'une belle écriture, mais elle m'a laissé dans son ensemble à distance, même si le sujet délicat, ici traite ne manque de retenir l'attention.

J'en ai fait plusieurs lectures, car j'aime ce texte par petites touches, je me suis senti plus proche de certaines émotions exprimées, comme par exemple "Quand vous semblez si bas et le monde si haut".

Pour la forme, je reprocherai les "qui" et les "que", un peu trop présents dans certaines strophes.


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