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Laboniris
Lariviere : Fragment delta numéro 5
 Publié le 16/06/23  -  10 commentaires  -  10750 caractères  -  164 lectures    Autres textes du même auteur


Fragment delta numéro 5



Nous avons inventé l’amour, pour remédier à des problèmes de peau et à des poussées d’hormones, à des histoires de pH, à des frissons inexpliqués. Car un soldat pourra se faire tuer sans trop de difficulté pour de l’argent. Un exalté, non. Il lui faudra une « raison » extérieure, une « sublimation » de ses désirs terre à terre. Mais à part une superbe supercherie, quelle pourrait être aujourd’hui au grand jour une raison incompressible existentielle de tuer l’autre, ou pire, de se faire tuer… Le meurtre idéologique n’a pas de pendant naturel. Il surpasse toutes les causes, tous les besoins… Pour envoyer des hommes à la guerre ou pour les faire patienter dans des foyers bien mal chauffés, nous avons inventé l’amour, l’amour de la nation, de la gloire, de l’être « aimé ». L’amour courtois. L’amour guerrier. Pour l’amour d’une dame ou de soi ou même des grandes causes, nous embrassons des carrières de salubrité publique, nous engageons des troupes, des combats fratricides, nous exaltons les hommes à s’entretuer, les ours à se montrer, les serpents venimeux à mordre, les chiens à faire les beaux, pour un sucre ou pour quelques rayons, caresses, ivresses, nous nous faisons boucher ou marionnettiste, avalons des couleuvres, recrachons des illusions ; nous devenons héroïques et solaires, assassins ou charismatiques, malgré notre écorce pigmentée de frissons proches de la miséricorde, nous aimons avoir faim et avoir soif, raison ou déraison, peu importe…, éthérisés, célestes contre vents et marées. Nous ne nous construisons réellement qu’en opposition patiente aux montagnes à gravir, aux ruisseaux à franchir, aux corps à enjamber… Supercherie ultime. Nous croyons que les mots nous survivent. Nous cherchons à parler… à passer le feu sacré dans les yeux des passants, à caresser d’étincelles des lèvres surprises, à survivre à l’air du temps… Narcisse est un curieux compère. Il faut s’aimer, mais rester humble. Gageure des temps modernes, soumis à l’écartèlement des sens, peut-on rester disponible, ouvert, peut-on sans risque d’imploser s’offrir aux quatre vents ?… La clef noire est au fond du puits des merveilles. La théorie du complot masque l’apocalypse. Réflexes reptiliens et rêves de cyborg. Médiocrité ambiante, rampante. Règne du végétatif et des déliquescences. Épouvantail des calendes à la place des saisons. Filouterie comme clef du succès. Force et faiblesse de l’animal humain, foire et faste macabre, tour de cirque ou tour de passe-passe, la folie, ce n’est pas de perdre raison, c’est de ne plus maîtriser ses visions. Le penchant de l’homme, c’est d’être, et puis c’est d’être autre. Les psychés sont de précieux accessoires de salles de bains ; car on ne construit pas sa vie sur de la littérature… L’humanité fascinée joue avec son mobile. Elle pense nouveau monde, mais sa gloire est plongée dans les antiquités. Boutique de marbre, de pierre ou de poussière. Plus de baliverne, le siècle est en marche vers le feu nucléaire qui se situe au-delà de l’humain. Tout se précipite. Rien ne restera. Assis ou debout. Le choc des dualités. Big-bang des émotions… tout doit disparaître !… Le soleil plissé, comme un cœur qui se serre. La lune serre le poing sur d’étranges lueurs. La Terre est indécise. Mise en observation, l’humanité fascinée joue avec son mobile. Quand nous levons la tête, nos pupilles reflètent l’hiver, vaste satellite de nos désillusions. Si nous étions honnêtes nous accepterions notre sort et nous nous remplirions la bouche de pierres, avec un tombereau supplémentaire à chaque génération, et en prime quelques salières, pour nous rappeler la candeur béate originelle de notre lourde condition. Mais nous sommes tout, sauf honnêtes et nous continuons d’avancer la morgue aux lèvres à avaler l’air que l’on nous offre avec délectation. Sous son charme bleu, le ciel est impur comme l’œil moite d’un crocodile… et nous, nous faisons semblant de parler aux étoiles avec l’orgueil terrible de raconter leurs secrets. Corruption, lente combustion indécente des parcours humains. Remise en question. Des fleurs fanées, reflet de nos propres flétrissures. Des éclairs de pensée, c’est la déroute. Des espoirs et des projets, c’est ce qui nous rend humains, nos gesticulations parlent pour nous, en écho de nos ombres, en jets prophétiques de nos lumières, nous nous rapprochons inexorablement du comptoir de la mort. Un pieu étroit. Un chemin ? Une limite. Choisir dans ce magma les pierres précieuses du verbe, avant de traverser le désert. Mon boucher avec son hachoir à viande est plus authentique dans sa mystique que le plus rigoriste des religieux, est plus efficace dans sa technique que le plus pointu des savants penchés sur la théorie du mouvement, est bien meilleur et plus talentueux, dans ses découpes et ses désossements, c’est un fameux poète… Farce du verbe sur nos corps las, tu ris sous cape. Nos vieilles lunes sont des grimaces lancées au galop. Nous grinçons des dents et nous montrons des canines effrayantes capables de dévorer l’avenir jusqu’à l’os glacé de nos conditions. Si les muses sont des sirènes, les mots sont des poissons visqueux. Nous croyons que ceux-ci résisteront, échapperont à notre décomposition. Nous les jetons devant nous, comme des tapis de pétales rouges, des passerelles étoilées, des fusées de détresses… Buée des trombes d’eau, cascade de tes reins sur l’amour-propre en trompe-l’œil. Tes sentences sont un bestiaire charmant. La poésie est un filet de chalut jeté dans les airs, remplis de postillons, d’aigles marins et de poissons volants. Oripeaux positivistes comme reliquat de nos humeurs malmenées par les siècles de labeur passé et à venir. Trahison des sens et des contre-sens, c’est tendance. Les pupilles éberluées, l’animal-méninge grimpe sur toutes les branches de ses ramifications. Il hurle à l’intérieur, résonne dans l’enfer vert, comme un cri de macaque… Malaise des dominos. Fuite en avant. La bougeotte, fringale mentale et fourmis dans les jambes. Nos doigts et nos fronts nous brûlent en permanence. La fièvre est notre température primitive, originelle. Les frissons et les extases fugaces sont nos seules récompenses. L’estime de soi, une escrime perpétuelle. Et lire à nouveau dans le livre d’or des jours présents la fluide mélodie d’un avenir radieux… Ce n’est pas pour demain, car pour l’instant la divine comédie est de mise, malgré les envies impérieuses d’en finir et indéfiniment de changer de temps. Les signes sont des rocs de bitume battus en brèche par les marées montantes des angoisses vespérales, goudron poisseux qui nous englue la cervelle jusqu’au groin, les joues et les oreilles remplies de décorum, figées dans la glaise mondaine de l’abattement. Nos conquêtes se font de redoutes en redoutes, de bastions en bastions, de bonds en bonds, au-dessus des buissons ardents, saut à la perche divine, démesurée… Au-dessus de nous et des moments de grâce tachés de cire sèche, des ailes d’oiseaux, des sourires mis à sac, des lèvres gercées par des myriades d’artifices. Il pleut dehors, du cirage à chaussures. C’est pour lustrer nos marches sans entrain sans craindre le monotone. Un métronome pervers programme nos danses dans des tempos maudits et nos sabbats sont des hymnes froids rendus à la routine. Nos terminaisons nerveuses baignent dans un bocal en fonte et nous feignons d’être béats en regardant l’immensité bleue du ciel… Dessous les cuirs des déraisons et la boîte crânienne, les sentiments en ébullition sont affranchis de toute mascarade. Bien huilé, le fusil de nos cœurs. La poudre noire à l’intérieur des yeux, les flammes nous habillent le regard de lueurs animales et d’ardeurs de nuit des temps… Éclaboussures de soi, encore et toujours, au-delà des apparences… Tout au fond du ravin, le sceau est fissuré. Le chemin encore loin afin d’entrevoir des feux profitables… Les forfaits des princes se manigancent toujours dans des bruits de pourceaux. Il y a juste davantage de princes, à poils, à plumes, en bois ou en turbans… Parjures des hautes tours, le parfum des égouts. Sur la langue de boue des civilisations, un vol de cygnes noirs embrase l’horizon de leur ultime chant. Secoué par des soubresauts bien plus profonds, l’homme se tourne et se retourne dans son sommeil et cherche l’envoûtement facile, ou dans l’idéal, l’Eldorado, faux-fuyant impérieux… Il creuse ses songes et il fouille la terre entière, il sonde, il déplace, il gratte et il laboure, il monte, démonte et remonte, bouscule et agite, cogne et entrechoque, malaxe et manipule, forme et déforme son univers, sa vie, construit et reconstruit inlassablement, en oubliant le sable accumulé sous les molaires, comme le bousier avec sa boule de terre, mystérieux parallèle, mystérieuse matière, l’homme se doit de retourner tout ce qu’il peut voir ou sentir présent autour de lui et tout ce qui n’a pas la chance de se trouver sans saveur à son goût. Quand il aura tout retourné sens dessus dessous, comme un enfant plongé dans l’ennui fouille sans but et finit par retourner son coffre à jouets, il s’apercevra atteignant le fond que c’est lui qu’il étreint, comme un pantin de bois disloqué, trouvé enfoui dans le double fond de la boîte de Pandore. Il ne faut pas badiner avec l’amour-propre. Il ne faut pas manigancer avec son égo, encore moins jouer avec, à la poupée, au chevalier servant… Nos mains sont moites de torrents refoulés et nos voix étranglées se perdent dans les milliards de grains de notre désert ambiant… Laissons pourtant le vieux monde s’écrouler de nouveau, dans les bégaiements bruyants des chaises musicales où s’entrechoque le jeu macabre des continents dessous le jeu de cartes des tectoniques humaines et écarlate de la géopolitique. Nos images d’Épinal, sur la mappemonde allumée de mille feux, sont des réverbères brisés aux lumières obsolètes. Sur ton visage, nous attendons que passe le froid.
Nous restons statiques mais morcelés dans le silence mat de nos solitudes trempées de sollicitations hasardeuses et d’affreuses compromissions, debout, pourtant, attentifs mais déroutés, perdus au cœur brûlant du foyer du monde. Le gel des contre-offensives ratées nous a laissés pour morts. Sous nos latitudes carnassières, la caresse des piranhas, c’est la seule tendresse qui puisse nous être offerte, sans risquer le mensonge ou pire, la contamination… Le beau est une escroquerie. L’art est une escroquerie. La poésie est une escroquerie. L’argent est une escroquerie. L’humanité aussi. Nous sommes quittes… La vie est un monstre qui ploie mais qui promène son poids d’horreurs et de mystères. La matière disgracieuse déploie ses sortilèges, ses ailes d’oasis, ses fards et paillettes, effluves bon marché et faux parfum du divin, ses fleurs délicieusement odorantes…


 
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   fanny   
16/6/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
"des grimaces lancées au galop", non mais je rêve où vous m'avez copié la semaine dernière, "des rocs de bitume battus en brèche" et en plus vous allez me copier la semaine prochaine, vous n'avez pas honte, ou alors vous me faîtes de l'œil, Ha l'amour, toujours l'amour, l'exaltation, la sublimation, que c'est beau.

Comment ? il y a de la supercherie dans l'air et je dois lire (et me concentrer) jusqu'au bout pour comprendre la nature de l'escroquerie, ha bah il faut que je réserve un gros créneau alors, et je joue quand avec mon mobil moi ? Non parce que quand je vous lis, Monsieur le clown, j'appelle pas ça jouer.

Bon, j'en passe et des meilleurs, je cautionne et recautionne l'écriture de ce développement désidéalement, apocalyptiquement, sombrement lucide mais subtilement encadré, au delà de leur signification dans le texte, par les mots amour et fleurs odorantes.

Je vais peut-être aller me recoucher tiens.

   jeanphi   
16/6/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,

Je n'étais pas encore très impliqué dans la vie du site lors de la parution des premiers fragments. Mais je me souviens qu'en 2010 j'étais déjà subjugué par la force peu commune de votre écriture unique.
Je connais par cœur les deux premiers de cette série delta pour les chanter au piano juste pour moi comme exercice. Il y a tout dans vos écrits. Dois-je dire que celui-ci me paraît un peu moi virevoltant malgré tout, c'est sans doute le thème plus sombre encore qu'à l'accoutumée qui donne cette impression.
J'espère que vos commentateurs habituels viendront donner une analyse en bonne et due forme de ce somptueux fragment.

   Catelena   
16/6/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
« Si nous étions honnêtes nous accepterions notre sort et nous nous remplirions la bouche de pierres, avec un tombereau supplémentaire à chaque génération, et en prime quelques salières, pour nous rappeler la candeur béate originelle de notre lourde condition »

Je pense que nous sommes honnêtes, mais nous ne le savons pas toujours. Et surtout, nous le sommes parce que forcés et obligés de l'être. Car autrement, qui accepterait de se remplir la bouche de pierres de son plein gré ? À part les masos, je veux dire...

Bref, ceci c'est pour l'entrée en matière, car la suite de ce bloc indigeste à première vue – appelons les choses par leur nom – elle baigne, il faut bien en convenir, dans une vision affreuse de la vie. Sous-tendue toutefois par une espérance folle que le narrateur cherche à démolir à tous prix, à contre-coups d'exemples horribles, comme pour laisser une dernière chance à la beauté de prendre le pas sur « le monstre qui ploie mais qui promène son poids d'horreurs et de mystères. ».

Je pense aussi que derrière tout cet étalage des horreurs qui font le monde, se cache une énorme désillusion dix fois multipliée, ainsi qu'un espoir fou qui ne demanderait qu'à sortir de sa gangue pour croître en balayant d'un revers de main tout le noir de la condition humaine.

En tous les cas, je dois te remercier pour ce nouveau fragment, Lari. Il exprime, mieux que je ne saurais le faire, toutes les angoisses régurgitées par ces dernières années noires, avec leurs tombereaux de nouvelles catastrophiques. Rien ne va plus entre les hommes sur la planète, et pourtant il faut résister pour y croire encore ...


Cat d'avant Elena ^^

   Eskisse   
16/6/2023
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très aboutie
et
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Salut Lari,

Contre ce monde, régi par le mensonge, le faux, l'artifice( fards et paillettes"), la farce, les grimaces, le trompe-l'oeil, l'illusion, il semble qu'il n'ait plus rien à faire. Même la poésie semble vaine.
La définition que tu en donnes le suggère :
" La poésie est un filet de chalut jeté dans les airs, remplis de postillons, d’aigles marins et de poissons volants."
"Si les muses sont des sirènes, les mots sont des poissons visqueux"

Ce fragment pourrait illustrer la phrase de Céline: "Le mensonge, ce rêve pris sur le fait, et seul amour des hommes".

Si ce n'est que moi aussi je soupçonne l'auteur de chercher un espoir dans la beauté.

Entre autres belles phrases entérinant cette vision noire de l'existence : " Au-dessus de nous et des moments de grâce tachés de cire sèche, des ailes d’oiseaux, des sourires mis à sac, des lèvres gercées par des myriades d’artifices."

   David   
16/6/2023
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Bonsoir Larivière,

Cascade, torrent, je l'ai lu à toute vitesse, enfin, entrainé et sans cesse angoissé de perdre le fil, le retour à la ligne, les yeux et l'attention comme ces enfants derrière le joueur de flûte de Hamelin, à la fin du conte... Prophétique pour décrire le ton, ça serait un peu à côté de mon ressenti, mais il y a quelque chose de cette colère que j'imagine proche de celle des prophètes de l'apocalypse de l'an mille. La colère, cette émotion là - pas brute mais pas plus que cela spirituelle non plus - c'est le cœur, le nœud de ce qui se passait pour moi en lisant.

Le texte est fait d'évocation lugubres, funestes, et pourtant les premiers et les derniers mots feraient de jolis vers d'un poème romantique, comme pour faire au moins bol à ce que pourrait contenir la boite de Pandore, j'ai envie d'écrire, pour dire qu'il y a quelque chose de plus que de la noirceur.

Le poème transmet une énergie, et c'est poésie, c'est essentiel.

   Pouet   
16/6/2023
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aboutie
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aime beaucoup
Slt,

le fond me cause pas mal.

Je trouve que : "Il ne faut pas badiner avec l'amour-propre" résume beaucoup de ce que j'ai pu lire dans ce texte.

En effet, "la poésie est une escroquerie".

Quant à "l'humain"... je passe mon tour.

Je passe mon tour et n'ai pas trop envie de disserter sur ce poème en prose (plus que "Laboniris" pour moi) riche qui, je crois, se suffit à lui-même.

Enfin, ça fait plaisir de te relire un peu par ici.

   Vincente   
17/6/2023
trouve l'écriture
aboutie
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aime un peu
La cohérence du texte se trouve dans son dévers, un déversement d'assertions désenchantées qui mène à une conclusion qui tient lieu de projet de vie… littéraire.

En cela, je vois bien quelque chose s'ébrouer à la manière d'une éruption volcanique, mais je ressens plus une puissance dans la volonté (le besoin, l'intention !) que dans la pertinence de son expression diluvienne.
En quelque sorte, c'est le flux qui, très apparent, nous parvient et interroge. Ce qui me gêne, c'est une posture de départ qui est résumée dans ce passage final :

"Le beau est une escroquerie. L’art est une escroquerie. La poésie est une escroquerie. L’argent est une escroquerie. L’humanité aussi. Nous sommes quittes… La vie est un monstre" … "La matière disgracieuse déploie ses sortilèges, ses ailes d’oasis, ses fards et paillettes, effluves bon marché et faux parfum du divin, ses fleurs délicieusement odorantes…".

Ce qui me gêne donc c'est l'assertion en elle-même autant que l'ordonnancement qui est décidé ici, la relation de cause à effet, la logique de qui fait quoi et qui est responsable de quoi.

Que l'Homme soit celui qui le tuera, c'est fort probable, reconnaissons une certaine prémonition à cette notion. Mais ce texte, pour avaliser ses principes, y va de raccourcis sémantiques qui font certes du remue-ménage, mais, si je puis dire, dans un remue-méninges un peu facile, quand ce n'est pas même spécieux.
Par exemple, dès les premiers mots, même elliptiquement une phrase me bloque, elle dit :

"Nous avons inventé l'amour, pour remédier à des problèmes de peau et à des poussées d'hormones, etc…" sacré raccourci mais n'a pas de justesse particulière, ni scientifique, ni psychologique, ni allégorique ; alors à quoi bon s'en remettre à elle ? Ce n'est pas plutôt l'amour qui est venu aider l'homme à vivre ??
La suivante : "Car un soldat pourra se faire tuer sans trop de difficulté pour un peu d'argent.". Assertion bien courte, non ? Quant à "l'exalté" oui ça se tient, mais à un tel point que ça tient même de l'évidence, voire de la définition même de l'exaltation.

Partir du principe que l'homme individuel est le même que l'Homme civilisationnel, universel. Partir du tout, raccourci en un aggloméra d'individus clonés, avoue un manque de nuance qui pénalise fortement la démonstration.
Ce qui se passe au niveau des singularités individuelles n'est pas condensable comme une adition de termes du même registre, du même ordre, qui produisent le tout. Dans ce texte, les personnes sont présentées en tant qu'éléments homogènes, machinaux, rouages d'un système devenu fou. Si cela rend malade, du narrateur au plus délétère des commandeurs, quid des belles pensées, des jeunes constructeurs, réparateurs, extrapolateurs, salvateurs.
Je crains que le prêche ici pèche par ce qu'il reproche à l'Homme, un manque de discernement, un manque d'attention à ce qui n'entre pas dans son champ de vision.

Ce qui ne l'empêche d'avoir eu d'heureuses "visions" dans certains passages, pour citer mes préférés :

"le soleil plissé, comme un cœur qui se sert" !

"Buées des trombes d'eau, cascade de tes reins sur l'amour-propre en trompe-l'œil"

   Donaldo75   
22/6/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Du vrai Laboniris avec une forme déclinée comme un fleuve d’écriture, voilà ce que j’ai lu et qui rend ce fragment delta numéro 5 si prenant. Le fond est riche, dense, comme la forme qui le supporte. Mon impression de lecture s’enrichit chaque fois que je me replonge dans ce texte massif mais pas obèse, dense mais pas bavard, poétique et philosophique à la fois. Et moi qui ne suis pas orienté cerveau gauche ou découpe de cheveux en mille-vingt quatre je suis content de constater la puissance de la réflexion installée sur la page et déclinée dans ce mur littéraire.

Bravo !

   Atoutva   
9/8/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Lu d'une traite cette cascade de vérités qui se résume en un "la vie est un monstre".
Une poésie? Un morceau de philosophie qui donne à réfléchir.

   Dian   
23/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
Bonjour Lariviere,

L'amour, le beau et l'art existent bel et bien si vous l'avez décidé. Mais si vous avez décidé l'inverse, ils n'existent pas. Le réel est une construction de la conscience.
Magnifique prose expressionniste.


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