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Poésie libre
Nector93 : Saint-Denis
 Publié le 01/04/22  -  6 commentaires  -  3317 caractères  -  56 lectures    Autres textes du même auteur

Quelques souvenirs et impressions ramassés au gré des déambulations…


Saint-Denis



Saint-Denis c’est un port
Ouvert aux quatre vents
On y vient, on y sort
Sans papier, semelles au vent

Saint-Denis c’est l’allégresse
Des gamins trop bruyants dans leur chahut
Les yeux pleins de tendresse
Au souvenir d’un paradis perdu

Saint-Denis c’est une douleur
Qui s’amoncelle le long des trottoirs
Dans une nuit froide comme un rasoir
Pour des hommes qui dorment au creux de leur malheur

Saint-Denis c’est une fête
Illuminée par les splendeurs d’antan
L’âme en goguette, le verbe chantant
On oublie nos soirs de défaites

Saint-Denis c’est un éternel refuge
S’y pressent rois de France, âmes déchues
Cathédrale de pierre qui émerge
Par-delà nos souvenirs trop tôt disparus

Saint-Denis c’est un cri
Au coin de la rue, un jour tout gris
L’un dans sa course est rapide
L’autre triste regarde sa poche vide

Saint-Denis c’est un village
Au cœur de la grande ville
Toujours des visages familiers dans le paysage
Pour distraire nos pensées solitaires et intranquilles

Saint-Denis est rouge
De sa mémoire ouvrière
Blanche par l’histoire de son monastère
Et hésitante sur la couleur de la prochaine page

Saint-Denis c’est une explosion
Un matin d’automne, immeuble dévasté
Terroristes tués, habitants délogés
L’amalgame tisse sa toile à la télévision

Saint-Denis c’est le bruit de moteur
D’une adolescence qui cherche à exister
Dans un coup d’accélérateur
À la fois rebelle et désespéré

Saint-Denis c’est une femme pleine d’énergie
Frondeuse et encline à toute révolution
Du pavé elle tire sa poésie
Pour l’offrir à chaque génération

Saint-Denis c’est un troquet
Au bout d’une rue délabrée
Deux chabanis jouent aux cartes
Le nouvel arrivant hésite, mais pour l’instant s’écarte

Saint-Denis c’est une colère
Où l’argent si difficilement gagné
Se compte pièce par pièce devant le supermarché
Au son d’une révolte sourde dans les ruelles

Saint-Denis c’est une prière
Adressée aux lendemains incertains
D’une époque bien trop matérielle
Et rythmée par le seul appât du gain

Saint-Denis c’est un air
De hip-hop balancé au pied du métro
Par des jeunes rappeurs vénères
De voir leur avenir s’assombrir si tôt

Saint-Denis c’est une interminable file
D’attente de la poste aux impôts
Les gens endurent, immobiles
Chaque jour un immuable rodéo

Saint-Denis c’est un musicien,
Un peintre, un écrivain
Célèbre ou inconnu, peu importe le destin
L’artiste sera toujours dionysien

Saint-Denis c’est un deal
Au cœur de la cité, sachet
Contre billet, la ville
Offre à ses enfants de quoi subsister

Saint-Denis c’est un marché
Aux saveurs de l’Orient, aux accents de l’Afrique
L’âme vagabonde se fait alors nostalgique
D’un passé qui ne veut pas s’oublier

Saint-Denis c’est Marseille sans la mer
Villes métissées, villes populaires
Stigmatisées, on ne se laissera pas faire
Rebelles, on portera toujours haut nos bannières


 
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   Corto   
18/3/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai bien aimé cette ode à Saint Denis. On y trouve une véritable ambiance, description fine et bien balancée.
C'est vivant même avec les morts "S’y pressent rois de France", mais c'est le quotidien d'aujourd'hui qui domine.
La composition en quatrains qui chacun leur tour portent un thème imagé est bien réussie.
Peu de vécu passe inaperçu: depuis
"l’allégresse
Des gamins trop bruyants dans leur chahut"
à "Au cœur de la cité, sachet
Contre billet".

J'aime aussi beaucoup la structure qui s'ouvre par "St Denis c’est un port ouvert aux quatre vents" pour finir par "St Denis c’est Marseille sans la mer Villes métissées, villes populaires Stigmatisées, on ne se laissera pas faire".

Une pensée riche mise dans une forme très travaillée et vivante.

Bravo.

   Robot   
1/4/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Construction monotone qui accentue l'impression d'être interminable quand s'y ajoute l'anaphore lassante. Pour un libre, il me semble possible d'améliorer l'édifice de la prose. Des bonnes choses sincèrement dites noyées dans une architecture un peu insipide.
EDIT: Je relève mon appréciation.

   Anonyme   
1/4/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Nector93

Vous avez écrit un hommage à votre ville entre passé et présent. Elle est longue mais jamais lassante, toutes les facettes d'une grande cité de banlieue sont dépeintes, de la plus glorieuse à la plus sordide, de la Basilique au sachet de schnouffe.

En clair, un poème assez dense, touffu, intéressant, une vraie réussite quoi.

Anna

   Lariviere   
1/4/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Nector93,

Sur le fond j'ai beaucoup aimé cette ode à Saint Denis que vous décrivez très bien dans sa diversité historique et culturelle...

Sur la forme j'ai aimé aussi vos quatrains s'ouvrant sur "saint denis c'est"... j'ai juste trouvé un peu long le procédé... Peut être qu'amputer quelques strophes vers la fin ne serait pas inutile pour garder un meilleur impact au poème...

Cette strophe de fin résume bien l'ensemble :

"Saint-Denis c’est Marseille sans la mer
Villes métissées, villes populaires
Stigmatisées, on ne se laissera pas faire
Rebelles, on portera toujours haut nos bannières"


Ne lachez rien !... ;)

Merci pour cette lecture et bonne continuation !

   papipoete   
1/4/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
bonjour Nector
Ce n'est plus un poème, mais une ode à votre ville chérie ! Il faut dire que Saint Denis évoque tant d'images, entre sa cathédrale aux sarcophages profanés, mais que le monde entier se presse à venir admirer !
C'est la ville où ça castagne sur fond de chitt
C'est l'endroit où être muté dans un lycée, signifie galères de galères
Mais Saint Denis, c'est Marseille sans la mer où n'existent aucune frontière...
NB j'écrivais ainsi avant, et l'on m'apprit qu'il fallait condenser, sabrer et sabrer ! mais vous avez tant à dire sur votre citée!
Je ne voudrais pas dire que je fis un effort pour vous lire, mais généralement j'avoue passer mon chemin sous un tel flot de mots.
Difficile ce citer un passage particulier, mais l'ensemble est teinté de paix, de joie et grand humanité.
Bravo en tous cas pour la performance !
Il ne devait plus rester d'encre dans votre imprimante ?

   Cyrill   
2/4/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
J’ai trouvé dans ce poème des mots simples et qui fonctionnent bien pour faire le tableau d’un quartier populaire.
L’ambiance est brossée par petites touches avec une palette riche en couleurs, odeurs, sons.

J’ai beaucoup aimé le côté non systématique dans l’agencement des rimes, ça fait écho à ce certain désordre, du moins cette profusion de différences qui font le charme et de l’endroit et de votre poésie.

J’ai regretté quelques moments que je trouve ordinaires dans l’expression, voire maladroits, mais c’est mon goût, comme ce mot « intranquille », bof bof.

L’antépénultième quatrain m’a particulièrement plu par son découpage en rejets.
Merci pour cette immersion !


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