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Poésie libre
papipoete : Pharaonique chantier
 Publié le 29/01/18  -  15 commentaires  -  1589 caractères  -  249 lectures    Autres textes du même auteur

J’ai cherché un sujet évoquant "l’ardeur" (thème du Printemps des Poètes 2018) et choisi ce travailleur infatigable sur quatre pattes…


Pharaonique chantier



Sur les rives du Nil
une mine d’or :
des monceaux de bouses de bétail
des myriades de scarabées au travail.

Bousier est à pied d’œuvre.

Claquent les mandibules
sur le tas de crottes ;
à chacun sa petite motte
façon dé à jouer,
finition bille à rouler.
Ces rivaux qui grignotent
importunent Barbot*.

Bousier craint la promiscuité !

En marche arrière
tête en bas
toujours tout droit
il pousse, oh hisse !

Bousier ne perd pas la boussole !

Bille, boulette, boule
colle, s’empâtent
en mappemonde odorante !
Pilulier rapetisse*
face à l’obèse !

Bousier est téméraire !

La rampe d’un temple :
garder le cap, franchir l’écueil !
La pelote dégringole ;
remonter la pente !
on recommence !

Bousier ne se démonte pas !

Un profiteur en embuscade :
ça cogne, ça lutte,
le héros gagne amoché, épuisé.
Déjà la nuit !

Bousier, faut pas lui chercher des noises !

Jusqu’au terrier suivre la voie lactée.
L’entrée, ça coince !
Ébarber la pitance,
pousser les rognures en lieu sûr !
Et s’enfermer.

Bousier a vaincu la guigne !

Enfin tranquille,
savourer le festin cher acquis !
Puis, digérer.
Et retourner
au champ des vaches !

Bousier, te suivre depuis le fleuve sacré m’a épuisé…



* barbot : autre nom du bousier
* pilulier : autre nom du bousier


 
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   Mokhtar   
10/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Cette amusette poétique croque comme dans une séquence de Microcosmos le monde industrieux des sisyphes coprophages.

Le rythme est alerte, et les scénettes se succèdent, conclues par un vers qualifiant qui structure le texte. La confrérie se démène, avec des cadences et des gags de dessin animé.

Si l’on ne cherche pas dans ce texte plus qu’il ne prétend, on admettra avoir souri à cette sympathique fantaisie humoristique. Qui a la légèreté d’un poème de Paul Fort.

Mokhtar en EL

   Anonyme   
18/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour.
Quelle surprise ce poème. Un bousier! Sur les bords du Nil. A l'époque des pharaons (si on veut).
Pourquoi pas. Le bousier n'est pas mon animal préféré.
Mais c'est un animal mythique de l'ancienne Egypte! Grandeur et décadence!

petit poème bien fait, plein d'humour et de crottes qu'on pelote. original. On rit bien. Que demander de plus?

   Anonyme   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien ↑
indépendamment de la symbolique de ce bousier, il nous est décrit ici comme un travailleur acharné et téméraire, prêt à se battre pour défendre son bien.
" Bousier, faut pas lui chercher des noises ! " sûr ! Faut pas le mettre en boule...

Un récit original et amusant.

   hersen   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,

J'aime ce texte très "Sciences et vie de la terre" car, outre le sujet, un animal étonnant qui ne ménage pas sa peine, il y a vraiment un rythme très réussi qui épouse les efforts de ce "Sisyphe coprophage" (bravo Mokhtar !). Pour un peu, on serait fatigué rien que de le "regarder" travailler.

Ce poème sent bon (!) les rives du Nil, et des fleuves en général, plein de petites vies qui font leur boulot. Un sacré boulot ! comme dirait le pharaon...

merci de cette lecture

   Anonyme   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Papipoète,

C'est frais et enlevé tout plein !
Une goulée d'air de la campagne qui me ramène à l'enfance, avec ces petites bêtes opiniâtres et courageuses qui me fascinaient tant.

C'est bien la première fois que je les vois en action sur un tel chantier, et je trouve que le libre où joue le poème donne de ces bousiers, de bien sympathiques images.

Au passage, j'ai appris deux synonymes.

Merci pour tout.


Cat

   Arielle   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien
Sympa cette odyssée d'un travailleur infatigable. La vie d'un scarabée du Nil est loin d'être un long fleuve tranquille !
Bravo à notre entomologiste amateur qui nous a bien divertis mais qui aurait pu nous parler de l'oeuf pondu dans ce gros caca par notre petit bousier plus dévoué à la perpétuation de son espèce qu'à son appétit personnel (Wiki est mon ami) ;-)

   sourdes   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonsoir papipoete,

merci pour ce chantier phara-onirique, c'était trop tentant à vous commenter. Vous nous donner bien l'impression du travail de ce coléoptère écoboueur de nos prairies promis à un grand avenir sous les rois de l'Egypte ancienne. Le rythme est vif, saccadé, avec haut et bas, envers et endroit tourneboulés. Mais jamais les bousiers n'ont éliminé toutes les bouses, jamais le soleil n'a interrompu la succession des jours et des nuits, jamais le scarabée sacré ne s'épuise. Mais notre auteur lui est épuisé au bord du Nil à le suivre dans son travail incessant. Patience papipoete, le proverbe paysan nous dit: "c'est à la fin de la foire que l'on compte les bouses" et la fin de la foire, selon les calculs les plus savants, est dans quatre milliards d'années. Alors merci en attendant de nous avoir régalé avec ce voyage dans les mondes du scarabée.

Sourdès

   Anonyme   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Sympathique écrit, amusant et distrayant.

Un bon moment de lecture, bien imaginé, du coup facilement ce "Pharaonique chantier" s'installe, et les images s'imposent sans désagrément. J'ai pu ainsi faire connaissance de ce "Bousier".
Cependant je n'en ferai pas mon animal favori.

La nature recèle de travailleurs et de travailleuses infatigables, qui sans relâche, poursuivent leur tâche répétitive, votre écrit m'a fait penser aux fourmis, qui ne cessent d'être actives le jour comme la nuit.

J'ai trouvé votre écrit très fluide et plaisant.

   leni   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup
c'est amusant il faut en avoir vu un à l’œuvre pour se dire que tous les métiers existent Parfois c'est truculent et j'ai bien ri

En marche arrière
tête en bas
toujours tout droit
il pousse, oh hisse !

VIVE l'humour BRAVO papipoète
Salut amical LENI

   Louison   
29/1/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Un bon moment de lecture avec ces travailleurs infatigables. Pour les avoir observés quelquefois, je reconnais bien là la description précise de leur témérité.

C'est drôle, enlevé, j'aime beaucoup:

L’entrée, ça coince !
Ébarber la pitance,
pousser les rognures en lieu sûr !
Et s’enfermer.

J'ai bien la vision de ces bestioles qui roulent, poussent, déplacent leur bille de crotte.

   jfmoods   
30/1/2018
Ce poème de forme libre s'inscrit dans le cadre grandiose de l'Égypte ("Pharaonique chantier", "les rives du Nil", "un temple", "le fleuve sacré").

Les deux-points qui assurent la jonction entre les vers 2 et 3 ne manquent pas d'égarer le lecteur ("une mine d’or : / des monceaux de bouses de bétail"), faisant glisser l'évocation de la dimension archéologique attendue vers le prodigieux spectacle de la nature.

On a la curieuse impression de se trouver sur la ligne de départ d'une compétition olympique ("sur le tas de crottes ; / à chacun sa petite motte / façon dé à jouer, / finition bille à rouler"). De fait, cette ligne de départ augure la lointaine ligne d'arrivée ("Jusqu'au terrier suivre", "Et s’enfermer").

L'aventure journalière de l'insecte, dont le poète ne manque pas de commenter, en un leitmotiv, les étapes (anaphore : "Bousier" x 8), est assortie d'une vigoureuse tonalité épique (mise en relief par inversion du sujet : "Claquent les mandibules", importance du nombre : "des myriades de scarabées", gradation : "il pousse, oh hisse !", "ça cogne, ça lutte", amoché, épuisé", gradation hyperbolique : "Bille, boulette, boule colle, s’empâtent en mappemonde odorante", aggravation progressive du rapport de forces : "Pilulier rapetisse* face à l’obèse", lexique : "rivaux", "téméraire", "La rampe", "franchir l’écueil", "en embuscade", "le héros gagne", "a vaincu", jeu antithétique des actions : "La pelote dégringole" / "remonter la pente", expressions familières : "ne se démonte pas", "faut pas lui chercher des noises !").

La vie du bousier s'articule en un triptyque immuable ("savourer", "digérer", "retourner").

Ce petit être infatigable ("toujours tout droit", "garder le cap", "on recommence !", marqueur temporel : "Déjà la nuit !", remarque finale comique : "te suivre... m'a épuisé"), à la progression si peu académique ("En marche arrière tête en bas"), ne peut susciter qu'une admiration sans bornes.

Un petit cadeau à Papipoète... et à tous ceux qui passeront par là. Une merveille à voir et à revoir : "Microcosmos, le Peuple de l'herbe" (1996). Film saisissant d'une heure quinze. Orchestration magistrale. Chorégraphie époustouflante. La scène avec le bousier se trouve entre 32:05 et 35:00.

-> https://m.youtube.com/watch?v=TSTuV1uZCR8

Merci pour ce partage !

   Vincendix   
30/1/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Papipoete,
Glorifier le bousier, il fallait oser !
Les insectes sont infatigables, rampants ou volants, ils sont toujours actifs et capables de réaliser des prodiges. J’admire les abeilles qui fabriquent des alvéoles d’une grande précision géométrique, je suis moins admiratif du travail des bousiers mais vous avez raison, ils méritent aussi notre considération.
Je me demande ce que sont devenus les bousiers de mon village, il n’y a plus un seul bovin, peut-être ont-ils migré vers les rives du Nil ou du Congo, à l’inverse des humains.
J’apprécie l’originalité du sujet et son traitement.
Vincent

   Pouet   
30/1/2018
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bjr,

Oui, un poème sur le bousier est une riche idée.

Je ne sais combien il pouvait y avoir de ces bestioles sur les rives du Nil du temps des pharaons mais sachant qu'une myriade se compose déjà de 10 000 individus, le spectacle devait être étonnant.

J'ai beaucoup apprécié le vers " finition bille à rouler."

Peut-être que le poème pourrait être un poil élagué par endroits pour que notre bousier y gagne en percussion.

Cordialement.

   emilia   
30/1/2018
Merci pour cette sympathique animation qui ne manque pas de jouer avec les mots (crottes et motte…) ainsi qu’une profusion de synonymes gradués jusqu’à « la mappemonde odorante », associant le visuel au mouvement et à l’odeur, pour nous présenter avec facétie l’aventure du « héros », cet animal sacré dont l’emblème fut très représenté en Egypte de l’Antiquité, ce coléoptère nécrophore et persévérant dont la construction du nid réceptacle de sa progéniture sert de réserve alimentaire en offrant ainsi un bel exemple écologique pour notre monde moderne…, une aura qui perdure grâce à vous à travers les siècles… !

   jlouisgillis   
5/2/2018
 a aimé ce texte 
Passionnément
superbe et truculent à l'envie ! Bien que sourcilleux sur l'exactitude scientifique concernant le but de l'œuvre scatologique du bousier pour se reproduire, tout cet écrit est plein de vie et décrit sans cri l'éternel cycle de la vie...J'y souscris !
Merci...
Bonne continuation et toujours au plaisir de vous lire...


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