Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Poésie contemporaine
pieralun : Le pianiste
 Publié le 07/03/23  -  15 commentaires  -  1266 caractères  -  349 lectures    Autres textes du même auteur

Nocturne en ut dièse mineur n° 20 de Frédéric Chopin, dans le film Le pianiste.


Le pianiste



Dans le silence épais d’une ville sans vie,
Sous un ciel où la lune assume sa pâleur,
Dans un bloc que mordait l’hiver de Varsovie,
L’homme restait blotti dans les bras de la peur.

Quand l’Allemand gravit lentement chaque marche,
Le port raide, le cuir des bottes et le froid,
Le danger, tout pesait autour de sa démarche ;
Le Juif se tenait là, près du piano droit ;

Si maigre que ses yeux lui mangeaient le visage,
Que sa peau par endroits laissait voir des rayons,
Que son squelette entier dans l’habit hors d’usage
Pouvait être celui d’un fantôme en haillons.

Désignant l’instrument recouvert de poussière,
D’un geste l’ennemi le pria de s’asseoir.
Les doigts blêmes, transis, posés sur la matière,
Semblaient ne pas oser désengourdir le soir.

Mais, comme des brandons qui dans la nuit s’élèvent,
Les notes de Chopin soufflent tant de beauté,
Que bien des préjugés de grande douceur rêvent :
L’officier sortit ; l’opus l’avait hanté.

Dans le froid de l’hiver il regardait la cendre,
La brume qui semblait draper les pavés nus,
Et les trottoirs glacés où l’on voyait s’étendre
Le suaire blafard de milliers d’inconnus.


 
Inscrivez-vous pour commenter cette poésie sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   cherbiacuespe   
22/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Poéter sur "le pianiste" de Roman Polanski", ça sent le découpage en tranche... Et c'est diablement risqué...

Je me souviens de ce terrible film et de cette rencontre improbable entre deux destins opposés. J'étais hypnotisé devant une telle ineptie et la beauté des images et de ce qu'elle disaient de l'être humain. La puissance des acteurs dans leur jeu...

Oui, cette poésie rend parfaitement tout ce ressenti, dès le premier quatrain. Je me suis retrouvé plongé dans ce gris obsédant, insalubre. Dans cette fuite éperdue pour survivre, la faim, la peur et l'espoir/désespoir. Et ce piano, cette musique irréelle dans une ville en ruine, cette confrontation contradictoire.

Un poème qui chavire le cœur...

Cherbi Acuéspè
En EL

   Jemabi   
22/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Le sujet est casse-gueule, et c'est aussi casse-gueule que de tenter de poétiser la scène emblématique d'un tel film, chef-d'œuvre de son auteur qui en a quelques-uns à son actif. Seule la forme classique pouvait permettre de rester digne, à condition bien sûr de la maîtriser, et le moins que l'on puisse dire c'est que vous vous en tirez avec les honneurs. Un même amour de la musique réunit ces deux hommes que pourtant tout oppose. Comment un peuple aussi éduqué et sensible que les allemands de cette époque a-t-il pu se conduire comme le pire des bourreaux ? Une question à laquelle nous n'aurons hélas jamais de réponse.

   Miguel   
25/2/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
On est, je pense, dans le ghetto de Varsovie pendant l'occupation de la Pologne ; il aurait fallu une majuscule à "allemand", qui est ici un nom. Dans ce contexte si sombre, on assiste à un petit miracle de l'art. Le monstre allemand est humanisé par le génie de Chopin. Mais alors le verbe "hanter" ne convient pas, surtout à un temps composé : ce qui vous hante est ce qui s'est passé, non ce qui se passe ; la musique ne peut pas hanter l'officier en même temps qu'il l'entend. Le vers 16 est un peu étrange et peu mélodieux. Le mot "opus" relève davantage de la classification que de l'art lui-même. Seuls petit bémols, si j'ose dire, à ce poème poignant.

   Ornicar   
26/2/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Poème inspiré du film de Roman Polanski, à moins qu'il ne s'agisse du roman qui a inspiré le cinéaste.
Au regard de la catégorie, je ne vois rien qui dénote. Les rimes me semblent toutes parfaitement justes, je ne vois point de "e" non élidés à la césure, pas de hiatus non plus. Pour les éventuelles diérèses et synérèses, je passe la main. L'ensemble est réussi et pourtant je reste sur le seuil, demeure à l'extérieur.

Comment dire ? Je trouve ce récit un peu trop esthétisant, alors que règnent tout autour l'enfer et la barbarie. Sur le plan narratif, il y a comme un hiatus. Que vient faire dans un tel contexte le vers 2 ("Sous un ciel où la lune assume sa pâleur") ? On est dans le ghetto de Varsovie avant sa liquidation, pas dans "Nuit du Walpurgis classique".
Toujours au regard du contexte, certains termes me paraissent inadéquats, affaiblissant par voie de conséquence la portée de certains de vos vers. Ainsi, par exemple :
- vers 4 : "L’homme restait blotti dans les bras de la peur." - "Blotti" , vraiment ? "Tapi, oui ou "transi". "Blotti", pour moi et beaucoup d'autres je pense, évoque l'idée d'un nid douillet. Nous en sommes très loin.
- même chose au dernier vers : "Le suaire blafard de milliers d’inconnus." - Le suaire ou un linceul, peu importe, me paraissent ici tout autant étranges et anachroniques.

A coté de cela, il y a de fort beaux vers de mon point de vue. Ainsi :
- vers 3 : "Dans un bloc que mordait l’hiver de Varsovie"
- vers 8 : "Le juif se tenait là, près du piano droit"
- vers 20 : "L’officier sortit; l’opus l’avait hanté"
Je remarque que dans ces trois exemples, votre écriture se fait plus sèche, plus économe, rend mieux compte de la tension du moment et gagne en puissance évocatrice.

Ma strophe préférée est sans aucun doute la troisième, totalement hantée par la mort et son imminence. Un monde en sursis, peuplé de morts-vivants : "squelette", "fantôme".

Le plus gros reproche que je fais à ce poème est un bête problème de temporalité. Toute l'action se déroule au passé. Que vient faire alors l'irruption du présent au vers 2 ("Sous un ciel où la lune assume sa pâleur") ainsi qu'aux vers 18 et 19 ("Les notes de Chopin soufflent tant de beauté, / Que bien des préjugés de grande douceur rêvent:") ? Il était facile de continuer à l'imparfait, sauf pour le vers 19 à cause de la nécessité de la rime. Dommage...

   papipoete   
28/2/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
classique
Pour moi qui aime le cinéma épique, ce film atteint des sommets, que je jugeai guère dépassables !
Voyant ce jour un poème décrivant la fameuse scène, où ce pauvre juif rescapé émeut cet officier nazi, je ne peux que me pencher sur les vers qu'il vous inspira.
La sensation de terreur, quand l'allemand gravit cet escalier, le pianiste va-t-il mourir là, lui qui échappa au pire ?
Et non, cette Nocturne de Chopin sera son sésame pour survivre, et cet officier nous touchera en plein coeur.
NB chaque scène est ici décrite fort poétiquement, sans emphase ;
quand l'homme a froid, on a froid
quand il a peur, on est terrorisé
quand il joue du piano, on voudrait qu'il joue encore et encore...
J'ai tout aimé de votre récit, hormis dans l'avant-dernière strophe " des préjugés... rêvent "
mais c'est une paille...
des alexandrins au classique parfait !
je voulais écrire sur ce film ; vous l'avez fait, comme jamais je ne l'aurais pu !
papipoète

   Provencao   
7/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour pieralun,

Bravo....pour ce poème sur ce film si poignant, si émouvant et malheureusement si vrai. Très touchée par cette période ô combien éprouvante "dans le silence épais d"une ville sans vie".

Vous avez fort bien dans ce poème dessiné le sens désignant l'effet des formes concrètes sur les émotions, sentiments et tout ce qui en elles est en rapport avec ces vers:"Si maigre que ses yeux lui mangeaient le visage,
Que sa peau par endroits laissait voir des rayons,
Que son squelette entier dans l’habit hors d’usage
Pouvait être celui d’un fantôme en haillons."

Merci pour ce délicat.
Au plaisir de vous lire
Cordialement

   Myndie   
7/3/2023
Bonjour Pieralun,

le film était merveilleux, aussi dur que poignant. Votre poème l'est tout autant, sinon plus, focalisé sur une seule scène, sans doute la plus bouleversante, la plus riche en émotion, qui démontre si besoin en était que Chopin, que la musique, que l'Art tout simplement dépasse toutes les barbaries et peut sauver les âmes.
Je suis soufflée par votre écriture, à la fois très cinématographique (chaque strophe a le regard d'une caméra qui se pose sur les décors, sur l'artiste décharné, et décrit l'action avec une lenteur qui en fait tout la puissance), mais aussi élégante et affûtée ; je suis soufflée par le rythme fluide, la richesse des images et la force de l'émotion qui rend votre texte terriblement efficace.
J'ai craqué moi aussi pour ces très beaux vers :
"Si maigre que ses yeux lui mangeaient le visage,
Que sa peau par endroits laissait voir des rayons,
Que son squelette entier dans l’habit hors d’usage
Pouvait être celui d’un fantôme en haillons. »

Tout simplement magnifique. Merci pour ce moment de lecture.

PS : Je voudrais simplement ajouter que cette période de l'histoire me touche et me fascine parce que, à l'instar de Jemabi, je n'ai toujours pas trouvé la réponse à cette question « Comment un peuple aussi éduqué et sensible que les allemands de cette époque a-t-il pu se conduire comme le pire des bourreaux ? »

   Catelena   
7/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
C'est magique ! En lisant vos vers, séquence après séquence le film ressort de ma mémoire l'émotion intacte... Au point de s'emmêler entre les images et vos mots.

Bravo ! Le rendu est superbe.

Mais je suppose que de l'avoir vu sur écran rajoute un surplus à la musique de votre poème. Car, forcément, ce poignant Polanski marque intensément.

Une intensité dramatique que vous rendez à la perfection. J'ai même entendu Chopin au piano sauver le pauvre bougre de la faim et du froid.

Ah, le pouvoir de la musique ! Dommage qu'il ne traverse pas tous les hommes, de toutes les époques.

Merci, Pieralun.

   fanny   
8/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Aborder ce sujet délicat en remettant ce film sur le devant de la scène est une heureuse initiative et permet de toucher du doigt l'actualité par le biais de l'art.

Moi qui commence à peine à entrevoir les règles qui prévalent en poésie, je suis vraiment impressionnée par la façon dont vous en faîtes oublier la rigueur, par votre maîtrise, ainsi que par la limpidité et la qualité de votre écriture.

Après la lecture de ce poème très réussi, il ne nous reste plus qu'à avoir une pensée pour les artistes Ukrainiens et Russes (et pour tous les autres en situation similaire) qui n'ont pas tous le goût des armes, loin s'en faut, malgré les injonctions.

   Ramana   
7/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Votre texte m'a décoiffé par son souffle émotionnel et sa prosodie élégante et maîtrisée. Puissent les l'abondantes filmographie et littérature traitant du sujet d'une guerre ancienne, nous faire prendre conscience de la réalité des guerres actuelles, tout aussi dramatiques, quelquefois oubliées, et probablement génératrices d'évènements tels que celui que vous nous rapportez dans la suite de ce film.
Ce monde est une pétaudière, et même si nous avons été relativement tranquille dans notre coin, rien n'est jamais gagné...

   Marite   
7/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Jamais vu le film "Le pianiste" mais ce superbe poème a fait ressurgir dans ma mémoire les images qui m'habitaient lorsque je lisais le roman correspondant, c'était il y a longtemps ... Chaque vers a tout ravivé : le froid et la désolation dans la ville silencieuse, les notes du piano flottant dans l'air et attirant l'officier allemand, le bruit des pas dans l'escalier, la peur ... etc ... etc. Merci Pieralun !

   senglar   
7/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pieralun,


Glaçant. Assumé comme tel.
Où l'on voit un nazi se laisser humaniser par la musique. Magie de Chopin, magie de l'amour. La Bête avait donc une âme et ce fut un mélomane qui la révéla. Mais pour une vie sauvée, combien de suaires !
Glaçant. Assumé comme tel.

   Mintaka   
8/3/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pieralun, un très beau poème qui restitue avec justesse l'atmosphère à la fois pesante et irréelle de la fin du film. La musique qui réunit et transcende la haine et la peur.
Un bel hommege qui se lit comme il s'écoute, avec le coeur.
Par ailleurs l'exergue cite le Nocturne 20 de Chopin alors que le morceau interprété devant l'Allemand est la Ballade no 1. Le nocturne précité se trouvant dans le générique qui suit. Mais peu importe.
Pour mémoire c'est ce même Nocturne 20 qui sauva de la mort la pianiste Natalia Karp, déportée, qui le joua, par ordre, à l'anniversaire du sanglant commandant du camp de concentration de Plaszow, Amon Goeth. J'ai écrit un poème sur cet événement mais qui fut refusé.
Merci Pieralun pour cet émouvant et gracieux hommage.

   Kemo   
9/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,

Merci pour ce poème, remarquablement bien écrit, qui me replonge dans ce film et particulièrement cette scène bouleversante qui compte parmi les plus belles du cinéma, selon moi.
Votre poème en est à la hauteur, c’est là votre réussite !

   Myo   
11/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Là est toute la richesse de la poésie, tout comme celle de la musique, faire vivre l'émotion au plus intime de nos fibres.
Oui, le défi était osé, celui d'arriver à la hauteur du ressenti que les images de ce superbe film nous avait livré.

Bien sûr, je pense qu'il faut avoir vu le film pour vraiment entrer dans votre poème mais cela pourra aussi donner l'envie à certains de le découvrir.

Tout comme la musique de Chopin où chaque note est justement posée pour la beauté de l'ensemble, chaque mot de votre poème est choisi minutieusement et lui donne toute sa valeur.

Tout le décalage entre ce moment de grâce et la violence de l'enjeu est parfaitement maitrisé et nous atteint.

Un grand bravo.

Myo


Oniris Copyright © 2007-2023