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Poésie en prose
Pouet : Ante-scriptum
 Publié le 30/08/22  -  12 commentaires  -  1557 caractères  -  169 lectures    Autres textes du même auteur


Ante-scriptum



Braconner la lumière depuis son port de pêche où s'enlisaient l'absence et les heures plastiques ne se pratiquait plus qu'avec un sceptre d'os, un rostre d'espadon peint aux couleurs du ciel déposées sous ses pas.

Assis face à ses solitudes, les cernes de l'océan sous ses paupières closes, il nous parlait du rictus des mouettes qu'il traquait sans attache une plume entre les dents.

Le dos tourné à l'aurore, il savait taire la rouille de ses pressentiments tout en tressant des notes en son cœur ajouré.

Parfois, il roulait une cigarette d'écume, crapotait quelques souvenirs et s'essuyait le front de son poignet de vent.
Il nous apprenait ses tours de passe-embruns tout en épointant une esquille de lune avant de déposer sa lame parmi les mousses roses.
Il assurait qu'en retenant sa respiration avec un marque-page d'écaille on pouvait apprendre le langage des poissons,
une coquille d'huître devenait paysage de rocaille à la lancette rude de son verbe calcaire,
un bigorneau banni de son îlot saumâtre prenait des airs de démiurge ammonoidea au filet de sa voix.

Puis, un instant de nuit claire, il avait joint au ressac de ses joues quelques songes-brisants et un brin de varech pour l'espoir azuré.

.......................

Ce qu'il ne savait pas, il le mettait à éclore sur les braises du Temps, soufflait à petit feu, et confiait ses yeux au nid de l'horizon.



Pour nous, il fut.

Et sa mémoire d'encre s'agite dans la bruine.


 
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   Eskisse   
17/8/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

Une figure du sage qui se fond dans les éléments, qui est en communion avec eux, qui est l'océan, le vent, la légèreté comme si l'origine offrait une féerie à préserver, un héritage spirituel à transmettre à ceux qui savent écouter...
Tout l'art du poète tient ici dans l'enlacement subtil des isotopies de la mer, du langage et des attitudes humaines comme par exemple ces belles "cernes de l'océan sous ses paupières closes."

Mais parfois, l'image me paraît moins visualisable comme "au ressac de ses joues".
Je suis, malgré cela, conquise à la fois par le thème et la forme.

   Queribus   
20/8/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Tout d'abord, je salue la belle écriture avec ses belles phrases isolées ou regroupées, le tout avec de superbes images poétiques:"braconner la lumière", "où s'enlisaient l'absence et les heures plastiques", ""assis face à ses solitudes", ""les cernes de l'océan sous ses paupières closes", etc.

Quand au fonds, je suis plus perplexe; il me semble que votre écrit est plutôt hermétique et mérite plusieurs lectures et semble réservé à une élite mais certains adoreront certainement. je ne déteste pas l'ensemble mais je ne suis pas emballé non plus.

Bien à vous.

   Provencao   
30/8/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Pouet,

Plusieurs lectures pour mieux appréhender votre poème, et j'y ai lu et compris, me semble t-il que même "Assis face à ses solitudes"
quand "il" se sent abandonné, il est comme " un sans-soi "
il ne s’échappe pas réellement de lui-même. La force de cet Ante -scriptum parait être de faire émerger, non sans pathos, le sens de l’éclairé à partir d’un port de pêche, avec cette présence à soi de ce "il" ancré à soi.

Au plaisir de vous lire
Cordialement

   Anonyme   
30/8/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

J’ai relu plusieurs fois pour essayer de comprendre, je ne suis pas certaine d’y être parvenue tout à fait, alors je me suis attachée à plusieurs belles formules et métaphores même si ces dernières sont un peu trop systématiques, mais j’aime la cigarette d’écume ou le nid de l’horizon.

Félicitations pour votre imagination fertile et poétique !

Sur gogol, ils disent qu’Ante scriptum est un texte préliminaire à un ouvrage plus important. Est-ce le cas ou le terme a une autre signification pour vous ?

Anna

   senglar   
30/8/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour pouet,


J'aime bien quand un poète se risque à la prose poétique.

"une coquille d'huître devient paysage de rocaille à la lancette rude de son verbe calcaire"
Je n'ai pas pu m'empêcher de recopier instantanément ce passage du poème sublimant toutes ses qualités, c'est un apogée doublement métaphorique.

Ne ris pas, j'ai appris le mot "ante-scriptum".

Je connaissais beaucoup de figures de sages mais pas celle-là. Ce vieux loup-de-mer a tout vu, tout vécu, il a emmagasiné toute la sagesse de l'océan dont par imprégnation et mimétisme il devient la représentation, l'incarnation sensitive et prémonitoire.

J'aime beaucoup ce fourmillement inventif, devin-divin - caméléon-seiche-coquillage-vent (j'en oublie) - et cosmogonique.

   hersen   
30/8/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
La poésie en prose est éminemment difficile et elle est ici fort réussie.
Il y a "il", il y a la mer et son paysage, et puis il y a cette phrase :
'ce qu'il ne savait pas, il le mettait à éclore sur les braises d Temps, soufflait à petit feu, et confiait ses yeux au nid de l'horizon"

J'ai carrément craqué juste là, et j'ai relu, et comme j'aime ce poème !

"Pour nous il fut" Rien d'autre n'est important.

Merci de la lecture !

   Vincente   
31/8/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une silhouette qui par les images du poème devient photographie du vieux pêcheur de quelque rivage lointain, si ce n'est géographiquement, du moins par sa temporalité décalée.

J'aime beaucoup le premier paragraphe, la crue réalité y cohabite avec des soupçons de fantastique, entre "heures plastiques" et "couleurs du ciel… sous ses pas".
Mais j'aime plus encore le suivant :

" Assis face à ses solitudes, les cernes de l'océan sous ses paupières closes, il nous parlait du rictus des mouettes qu'il traquait sans attache une plume entre les dents."

La photo y prend la parole, depuis "les cernes de l'océan sous ses paupières closes" (superbe !) passant par le "rictus des mouettes" (c'est tellement ça!) jusqu'à cette "plume entre les dents"… Vraiment un bel envol poétique très empreint de réalisme pictural.

Ensuite la graphie continue à révéler d'autres détails mémoriels, modestes mais faisant l'essence essentielle de sa vie, et puis voici que la phrase finale nous parvient, en ouverture sur le vide éternel, "il fut" et "sa mémoire d'encre s'agite dans la bruine". Une bien sensible rencontre !

   Quistero   
2/9/2022
 a aimé ce texte 
Bien
J'aime bien in fine le moulage ou l'empreinte que laisse ce vieil homme dans mon esprit, lecture achevée. Je suis un peu moins enthousiaste quant au flux d'images trop élaborées à mon goût pour parvenir à ce résultat. Mais peut-être recherchiez-vous cette ambivalence? Merci pour cette lecture.

   Atom   
3/9/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'aime bien ce portrait surréaliste d'un vieux pêcheur de lunes, d'étoiles et autres reflets lumineux qui papillonnent sur l'océan (du vide).
L'idée d'un Don Quichotte marin m'apparait aussi à travers ces vers.

   Lariviere   
4/9/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut Pouet

Dire que j'ai tout compris dans cette poésie surréaliste serait exagéré, mais qu'importe !

J'aime bien le ton et les images décalées qui nous offrent un petit moment de fantaisie en nous dressant le portrait de cet ascète marin...

Merci pour cette lecture et bonne continuation

   Anonyme   
8/9/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Gringo, tu déchires !

J'ai eu un moment de félicité complète en te lisant, un moment en suspension comme peu de choses arrivent encore à m'en offrir.

Ta plume est d'une précision sur la deuxième strophe (phrase?), idem sur la troisième, l'évocation poétique est impressionnante.

Mon passage préféré est évidemment l'enchainement de 5 strophes qui permet une immersion dans l'esprit du locuteur comme en apnée, pour ressortir et revenir brusquement à la réalité.

Tu parviens à créer un cocon poétique hors du temps sur ce texte, et ça fait du bien à la poétique du kiwi dans l'ananas.
Merci Gringo, et au plaisir de te relire :)
*smoutch*

   StephTask   
23/9/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Un peu honteux, je m’aperçois que j’ai raté ce bijou.
Je ne me permettrais donc pas de braconner la lumière qui émane de ce poème. On ne peut qu’aimer ce personnage qui fait corps avec la mer, roulant des cigarettes d’écume et qui fait des tours de passe-embruns.
Ce texte m’a marqué, que dis-je… Fossilisé comme une ammonite et je me laisse porter par une vague impression dans ce ressac poétique, pour finir essoré comme le varech. Je salue ce poème qui restera ancré dans ma mémoire, qui je l’espère, ne s’effacera pas dans la nuit claire.
Bref ! C’est très bon. Comment ne pas l’aimer ?


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