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Polza
29/5/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
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Bonjour,
Je trouve ce poème assez introspectif de la part du narrateur (narratrice), comme s’il se parlait à lui-même (elle-même). Il y a une sorte de surréalisme je trouve, cela rend parfois le sens abscons « à force de forer des miroirs/plutôt scier des mandibules » j’ai songé au miroir d’Alice au pays des merveilles (De l’autre côté du miroir) et au film de Quentin Dupieux « Mandibules », ce qui renforce l’idée surréaliste que je me fais de votre poème. Même si j’aime beaucoup ce mouvement et que parfois il n’est pas nécessaire de comprendre pour aimer, j’aurais apprécié être plus réceptif à l’ensemble de cet Entracte. Cela ne vient pas nécessairement de l’auteur, c’est juste que je n’ai pas pu me projeter pleinement dans cet univers proposé pour des raisons que je ne suis pas capable d’expliquer, d’exprimer plus clairement. J’oubliais ! « jouent faux quand ils écorchent » cela aurait sûrement changé le sens, mais allez savoir pourquoi, j’aurais bien aimé « quand ils s’écorchent ». Polza en EL |
Donaldo75
3/6/2024
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Dans la série « comment se torturer les neurones en mode surréaliste » ce poème se place bien ; j’ai vraiment aimé ce tableau digne d’un Kandinsky où le motif s’immisce dans ma lecture sans pour autant apparaitre clairement, laissant la liberté d’interprétation à mon imagination en fonction de l’humeur du jour. Toujours est-il que c’est un libre réussi, avec un champ lexical sonore, parfois à la limite du bruit de la craie sur le tableau noir, un peu comme dans une œuvre de musique contemporaine du genre Olivier Messiaen. Bon, peut-être que j’ai fumé la moquette ou que je cherche midi à quatorze heures mais ce surréalisme passe bien dans ma lecture et je ne repars pas Gros Jean comme devant de la section poésie en ce dimanche soir.
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papipoete
12/6/2024
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bonjour Pouet
Il vous est arrivé d'écrire du réaliste, du concret comme " dans le jardin, fleurissent des roses plus belles les unes que les autres, que je me plais à admirer... " mais ce jour Vous écrivez du " Pouet ", du vrai que mes neurones ont grand mal à décrypter. Pourtant, curieusement je sent comme un air du dimanche-dernier, où nous sommes tombés sur le cul, en apprenant l'éruption du " rassemblement national " et serions là dans un entracte sidéral... NB la seconde strophe dans ce sens-là, qui nous berce avec des mots-doudous, me font prêter l'oreille... tant la réalité est poudre de perlimpinpin qui pourrait s'avérer " zyclon B " Comme je suis sûrement à des années-lumière de votre thème, je préfère ne pas noter... |
ALDO
12/6/2024
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Bonjour,
Je vous lis. Ce n'est pas, à mes oreilles, le merveilleux "Jardin du sommeil d'amour" d'Olivier Messiaen. Je suis sans doute à côté de tout mais je revois, vous lisant, la dernière scène d'un Fellini : Casanova devant son propre leurre : séducteur vain d'une poupée automate et la berceuse désarticulée d'un Nino Rota juste avant le silence. Oui sans doute les mots jouent faux le sensible, mais " ne plus rien dire " pour autant ? Et si la poésie n'était qu'une minuscule variation du silence ? Bravo |
Quidonc
12/6/2024
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"Ne plus rien dire" :
Dès le début et à la fin du poème, l'auteur insiste sur le silence, en résonance avec le concept d'entracte où le bruit et l'action cessent temporairement. "Le minuscule gît au silence" : L'importance accordée au silence rappelle l'importance de l'entracte dans une œuvre : un moment souvent sous-estimé mais crucial pour l'appréciation de l'ensemble. "Les mots abrasent" : Les mots sont présentés comme perturbateurs et trompeurs, justifiant ainsi la nécessité d'un entracte (silence) pour échapper à leur effet néfaste. Clôture par l'inversion des idées initiales : En clôturant le poème avec une inversion des premières lignes ("l'important gît au minuscule. C'est le silence."), l'auteur boucle la boucle, renforçant l'idée que le silence (l'entracte) est un moment de vérité et de révélation. Le titre "Entracte" est judicieusement choisi, car il encapsule parfaitement les thèmes centraux du poème : la valeur du silence, la suspension de la parole, et la réflexion profonde. Cette pause symbolique entre les mots permet de mettre en lumière l'essence cachée des choses, une idée que le poème développe de manière subtile et poétique. Cependant le poème est très abstrait, ce qui peut rendre sa compréhension difficile pour certains lecteurs. De même, l'abondance de métaphores peut parfois paraître excessive et compliquer la clarté du message. |
Eskisse
13/6/2024
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Bonjour Pouet,
C'est de la parole dont il est question ici et non des mots écrits. Une parole qui semble erronée, vaine, inutile, discordante, une parole liée à la souffrance physique: "ils écorchent". La parole se fait instrument désaccordé et s'entend. Les sons un peu durs sont d'ailleurs répétés [r] [fr] comme l'écho d'une douleur. D'où la nécessité du silence dans cet entracte, ce qui est entre ce qui agit. Une pause singulière ou salutaire ? Il ressort de ce poème une certaine froideur, comme une anesthésie des sentiments. EDIT: Et puis j'associe cet entracte, allez savoir pourquoi, à la pause du milieu d'un spectacle de clown dans lequel le "dire" se manifeste. On n'est pas en encore en "fin de partie".. .mais il y a un côté comique avec"plutôt scier des mandibules". Merci |
Provencao
13/6/2024
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Bonjour Pouet,
"Ne plus rien dire, l'important gît au minuscule. C'est le silence." A l'initiale, il y a le silence. De l’entracte aux phrases, aux mots tout apparaît et se condense, tout se réduit et éclate en régénérant inlassablement la force qu’est le mot. C'est de ce silence que votre poésie amarre son fondement mobile, son influence et son péremptoire. Au plaisir de vous lire Cordialement |
Louis
14/6/2024
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On trouve le plus couramment, dans les poèmes qui se donnent les mots pour sujet, un éloge de leur pouvoir, une ode à leur vertu enchanteresse tant ils pourraient montrer des capacités musicales et poétiques ; on trouve encore une célébration de leur puissance à ouvrir l’esprit vers les domaines profonds de la pensée, du spirituel ou de la réalité.
Mais dans ce poème, tout au contraire, par une volonté de démystification, à l’ « envers » du « On dit couramment», l’accent se porte sur l’impuissance des mots. S’il faut leur reconnaître un pouvoir, c’est celui de l’illusion. Étonnamment, le poème commence par l’annonce d’un « entracte », et se clôture aussi par elle. Cette idée de « l’entracte » suppose que quelque chose se joue sur une scène abstraite où se produisent les mots, un concert verbal, un théâtre ou un opéra, en lesquels les mots seuls seraient acteurs et musiciens. La phrase : « ne plus rien dire » est construite, en effet, sans sujet personnel. L’entracte est une interruption momentanée d’un spectacle, d’un théâtre, ici celui de la parole où les mots sont en "représentation" ; un temps pendant lequel les mots se taisent, et font silence. « Ne plus rien dire » : tel est le temps de la pause. Il ne s’agit pas, non, de dire autre chose, mais de ne plus rien dire. Ce n’est pas l’objet du « dire », le "quelque chose" (car « dire », c’est toujours dire quelque chose à quelqu’un ) qui constitue la pause, en une parole plus légère, plus futile, plus anodine. Non, il ne s’agit pas de dire des petits riens, mais de ne rien dire ; c’est le dire lui-même qui peut être interrompu. Pourquoi faudrait-il, pour un temps au moins, se taire ? Le deuxième vers amorce une explication : « le minuscule gît au silence » Le sens de ce vers ne se donne pas comme une évidence. Qu’en est-il de cet adjectif substantivé : « le minuscule » ? Il faut sans doute y entendre ce qui est de petite ou de moindre importance, un infime, un "insignifiant". Par un effet stylistique, il est rapproché de son opposé, en un paradoxe avec le troisième vers : « C’est l’important ». De même que Jacques Prévert pouvait écrire : « Paris est tout petit, c’est là sa vraie grandeur. » ; ici on pourrait lire : « le tout petit réside dans le silence, c’est là sa vraie grandeur » ; et, puisque le « minuscule » est lié à ce qui est sans importance, au moins en apparence, l’affirmation paradoxale se comprend alors : le minuscule sans importance qui s’étale dans le silence, c’est lui l’important. Ou encore : ce qui semble dans le silence sans importance, voilà l’important. Qu’est-ce qui donne alors une importance à cet « entracte », à ce silence d’un négligeable minuscule à ne pas négliger ? Les strophes suivantes répondent à cette question implicite. Elles apportent leurs réponses avec une économie de moyens verbaux, dans la sobriété d’un langage déjà miné par l’appel au silence. Elles ne valorisent pas directement le silence, mais indirectement par dévalorisation de leur opposé, les mots. Ceux-ci présentent quelques inconvénients : « Les mots abrasent » L’affirmation est aussi brève que tranchante. Les mots polissent, amincissent, rasent, usent… quand on s’y frotte. Mais qu’est-ce qui est abrasé par les mots ? Les choses désignées ? Les idées, la pensée ? Le vécu, les affects ? Le sujet parlant lui-même ? Un peu de tout cela peut-être, qui est en lien avec le langage. Cette idée d’abrasement contient en tous cas celle d’une perte. Les mots n’enrichiraient pas, bien au contraire. Il semble que se produise un appauvrissement plutôt et une fatigue du locuteur qui s’use à s’y frotter. À la lime des mots… s’opère un lissage, une destruction des rugosités de la vie, et du réel, par quoi se perd une dimension importante de l’existence, une part "sauvage" et "indomptée". Les mots seraient abrasifs dans leurs effets, mais par les doux moyens d’un "bercement". Apparaît cet oxymore : « Les mots abrasent / en berçant » Le rasage se ferait en douceur. Les mots comme une crème. Ils seraient à la fois la crème adoucissante et le rasoir tranchant. Ils adoucissent en berçant d’illusions, dont la principale serait de faire croire que le plus important, que l’essentiel du vécu et du réel seraient saisis par eux. D’autre part, les mots « essaient le semblant » Ils « essaient », sous-entendu n’y réussissent pas, de "re-présenter" les choses, dans une copie, une similitude, un mimétisme ; de jouer aussi le rôle du miroir en lequel nous cherchons, nous locuteurs, à nous reconnaître. Les mots "font semblant" dans leur jeu de scène expressive, mais échouent à rendre l’authentique, à saisir ce qui est vraiment important et essentiel. Les mots ont encore cet inconvénient : Ils « désaccordent le sensible » Ils introduiraient donc une dysharmonie entre les sensations, comme entre les sentiments. La fonction concertante du langage serait plutôt déconcertante. Peut-être faut-il comprendre que les mots ne reflèteraient pas fidèlement ce qui est perçu ou ce qui est éprouvé ( « le sensible »). Le langage ainsi nous trahirait. Enfin, ils jouent, acteurs, musiciens, mais « ils jouent faux ». Par infidélité. Par manque d’authenticité et de vérité. Ils jouent faux et nous « écorchent », au lieu de nous incarner. Ils nous déchirent, nous blessent, nous dépouillent de nous-mêmes. Ils nous écorcheraient de l’intérieur, nous vidant de toute substance. Le poème se poursuit par des phrases infinitives. Tout cet usage des mots revient à : « froisser l’intitulé S’effriter dans l’écho » Mais surtout : « greffer des sons Sur du vide » Les mots renvoient à du vide. « Dire » serait une illusion dans sa prétention à exprimer quelque chose du réel. Les mots ne seraient que les onomatopées du vide ou du néant. Le "jeu" des mots n’est qu’apparence, un flottement de sons pour la parole orale ou de "lettres suspendues" sur du vide, "dans la blancheur de la page" ( pour paraphraser Mallarmé). Les mots : quelques rides sur une océan de silence. Cela revient encore, pour les sujets parlants à « s’entrecroiser soi-même » C’est-à-dire ne pas se rencontrer soi-même, mais s’emmêler, s’entremêler, se perdre dans un inextricable écheveau des paroles. Ainsi, « à force de forer des miroirs », à force de vouloir percer les apparences et les reflets, de vouloir les dépasser vers une réalité hors d’atteinte, assimilée à du « vide », on se perd soi-même. Alors, « plutôt scier des mandibules ». La formule est désabusée. Il serait donc préférable de scier les mâchoires, organes de la parole, sources organiques des mots, de s’amputer ainsi de nos « mandibules », mot de connotation péjorative. La formule semble construite sur le modèle de l’expression populaire : « scier les pattes », qui indique un état de stupeur qui empêche de tenir debout ou d’avancer ; scier les mandibules serait donc mettre dans un état de silence, sans aucun mot à prononcer ; mettre aussi dans l’étonnement pur du silence, dans un état de stupeur silencieuse, en lequel le contact avec « l’important minuscule » peut tacitement s’effectuer. Le poème commence par l’annonce de l’entracte du silence et se termine par elle. Il semble effectuer comme un déplacement de l’entracte lui-même, qui ne vient pas à la suite du flux des paroles, pause dans leur jeu illimité, mais en début et en fin. L’entracte n’est plus au milieu, mais à l’initial et au final. Tout commence et finit par le silence. Un renversement se produit : les mots constituent un "entracte" dans le cours du silence, une parenthèse verbale, juste un chuchotement illusoire dans le cours de ce spectacle silencieux du monde. Ce poème se meut toutefois dans un paradoxe, en ce que l’appel au silence se fait par les mots. Et « l’entracte » lui-même est encore un mot, non un état de silence. Mais ce qui est ici visé, ne serait-ce pas le silence des mots ? Un appel, non à l’absence de mots, mais à des mots "silencieux" qui cessent de se donner l’importance de se croire en mesure de "dire" quelque chose d’essentiel du monde ou de soi-même, se prenant trop "au sérieux". Mon commentaire trop disert, mérite, tiens ! un long entracte. Merci Pouet. Et bravo pour cette audace de considérer "à l'envers" les affirmations convenues sur les mots. |
Ioledane
15/6/2024
trouve l'écriture
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aime bien
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J'ai aimé confusément ce texte, sans le comprendre tout à fait.
Préférer le silence plutôt que les mots qui trichent ou qui blessent, voilà ce que j'en ai retenu. J'apprécie particulièrement ce passage : "Froisser l'intitulé, s'effriter dans l'écho, greffer des sons sur du vide. Pas du tout aimé les mandibules, en revanche, surtout sciées. La fin tombe avec grâce, renouant avec le début dans une boucle de silence. |
EtienneNorvins
3/7/2024
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Je n'ajouterai que mon inquiétude : il y a quelque chose de désespéré dans cet entracte.
Dernière prise de parole entre deux silences, comme l'a souligné Louis. Comme suggéré par Eskisse, cela ressemble à une fin de partie. Le texte s'ouvre et se ferme par 'Ne plus rien dire', enchâssé dans une sorte d'équation dont la variation pose l'équivalence : l'important = le minuscule = le silence. C'est commutatif... Le goût des mots et de leur musique n'est plus qu'abrasement, désaccord, jeu faux, écorchures, froissement, effritement. "Greffer des sons sur du vide" : à quoi bon ? Le plaisir de l'illusion a lui-même disparu. Le magicien n'est plus la dupe de ses tours - ne cherche plus à duper son lecteur. On est au delà de l'Aboli bibelot d'inanité sonore, qui maintient au moins un essentiel : la musique. L'interprète finit donc par casser son instrument - "plutôt scier des mandibules" : chacune des deux parties du bec des oiseaux, des pièces buccales de certains arthropodes ... comme la cigale. Gloups ... cela sonne ... comme un adieu ? |