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Jemabi
3/11/2022
a aimé ce texte
Bien ↑
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Un texte qui se lit facilement, comme de la prose, comme le début d'une histoire banale d'un quotidien sans histoires que je situerais dans les années 50 car les images s'impriment en noir et blanc. Du coup, on est un peu frustré que l'histoire se termine aussi brutalement, sur ce simple morceau de chocolat qui semble être l'événement de la journée. On aimerait que ce train-train dure un peu plus.
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cherbiacuespe
5/11/2022
a aimé ce texte
Un peu ↑
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Un texte à mystère qui ne laisse à la fin que des questions sans réponse. Finalement qui est-il réellement ce bonhomme ? Pourquoi une telle morosité, ce rituel sans fin ? Une charade sans solution...
Je reste entre deux eaux, tout compte fait, avec cette poésie. Est-elle amusante ou pas ? Profonde ? Trop simple ? Triste ? Simple est la solution la plus tentante. Profonde, la plus complexe. L'imagination fera le reste semble-t-il ! CherbiAcuéspè En EL |
Anonyme
7/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup
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Je ne voyais pas trop où vous vouliez en venir avec ce déroulement en apparence plat d'un rituel des plus ordinaires ; en ce qui me concerne, c'est après avoir pris connaissance du papier doré du chocolat-qui-va-avec-le-café que tout s'est mis en place, d'un coup, que j'ai vu ce consommateur, l'ai imaginé âgé, le crâne chauve tavelé de taches de vieillesse, ai ressenti son désespoir tranquille et sa solitude.
Et j'ai trouvé votre poème fort bien conçu, habile, s'installant avec assurance dans ma psyché. Les deux derniers vers, selon moi, ne sont pas forcément nécessaires, ils me semblent apporter un ton vaguement larmoyant en discordance avec l'impression globale qui me reste. Ce n'est que mon avis. Mes deux vers préférés, parce qu'ils ont parlé immédiatement à l'œil de mon imagination (si j'ose dire), pour l'épaisseur sémantique du mot « salières », tout à fait à sa place dans le décor, et parce que j'y lis quelque chose d'humblement poignant : Nihildra la serveuse au décolleté complice lui jetait au visage des salières d’amour P.S. : J'ai beaucoup aimé le titre aussi, je le trouve simple et touchant, bien dans le ton général. |
Anonyme
18/11/2022
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Ce que j’ai aimé :
_____________ La petite tranche de vie hautement sympathique d’un tous les jours et la complicité suggérée entre l’homme et la serveuse dont j’aime à penser qu’il en est secrètement amoureux. Chose que je suppute par rapport à l'espoir du titre. Ce que j’ai moins aimé : __________________ Le manque de force poétique à mon goût et la sensation que l'aventure est tronquée, qu’il manque une fin plus appuyée à ce récit. Ma Conclusion : _________ Comme je l’ai écrit précédemment un manque de teneur poétique qui n’engage que moi mais c’est un petit texte auquel je trouve un charme qui me plaît beaucoup bien que je ne sache l'expliquer. Et c'est tant mieux. |
StephTask
18/11/2022
a aimé ce texte
Bien ↑
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Bonjour Pouet,
C’est une tranche de vie pleine de mélancolie. Ce texte se lit comme de la prose, mais il s’en dégage une jolie poésie. J’aime cette idée de transcender le quotidien avec des images et des mots simples. Ce poème est doux comme un bout de chocolat et je n’attendrai pas un jour de plus pour le sortir de son papier doré et le consommer avec le café qui met un point final à ma pause déjeuner. |
papipoete
18/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Bonjour Pouet
Quelle agréable surprise de vous lire à nouveau ! ( depuis septembre me semble une grande pause ) et par le biais de cette historiette toute mignonnette ! Pas simplette du tout, et même fort touchante ! Un peu le scénario d'un jour ordinaire, pour un homme bien ordinaire ; je l'interprétai à quelques différences près, mais ça m'allait tout-à-fait... NB un de vos textes que je parcoure sans griller mes neurones, et souris souvent fort touché par ces quelques lignes ( la 3e strophe en particulier, avec " lui jetait au visage des salières d'amour " alors que trop souvent, on nous lance un regard " kalachnikov " ou autre invective déplacée ! je songe que ce personnage n'est plus ( mon vieux de Daniel Guichard ) mais s'il vit toujours, je lui tiendrais compagnie avec plaisir ! J'ai vraiment aimé ! |
Anonyme
18/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup
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On ne peut être que remué du regard porté par le poète sur un de ces invisibles que l'on croise sans les regarder vraiment !
C'est touchant, d'autant plus avec des mots de tous les jours dans un décor d'habitudes. J'apprécie particulièrement le titre riche de son cacao emballé dans son papier doré, les salières d'amour jetées au visage par la serveuse au décolleté complice, aussi le chocolat fourré dans sa poche, que l'on devine gardé pour poursuivre le cérémonial une fois le vieil homme usé retourné dans son antre de solitude. Une tranche de vie qui en dit long tout simplement. |
Anonyme
18/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Bonsoir Pouet,
Le titre semble être la seule entorse à votre choix de focalisation externe. En effet, alors que vous ne faites que porter la caméra tout le long du poème, vous finissez par interpréter le sens de ce que ce vous filmez. Car dans cet Espoir cacao, le papier doré semble être la métaphore de cet espoir qui enveloppe l’insignifiant petit carré de chocolat, espoir matérialisé par un aspect riche et brillant, peut-être celui de souvenirs. J’aime cette interprétation, même si ce n’est peut-être pas la bonne. J’aime cette poésie descriptive quand elle filme l’humain sans parti pris. C’est un mode de narration très prisé des américains. La description de votre héros pourrait curieusement me faire penser à celles d’un auteur comme W.R. Burnett (Quand la ville dort) qui ne se permet jamais de regarder ses personnages de l’intérieur. Il y a quelque chose de cinématographique dans la scène qui a inspiré votre poème, quelque chose de visuel qui nous fait la découvrir en même temps que vous. J’aime vraiment ça, j’aime que vous ne nous racontiez pas la vie de cet homme. J’aime que cela m’intrigue de voir un homme qui semble bien seul, pas nécessairement dans le besoin. Le restaurant tous les jours, un double kir, un pichet de rosé, un café calva, tout ça n’est pas dans les moyens d’un nécessiteux. Mais tout cet alcool brouille sûrement l’esprit. Peut-être n’est-ce même pas un vice. La solitude, l’ennui, sont-ils des vices ? Mais peut-être n’est-il après tout qu’un alcoolique semi-mondain ? Il lit. Quoi ? Trop loin pour le voir, c’est ce qui définit le personnage, cette absence d’enveloppe intime. On ne saura rien de lui et vous avez bien eu raison de choisir cet angle narratif. Cette Nihildra au décolleté complice qui lui jette au visage sa métonymie d’amour (des salières), comment ne pas être jaloux de cette image. Et comment ne pas nous regarder nous-mêmes, avec nos tics, nos pingreries ou nos souvenirs, dans ce chapardage innocent d’un carré de chocolat. Quelle somme de sentiments se cache derrière ce geste spontané et récurrent ? J’aime vos rimes légères comme des fétus de paille, elles vont si bien à ce que nous sommes, étrangers pour les autres. Bellini |
inconnu1
18/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↓
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Bonjour,
On va commencer par ce qui fâche. On voit bien ici qu'il y a une volonté de dodécasyllabes et la volonté de respecter une certaine musicalité. Mais là, je trouve qu'il y a trop d'irrégularité dans la prononciation des e muets. J'ai été trop souvent obligé de m'arrêter pour en comprendre la prononciation . Le pire pour moi a été le 14eme vers. Je ne sais encore pas comment le lire : "Qu'on offrait graci...eu..." Ca ne va pas. "Qu'on offrait gracieus'ment... avec le café" ? il manque un pied. "Qu'on offrait gracieuse...ment avec le café. Ca doit être cela mais la césure est au milieu du mot. Bref j'ai perdu le rythme et l'histoire. Maintenant ce que j'ai aimé, c'est l'ambiance vaguement mélancolique, ces petites choses de la vie, cette capacité à observer le quotidien Bien à vous NB : bon, j'y viens et j'y reviens sur ce poème et une fois dépassée la difficulté que j'ai signalée plus haut, il m'apprivoise et du coup, je remonte ma notation car l'ambiance me prend. Je vais peut être finir par l'aimer passionnément |
Atom
18/11/2022
a aimé ce texte
Bien ↑
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J'aime bien cette tranche de vie.
On peut tenter de deviner pas mal de choses à travers ces quelques vers : J'imagine un gars du tertiaire un peu Houellebecquien mangeant chaque jours dans le petit restau du coin, un peu alcolo, un peu psychorigide mais qui lorgne quand même vers le décolleté de la serveuse. Un portrait assez triste en somme et à mon sens sans espoir. Je trouve d'ailleurs le titre un peu trop " olé olé " par rapport à la sobriété du propos. Pourquoi pas tout simplement (par ex) : le bout de chocolat |
Anonyme
18/11/2022
a aimé ce texte
Bien ↑
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Holà Gringolito,
Je suis habituée de ta part à plus de noirceur, plus d'hermétisme dans l'expressivité, là tu es presque dans la contemplation naïve (ce n'est pas péjoratif hein, au sens poétique du terme). Ce tableau que tu nous dépeins est assez intéressant, malgré son apparente banalité. Ou inversement je ne sais pas comment l'exprimer : c'est une rencontre fortuite au restaurant, un regard posé (sur soi ou l'autre) qui observe et ne tire aucune conclusion, si ce n'est le pourquoi du chocolat dans la poche. On voit au-delà de ce que l'on voit. Et c'est rassurant de voir qu'on est pas le seul à reprendre le (sucre pour ma part) chocolat, parce que son but dans la vie c'est d'être offert. On ne refuse pas un cadeau que la vie nous fait, même si c'est juste une petite sucrerie dans un alu. Bref, ce n'est que ma vision de ton oeuvre, mais elle m'a plue. Merci pour ce partage. Au plaisir, toujours, de te relire ! |
Eskisse
18/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Salut Pouet,
Une scène itérative pour dire la monotonie de l'infinie solitude. C'est cette fine attention nimbée de tendresse portée par un observateur qui fait le sel du poème. Un regard qui enveloppe autrui. Celui du poète. Et le carré de chocolat comme un cadeau que l'on fait à tous les clients et que l'homme prend, geste dérisoire. Et ce n'est pas un hasard si le poème se finit sur le mot "cérémonial" qui vient insister sur le passage du temps. J'ai aimé cette scène très visuelle qui ne raconte rien mais suggère l'humanité mise à nu. |
Lotier
19/11/2022
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C'est un poème photographique où la poésie est dans le regard du poète plus que dans la scène qu'il dépeint.
Le vers « la démarche geignarde et le crâne fuyant » m'a semblé relever de relents phrénologiques assez désagréables, qui me rappellent cette division qui s'est voulue hiérarchisée entre les brachycéphales et les dolichocéphales… Hormis cela, le regard du poète insiste sur la répétition, de jour en jour, de la scène, en utilisation l'imparfait. On pourrait y voir la poésie du désir toujours reporté… |
Luz
19/11/2022
a aimé ce texte
Passionnément
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Géniale, cette histoire tranquille au rythme monotone des alexandrins.
Une scène d'autrefois, mais que l'on découvre encore aujourd'hui dans quelques quartiers ou à la campagne. J'aime beaucoup. Et je trouve sublime : "Nihildra la serveuse au décolleté complice lui jetait au visage des salières d’amour". Je suis allé voir sur Internet si je n'avais pas raté quelque chose dans ma vie à propos des salières d'amour, mais non, ça va, ça se vend chez cdiscount... Bravo et vivement une prochaine histoire de cet acabit ! |
Mintaka
19/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup
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Bonjour Pouet,
Un curieux poème un peu à la Prévert. Un moment a priori très banal de vie où je ressens que ce sont passées beaucoup de choses avant comme ils s'en passera après... mais aussi tout ce qui se passe pendant et qui devient notre propre histoire en quelque sorte. Ou alors un simple rituel de vie comme il en existe beaucoup, sans grand intérêt sinon la place particulière que prend toute habitude dans une vie. Une atmosphère en parfaite adéquation avec le sujet se dégage de votre poème; comme une musique qui collerait parfaitement avec les paroles de la chanson. Merci pour le moment |
Evelit
19/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup
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J'ai beaucoup aimé la simplicité de ce poème, sa délicatesse.
J'aime bien tout ce qui évoque le quotidien, ça ce sont mes goûts personnels. Je trouve que vous avez fait un moment magique d'un moment simple. J'aime bien ce bout de chocolat dans son papier doré qu'il ne mange pas mais qu'il emporte, le décolleté de la serveuse et ses salières d'amour. On sent bien le personnage qui boit son vin, et on visualise la scène en le lisant. J'aime un peu moins la toute fin (dernier cérémonial), mais pourquoi pas après tout? Merci pour ce beau texte. |
David
19/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup
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Bonjour Pouet,
J'aime bien la petite histoire du poème, l'histoire de ce petit chocolat que le personnage emporte, quand même il n'en fait rien. C'est mélancolique je trouve, ce cadeau pris par cérémonie, par rituel, comme une espèce de dette paradoxale, puisque c'est un "cadeau", enfin ici, c'est pas un échange tribal, juste un chocolat servis avec un café. Justement, ce personnage semble sorti d'une autre époque, alors même que celle où semble se situer le poème pourrait être déjà ancienne, il est encore plus ancien il me semble cet homme. De l'époque où les cadeaux ne se refusaient pas, où c'était un très lourd engagement. C'est la vieille histoire de l'échange de dons, de bien avant le commerce et les tarifs. Le poème a un joli rythme et le prénom de la serveuse fait une belle rupture, presque un plongeon subite dans une histoire plus fantastique, de reine ou de grande prêtresse exotique, ce dont je parlais déjà : c'est vieux au premier abord et encore plus vieux au second, dans un sens méritoire de "vieux" bien entendu, qui veut dire "noble". Aucune grandiloquence de vocabulaire, c'est l'humilité qui ressort abondamment aussi et pourtant, je l'ai trouvé très profond ce petit poème tout simple, très grand ! Bravo ! |
Cyrill
20/11/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Un peu de chocolat dans son emballage doré, et un paquet d’allumettes valent mieux que de l'or massif dans un quotidien de solitude et de tristesse. Il y a de la tendresse dans la description de ce bougre finissant, de ce cérémonial où l'humain et le non-marchand gagnent en valeur. Ça me fait penser à moi ( en toute modestie ) : je mets aussi dans ma poche les petits chocolats emballés et autres biscuits, même parfois les sucres, car je ne sucre pas mon café.
Avoue, Pouet, tu m'as suivi comme un paparazzi ( ͡▀̿ ̿ ⍙ ͡▀̿ ̿ ). Merci pour le cacao et l'espoir, quel joli titre d'ailleurs ! |
Ioledane
20/11/2022
a aimé ce texte
Bien ↑
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Un joli titre pour ce récit simple et touchant.
J'aime les images du regard dépoli, la démarche geignarde, les salières d'amour jetées au visage. J'apprécie aussi le rythme phonétique, hexasyllabes au début et à la fin, alexandrins entre les deux (pas pour les puristes mais on s'en fiche). Et un peu de rimes aussi, ça ne gâche rien. La narration au passé ancre l'impression d'un temps dépassé, celui d'un homme que j'imagine déjà âgé, qui venait (en picolant pas mal, de la picole des vieux désabusés) mais ne vient plus. "Dernier cérémonial" ... Assez touchant et ce sans pathos dégoulinant, j'aime. Merci pour cet instantané. |
Donaldo75
22/11/2022
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Salut Pouet,
Le titre m’a fait penser à une chanson d’Annie Cordy, va savoir pourquoi ; c’est quand même étrange le cerveau quand on y pense ! Bon, j’en reviens au poème et à mon impression de lecture, mitigée il est vrai. Je ne suis pas fan des poèmes qui décrivent ou racontent et là c’est ce que je lis en grande partie. Je vois comme une tentative de photographie à la Robert Doisneau mais elle n’a pas fonctionné avec moi, désolé (j’ai lu les autres commentaires, dithyrambiques, ce qui m’a donné envie de lire ce poème). Les deux vers de fin auraient peut-être été en mesure de changer cette impression de lecture, comme un point d’orgue mais là aussi ça n’a pas fonctionné. Une autre fois. |
Louis
2/12/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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En deux vers courts : ecce homo.
Brefs, mais éloquents sur le personnage qui nous est présenté. Deux traits cernent le ‘type’ en question, et suffisent à le rendre présent, dans sa singularité. Voilà qu’il surgit, l’homme, tout entier concentré dans un regard ; tout entier recueilli dans un sourire. Un qualificatif pour chacun de ces traits, et d’inutiles nuances évitées qui le feraient entrer dans une psychologie hors de propos ; chaque qualificatif touche à l’essentiel. Son regard porté sur le monde se résume en un mot : « dépoli » Rien ne brille dans ce regard, pas d’enthousiasme, nulle lumière nul feu ne l’éclairent. Il a ces yeux ternes de l’homme ‘blasé’, las, fatigué de la vie, désabusé et sans illusions. Le sourire, lui, flotte « incertain », mais un certain sourire, – une grimace du désespoir ? rattrape un peu ce que le regard a perdu, le ‘poli’ au sens cette fois de la politesse, un sourire plutôt comme une ‘politesse du désespoir’. La deuxième strophe, moins descriptive, présente l’homme dans ses actes : la démarche geignarde et le crâne fuyant chaque midi il venait son journal à la main s’asseoir à la terrasse du même restaurant S’il convient de les donner à voir, ces actes, ce n’est pas du fait de leur singularité, de leur caractère exceptionnel, original, ou hors du commun, mais au contraire, ils se remarquent par leur extrême banalité, et par leur répétitivité. Ils constituent une sorte de rituel. Une répétition invariable du même. Aucune recherche de nouveauté ne se manifeste, et le même restaurant chaque jour se voit fréquenté, invariablement, sans diversité dans l’expérience culinaire et gustative. L'homme se comporte comme s’il n’avait plus rien à découvrir, et confirme par là ce qui se lit dans son regard d’homme blasé. Sa vie semble s’être figée, dans la répétition du même. Avec pour conséquence une temporalité perdue. Plus d’avenir : demain sera la répétition d’aujourd’hui ; demain, c’est déjà aujourd’hui, c’était déjà hier. Le temps, en se figeant, perd ses trois dimensions, la distinction entre un passé qui n’est plus, le présent de ce qui est, et un futur qui n’est pas encore. La perte de l’avenir chez cet homme est la plus manifeste, en ce qu’il semble fermé à toute nouveauté, ne cherche rien de nouveau à construire ou à expérimenter, en ce que le futur ne s’ouvre plus à lui comme surgissement, jaillissement, possibilité créative ‘d’imprévisible nouveauté’, pour emprunter son expression au philosophe Bergson. Sa vie est sans surprise. Seul, il n’attend rien ni personne. Le voilà : triste et solitaire, attablé à la terrasse du même restaurant, chaque jour à la même heure. Toujours dans la plainte, et la tristesse : sa « démarche geignarde ». Il commandait sans joie un double blanc-cassis Un pichet de rosé avec le plat du jour À la table de la vie, il s’assoit, sans appétit, sans gourmandise. Un avenir desséché, mais une boisson au présent, un pichet de rosé. Toujours le « plat du jour ». Il prend donc ce qu’on lui propose, ne choisit pas lui-même. Il ne cueille pas le jour, pas même n’est-il épicurien. Il subit le jour. Et puis, il y a la serveuse. Elle porte un nom. Elle lui est donc familière. Mais ce nom, il convient de bien l’écouter, de bien l’entendre, dans sa particularité révélatrice. Elle s’appelle : « Nihildra ». Un nom fait de néant : « nihil ». Un nom qui pourrait être le sien, à lui, le ‘nihiliste’. L’homme est servi par une femme-néant. Pour partie : une allégorie. Séductrice nihil-dra, au « décolleté complice » où, dans son entrebâillement, l’on s’abîme dans le néant. Son côté purement féminin le laisse indifférent. Son désir est éteint. Ni les boissons servies ni la serveuse ne l’éveillent. Néant du désir. Domine en elle le côté nihil. La serveuse n’est considérée que dans sa fonction : elle sert, elle donne, elle pourvoie une réalité, et ce don n’est que néant. Tout est vain, reste juste à siffler un peu de vin ; tout est dérisoire, reste juste un ‘blanc-cass’ à boire. Mais sans ivresse. Mais sans excès. Trop de vie dans l’ivresse. Trop de dérèglement. L’homme accepte la réalité comme un fait, sans jugement, sans investissement de désir, et donc sans affects. Son ‘nihilisme’ n’est pas un néant de fait, les faits sont là, le pichet de rosé repose sur la table, et le « double blanc-cassis » ; la serveuse fait son travail, mais tout cela, tout ce qui est, et se présente, tout manque d’intérêt, tout manque de sens, et rien n’a de valeur, rien n’a de saveur. Néant du sens. Néant de valeur. Absurdité du vécu. La saveur de vivre a disparu. Pourtant, elle « lui jetait au visage des salières d’amour », la serveuse en chair et en décolleté. Elle tente bien de lui faire convoiter les délices de l’amour, se présente comme promesse des plaisirs voluptueux, évoque par sa présence même dans les profondeurs de son décolleté ce qui fait le ‘sel’ de la vie, ce qui l’assaisonne et lui donne du goût. Peine perdue, le goût de vivre, il ne l’a plus. à treize heures zéro cinq venaient la cigarette Le raclement de gorge et le verre de calva Sa vie est réglée, comme une mécanique de précision Homme machinal, sa vie est entrée dans une mécanique. Mais c’est une machine qui ne produit rien, nul désir, machine qui fonctionne à vide, au rien, « moulin » qui tourne à vide, et ne produit rien, sinon la passivité de la triste et morne perpétuation de la machine improductive. Il se lève. Le voilà reparti, mais : il emportait toujours le paquet d’allumettes Et fourrait dans sa poche le bout de chocolat Qu’on offrait gracieusement avec le café » Il emporte avec lui le morceau de chocolat. Il lui resterait donc encore un espoir, une mince espérance enrobée de chocolat symbolique. Pas même objet d’un plaisir différé, dans la certitude d’être plus tard dégusté, le chocolat : « il ne le mangeait pas » Mais peut-être l’envie lui en viendra-t-il. Peut-être espère-t-il encore que l’envie revienne. Et que la vie encore aura un goût de chocolat. Qu’il pourra peut-être, qui sait ? croquer la vie à pleines dents. Et ces allumettes qu’il emporte, elles aussi, lui donneront peut-être la flamme qui lui manque, le feu qu’il a perdu. Espoir-chocolat, mais ce n’est pas ainsi que le titre du poème le désigne, il le nomme : « espoir cacao ». Chocolat ou cacao : n’est-ce pas synonyme ? Le nom importe, dans sa signifiance. « Cacao », comme pour « Nihildra », il faut être à l’écoute. Et ce que l’on entend dans « cacao », c’est une part de « chaos ». Cet homme, dont la vie est devenue une mécanique bien réglée, très ordonnée, il emporte avec lui l’espoir d’un petit bout de chaos, la petite entorse au quotidien, une ‘petite folie’, ce petit dérèglement dans la ligne du néant, cette petite déviation dans le cours des choses si bien réglé, un clinamen qui viendra perturber la mécanique, introduira un jeu en elle, où le néant ne sera pas nécessairement gagnant. Voilà, l’homme est parti, le chocolat avec papier doré dans la poche. Il reviendra demain. |
Marite
11/12/2022
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Admirable portrait esquissé par une succession de traits précis posant le personnage et son attitude. Chaque vers apporte un détail si bien présenté qu'il serait possible de croquer la scène sur le vif :
- l'apparence physique globale dans les trois premiers vers ... le journal ... la terrasse ... le blanc-cassis ... le pichet de rosé ... la serveuse ... etc ... etc |