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Poésie libre
Pouet : Un simple grain de sable
 Publié le 13/09/23  -  17 commentaires  -  673 caractères  -  489 lectures    Autres textes du même auteur


Un simple grain de sable



acharnés

à traquer
des boussoles de peau
dans des meules de faim

à se servir de fourches
pour cribler les nuages
et surprendre la pluie

à tremper nos sursis
dans l'espoir qui aura
séché bien avant l'aube

emmurés d'éphémère
nous murmurons la vie

en totems de chair
aux couleurs de l'orage

en errants fabriqués
dans du papier à lettre
pour qui les mots
ne jouent
qu'un rôle secondaire

des humains
de hasard
de soleil et de temps

et notre monde
rien

qu'un simple grain de sable


 
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   Eki   
29/8/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
J'imaginais un tableau surréaliste.
Tout d'abord, surprise par ces meules de faim...insolites !
Enfin, rien qui ne déroute à poursuivre la lecture.

Les images se succèdent avec une certaine poésie.
L'auteur nous plonge presque dans le néant.
On suit le chemin qu'il nous a tracé après ce cataclysme (c'est ce que je ressens).
Une forme de désespérance est aussi très présente sans bavures de noir.
Et la petitesse du monde comme un grain de sable.

C'est comme un mystère, une énigme qui insuffle sa dernière respiration. C'est un sentiment que j'éprouve, qui m'a plu ici.

Ce n'est pas vrai que les mots jouent le second rôle...

Eki dans le sablier

   Jemabi   
31/8/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Beaucoup d'images fortes dans ce poème, qui frappent le lecteur comme autant d'uppercut. Impression renforcée par la répétition en début de chaque strophe de "à" puis de "en". Les trois premières strophes, notamment, m'ont parues particulièrement belles et puissantes. C'est un poème désespéré au service d'une écriture ciselée, une poésie libre dans le bon sens du terme. On en dit assez pour qu'une émotion s'en dégage, mais on sait n'en pas dire trop, ce qui gâcherait le mystère. C'est le propre d'un grande plume que de savoir saisir, en quelques mots bien sentis, la vanité de l'homme en même temps que sa petitesse dans l'univers.

   Donaldo75   
5/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Du libre de chez libéré, voici ce que je viens de lire et de relire et de lire encore ; les images via les formules déclinées dans ces vers ne pèsent pas des tonnes, ne mélangent pas le signifiant et le signifié dans un mic-mac intellectualisant comme je l’ai lu ailleurs. Non. Ici, les mots s’imbriquent dans ma lecture, naturellement, même si le sens ne me saute pas immédiatement au neurone. Et c’est tant mieux parce que mes neurones vont bien merci pour eux et ne cherchent pas à lire de la poésie IKEA montée en kit à coups de clé de douze. C’est presque psychédélique, le mal de crâne en moins. Et les vers de fin permettent la descente d’acide, le retour du sens et la réconciliation entre hémisphères droit et gauche.

   Eskisse   
5/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
C'est cette sobriété dans le choix des images qui fait l'harmonie du poème. Et pourtant elles foisonnent à chaque strophe mais sans effort ou recherche ostentatoire comme si elles ne voulaient pas paraître prétentieuses. Humbles, à l'image du grain de sable, elles créent l'émotion dans nos coeurs de lecteurs, désabusés eux aussi. Et le poème est à lui seul un recueillement : on s'abstrait du monde extérieur pour lire en nous. Il invite à une méditation. Du grand art.

   Cyrill   
6/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Je m’inclus très volontiers dans ce nous acharné qui cependant ne fait que murmurer.
Oui, mais ne murmure que de l’essentiel, et je ne lis ici que des mots justes et surtout rien de superflu. Le poème semble tenir dans un équilibre qu’un seul mot pourrait compromettre, même ceux jouant un rôle secondaire.
J’ai l’impression que l’auteur retient sa respiration et que nous sommes invités à faire de même, que chaque groupe de vers est suspendu à l’écoute avec une infinie prudence, je me le représente comme du linge blanc sur une corde à linge, séchant au vent et à la lumière. C’est simple et beau, voulais-je dire plus simplement.

   papipoete   
13/9/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
bonjour Pouet ( le retour )
Il suffirait de presque rien, pour que notre planète pas plate, ressemble à cause de tous ses pilleurs pollueurs affameurs pétroliers et autres mangeurs de glaçons en plein mois d'Aout, ses pistes de ski au Qatar, son mercure dans le fleuve Amazone... à un tout petit grain de sable, tel celui du Sahara dont on ne peut rien faire !
NB je ne sais traduire la poésie de notre Onirien fort capé, mais je comprend que notre Terre n'est point ici, sujet à contemplation.
La strophe " à se servir de fourches... " a ma préférence.

   Provencao   
13/9/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour Pouet,


"en errants fabriqués
dans du papier à lettre
pour qui les mots
ne jouent
qu'un rôle secondaire"

À côté de ces errants fabriqués , j'aime la rapidité de l’imagination de ces mots... un joli grain de sable qui devient cohérence , allure,  appréciation ; il amasse, il surprend, il remue, il atteint, il sépare, il fusionne , il irise comme il lui plaît. 


Au plaisir de vous lire
Cordialement

   Luz   
13/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonsoir Pouet,

J'ai tout compris (je crois), à ma façon.
C'est vrai qu'à échelle de l'Univers, la Terre et même notre galaxie n'est qu'un grain de sable et pourtant on s'acharne "à traquer des boussoles de peau dans des meules de faim" et plein de petites autres choses...
Poème magnifique que j'aurais bien aimé écrire...
"des humains de hasard de soleil et de temps" : et rien que de pouvoir penser cela, n'est-ce pas un pur miracle ou quelque chose comme ça ?
Le poème serait même peut-être encore plus fort, à mon avis, avec un alignement de phrases, plutôt que de les hacher... mais à chacun son hachoir.
Bravo !
Luz

   Vincente   
14/9/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Ce poème comme un grain de sable dans notre quotidien…
Il y joue son rôle avec vaillance, assume de ne pas se laisser aller au superfétatoire, à la grandiloquence, ou aux excès d'une hypersensibilité tapageuse, mais bien à la modestie de sa poésie simple, dépouillée, décalée (comme dans ce passage "à traquer / des boussoles de peau / dans des meules de faim" si peu littéral ; il m'a peu parlé d'ailleurs ce passage, je ne le retiendrai que comme une argument destiné à retranscrire quelque rugosité dans la difficulté du sujet), et très impliquée dans l'éphémère de notre condition, petite, élémentaire, dans laquelle nous errons contenus dans les murs de grains des sables agglomérés de notre passé…

La strophe centrale tient en équilibre le propos, là est son centre de gravité, elle est à la fois exceptionnelle et très humble, je la trouve excellente de puissance et de justesse malgré, ou plutôt grâce à sa pertinente concision. Très inspirée.

"emmurés d'éphémère
Nous murmurons la vie
"

Les murs de l'éphémère qui résonnent au travers de la parlance de notre vie, de nos vies… La contenance de notre environnement (physiologique, social, historique, environnemental) au service de la perduration de l'espèce. Par et depuis les grains de tout ceci, nous sommes et existons.

Mais j'ai été moins "accroché" par le reste de l'expression, plus "linéaire" pour ce registre, peut-être simplement plus modeste d'ailleurs, à l'instar de l'angle du sujet évoqué.

Faut-il aussi voir dans ces vers un entrebâillement ouvert sur le futur ? Comprendre que les murs de l'éphémère retiennent, protègent autant qu'ils invitent à vivre, dans le présent très instantané mais aussi dans sa conséquence la plus directe, l'advenue d'un futur imminent et court ; trop court peut-être ?

   Marite   
15/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
" emmurés d'éphémère
nous murmurons la vie "
ce sont les vers qui m'ont le plus séduite dans ce poème. En fait, ils précisent le sens de l'ensemble. Chaque strophe fait naître des images liées à nos réalités actuelles mais telles qu'elles nous sont offertes je trouve que c'est une expression poétique d'une belle subtilité.

   Louis   
14/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Le poème tente de cerner certains aspects essentiels de la condition humaine.
Le premier trait spécifique de l’homme, l'acharnement, constitue aussi le premier mot du texte :

« acharnés »

Ainsi sommes-nous : "acharnés".
Isolé, détaché de tout autre syntagme, placé en tête du poème, le terme a son importance.
Il est un concentré, un condensé ; un point aussi de forte densité. Il enveloppe en lui nombre de pensées et sensations.
Loin de constituer un mot vide et creux, il est au contraire un trop plein, qui ne pourra que se déverser dans la suite en expressions variées, imagées et méditatives, pour en dérouler le contenu dans l’explicite.

« Acharnés » : le mot saisit l’essence même de la vie humaine, en ce qu’il indique une répétition, un perpétuel retour, une persévérance qui la caractérisent. Essentiel, l' effort entêté pour persévérer dans l’existence, nous définit.
'"Acharnés" : le mot encore renvoie par sa construction à la « chair », et donc à une dimension corporelle.
Les deux acceptions se conjuguent, l’idée est alors celle d’une persévérance dans la chair.
Ainsi, avant tout, sommes-nous corporels, des êtres matériels, avant d’être « esprits », cet « esprit » que l’on oppose traditionnellement à la « chair », mais, dans le poème, il sera porté par le langage, par la « lettre ».
De "chair" ou "charnel" ne constitue pas ici un attribut passif de l’humain, mais un dynamisme, une puissance, une énergie qui le caractérise.
Les verbes qui introduisent les strophes suivantes : « à traquer », « à se servir », « à tremper » explicitent cet effort, ce mouvement, cette mise en acte.

« À traquer » : une construction semblable phonétiquement à celle de « acharnés » ; rétrospectivement « acharné » s’entend alors : à mettre en chair.
L’acharnement s’explicite dans une ‘traque’ :

« à traquer
Des boussoles de peau
Dans des meules de faim »

La chair, c’est déjà la « peau » : cette peau que l’on veut sauver.
La peau fait office de « boussole », elle donne le nord, elle oriente, elle dirige notre quête, notre recherche acharnée.
Tout est fait dans la vie pour conserver sa peau, pour perpétuer notre être de chair.
Les « meules » rassemblent en « tas » tous les appétits, tous les besoins, tous les désirs. L’image de la « meule » constitue un nouveau concentré de sens.
Tous ces appétits et toutes ces soifs sont orientés, par la peau-boussole, vers la conservation de la chair.
Faim est mis en place de « foin ». La condition humaine ordinaire ne serait-elle guère différente de celle des ruminants ?

La pensée, dans ce poème, saute, elle ne traîne pas, ne s’appesantit pas, ne se prélasse pas, pas même dans le « foin », elle vole ( tout le contraire de ce commentaire ) :
« Va pensiero » sur tes "ailes dorées" : la pensée ici s’accélère et bondit, sur le ressort des mots.
Elle passe par la « pluie » recherchée pour satisfaire notre faim, et aussi cette eau du ciel des espérances.
Nous y trempons nos « sursis ». Et la pensée se pose sur ce fil du mot : « sursis », de haute densité. Une « meule » encore ; une contraction de sens :

« à tremper nos sursis
dans l’espoir
qui aura séché avant l’aube »

« Sursis » enveloppe, en effet, l’idée que nous sommes tous condamnés, par notre finitude, à une mort certaine. Condamnés à mort, mais "en sursis".
En sursis, grâce à l’effort acharné ; du fait de notre « acharnement ».
En sursis, et transis d’espérances.
Nous espérons l’immortalité, et nous rêvons d’éternité.
Nos espoirs, vite séchés, vite à sec, sont essorés, dès avant « l’aube » ;
avant même la pleine lumière de la lucidité, le rêve déjà perdu.

En sursis, nous sommes en attente d’une condamnation, dont l’exécution ne peut être indéfiniment reportée.
La vie est enclose entre des limites, et malgré nos efforts "acharnés", nous n’échapperons pas à notre condition éphémère. Ainsi sommes-nous :

« emmurés d’éphémère »

Prisonniers de limites temporelles indépassables. Prisonniers de l’éphémère, sans pouvoir jamais "faire le mur". Nous n’habitons pas l’infini.
Incapables de surmonter les murs de l’éphémère,
« nous murmurons la vie »,
nous la mur-murons.
Au lieu de l’affirmer avec éclat, nous créons d’autres murs, nous doublons les murs qui nous enserrent, par des contraintes nouvelles, par des limites à notre pouvoir de dire, au sens d’affirmer la vie.
Il nous faut mûrir, et ne voudrions pas mourir.
La vie se chuchote avec acharnement, en ton mineur.

Nous demeurons dans le murmure de l'existence, ainsi :
en « totems de chair ».
Pas de bois, de chair. Et la chair encore, toujours, reste l’idole vénérée.

Nous, acharnés, entêtés, mais têtes sans esprit, têtes de bois, totems de chair et de sang,
nous prenons les « couleurs de l’orage »
Nous, toujours en eau et en rage, enragés d’une vie au rabais,
Nous, foncés des couleurs de tourmentes, sans la claire sérénité des dieux

Nous sommes paradoxaux :

« errants fabriqués
dans du papier à lettre
pour qui les mots
ne jouent
qu’un rôle secondaire »

Nous nous « acharnons », alors que « la lettre » est la texture de laquelle nous sommes faits, mais aux mots, nous n’accordons qu’une place mineure.
Nous sommes de chair et de mots. Mais trop en chair.
Et pourtant papiers fragiles, papiers errants, papiers des mur-mures enveloppés, alors que les mots, porteurs de pensées, peuvent fissurer les cloisons, ouvrir les horizons.

Notre condition se ramène à :

des humains
de hasard
de soleil et de temps.

Des êtres dérisoires, mais constitués d'éléments qui nous dépassent de la nature éternelle et infinie, le hasard lui-même, et le soleil et le temps en font partie.
Nous n’habitons pas, il est vrai, l’infini, mais un « monde » très limité, « un grain de sable ». Dans ses limites indépassables. Et pourtant nous nous « acharnons ». Quelle absurdité !
Nous avons un grain. Quelle folie !

Il y a pourtant les mots pour le penser, les mots qui déjà se sont évadés vers l’infini, pour ainsi pouvoir nommer le fini. Ces mots qui nous sont si chers, quand nous ne négligeons pas cette dimension, autre que la chair, dont nous sommes aussi constitués.

Merci Pouet pour ce beau texte, dont je n’ai proposé évidemment, qu’une des lectures possibles.

   Cristale   
16/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Très beau !

Bonjour Pouet,

Ce poème contient l'essence même de l'existence en quelques mots et images surréalistes dans une écriture si fidèle à la plume de l'auteur.

Fluidité, légèreté de l'expression, présentation aérée, et pourtant si lourd sujet pétri d'une réalité que la conscience préfère ignorer.

Cristale
qui se sent maintenant plus petite qu'un electron

   EtienneNorvins   
16/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Merci Pouet pour ces "image du monde flottant" qui filent les trouvailles en travaillant les mots, et disent avec bonheur les malheurs de l'écart entre nos élans et nos sauts...

   Lariviere   
18/9/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Salut Pouet,

"La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil" disait rené char

c'est ce que tu nous rappelles avec ce texte saupoudré d'un léger fatalisme qui donne le ton. Oui notre monde n'est qu'un simple grain de sable "emmuré d'éphémère" qui se promène errant au gré du vent tenace et de la folie des hommes par monts et par vaux...

La forme, épurée, douce, tranquille épouse bien le thème et l'assoit dans une vérité immuable.

Merci pour cette lecture et au plaisir de te lire

   Ascar   
24/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Vous semez des mots à l'instar du petit Poucet avec ses petits cailloux blancs. Du coup, on vous suit à la trace pour s'apercevoir que la maison vers laquelle nous retournons est... le Néant.
Les associations de mots sont superbes et d'une grande subtilité. Vraiment j'ai adoré vous lire. C'est un texte qui sort du lot.

Bravo

   Ombhre   
26/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pouet,

un beau texte, presque violent, en tout cas haché, avec des strophes qui viennent comme des boulets, et prennent pour cible notre humanité éphémère.
Beaucoup de belles images, surprenantes parfois, mais qui font mouche.
Je l'ai relu plusieurs fois, et l'ai savouré à chaque lecture.

Merci pour ce beau partage.
Ombhre

   Catelena   
3/10/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Pouet, les mots ne jouent pas qu'un rôle secondaire, ils sont vitaux pour qui aime les triturer, les malaxer, les pétrir, pour tenter d'en remplir quelques points d'interrogations lancinants... Mais tout ça, tu le sais aussi bien que moi, toi, le poète romantique qui habille la réalité d'un voile flirtant avec l'irréel, comme pour mieux la travestir à ta convenance.

Les tableaux forts qui émaillent ton poème, tels des uppercuts à boulets rougis de feu et de sang, ont atteint leur cible en plein cœur, tout doucement...

J'aime bien ''Les emmurés d'éphémère'' et leurs effets mère


Cat (Elena)
aux murs de sable


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