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Poésie en prose
Raoul : Ce que nous entendîmes
 Publié le 07/04/23  -  8 commentaires  -  1978 caractères  -  101 lectures    Autres textes du même auteur


Ce que nous entendîmes



La nuit peuplée d'étoiles murmurait de bestioles.

Notes :
À cinq secondes de l'été, nous partîmes. Il faisait bon, une faucille de lune nous surprit au détour d'une espèce de bosquet coupant et sec. Des buissons ronds couraient à nos côtés, poussés par une brise entêtante et cendrée. Du sable nous cinglait. Des roches noires, massives, posées çà et là comme dans un jardin zen, semblaient être d'une autre planète et nous suivre car jamais, nous ne parvînmes à nous en éloigner.

On se sentait observés par ces tumuli et monolithes, boursouflés de hasards en brocolis, et de pierres ponces calcinées vibrant sous le ciel quand chiens et loups s'époumonent.
On se sentait scrutés. Il se dégageait d'elles une force étrange, comme si elles étaient prêtes à enfanter d'une nuit des temps, d'un amas cosmique grelottant ou de filons d'or.
On s'attendait aussi à croiser quelque reptile, ou la terrible Tarasque du conte, digérant, mais il n'en fut rien ; seule une gerbille vigilante nous regarda passer sans donner l'alerte. Elle fut aussi surprise que nous lorsque tomba l'averse de criquets, stridente et drue.
Le sable s'écroulait à chaque pas, poussière, tu retourneras poussière, et personne n'osa se retourner, craignant confusément d'être figé en pierre.
Peut-être était-ce le vent, ces soupirs, peut-être était-ce une rivière de lave, ce grondement, peut-être était-ce un dragon ayant fugué de sa lointaine ville, ou une eau jaillissant d'un Trou du Diable… Chacun l'entendait à sa façon, on perçut même un va crever guttural venu d'éboulis sans bouche ni gueule.
L'avions-nous seulement entendu… ?

Quelque part, dans l'aine d'une prairie sèche, se cachait une lumière qui vacille, protégée du vent par une main, une étincelle, une conscience ou bien même une âme.
Les formes pétrifiées se muaient en sonnailles pour qui savait écouter ces acouphènes et leurs mirages.
Le chemin était sans terminus.


 
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   EtienneNorvins   
25/3/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Je me suis laissé emporter par cette déambulation onirique et sans but, dont la logique défie la géographie (on passe du Japon zen, à des monolithes sonnant breton, une Tarasque de Provence, un Trou du Diable vendéen - à moins que ce ne soit quelque Souffleur de l'Océan indien ?) : il faut donc conclure que c'est un vagabondage global, universel ?

Il y a une menace permanente qui demeure invisible, de même qu'un espoir qui semble inatteignable, et n'est peut être qu'une illusion (acouphènes / mirages).

Et le tout baigne dans une étrange musique, où chiens et loups s'époumonent, où les criquets sont stridents - alors qu'il n'y a ni bouche ni gueule...

Il semble qu'on pourrait continuer ici indéfiniment ("sans terminus") si l' rappel n'avait sonné que nous sommes mortels ("poussière, tu retourneras poussière, et personne n'osa se retourner").

Il y aurait simplement quelques ajustements orthographiques à faire (d'être figer en pierre / on perçu même...)

[EL]

   Castelmore   
25/3/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
aime bien
Un voyage ? Une traversée ? Une vie … au terminus incertain ?
à travers des contrées arides voire désertiques peuplées autant d’animaux peu sympathiques comme de visions ou de sons peu rassurants…
l’expression poétique est là … qui nous environne, nous surprend … parfois nous presse …
« Peut-être était-ce le vent, ces soupirs, peut-être était-ce une rivière de lave, ce grondement, peut-être était-ce un dragon ayant fugué de sa lointaine ville, ou une eau jaillissant d'un Trou du Diable... Chacun l'entendait à sa façon, on perçu même un va crever guttural venu d'éboulis sans bouche ni gueule… »
De très beaux moments dans un texte qui mériterait selon moi d’être retravaillé autour d’une écriture plus resserrée .
Castelmore en EL

   papipoete   
26/3/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
prose
à quelque temps du départ de l'été, des grondements venus de nulle part ; on s'attendait à être ensevelis sous des nuées de bestioles, qui grattaient le fond de nos oreilles ; on allait mourir comme à Pompéi...
NB comme un cauchemar qui ne veut finir, la " chose " est là, qui ne se montre pas, va nous anéantir... mais le chemin déroule son bitume, nous faisons le tour de la Terre ?
de l'angoisse à souhait, qui dans l'avenir pourrait au contraire se montrer de bon augure... comme un nuage de criquets, des milliards de criquets ; enfin de quoi manger !
papipoète

   Anonyme   
7/4/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
La nuit peuplée d'étoiles murmurait de bestioles.
Je trouve cette amorce un poil maladroite à cause de la construction parallèle ("peuplée de...", "murmure de...") qui, pour moi, fait ressortir une certaine banalité du propos. La nuit étoilée, les bestioles qui font du bruit, bon. Cela dit, j'admets que cette simple phrase installe tout de suite les choses.

Les notes me font voyager, je suis contente ; il y a de l'insolite, j'aime particulièrement les pierres ponces calcinées, le minéral qui parle et dont on a du mal à discerner les paroles. Un bémol sur les buissons ronds qui courent, image quand même beaucoup employée pour évoquer le désert et la solitude, et l'averse de criquets ; du reste ces deux évocations qui m'apparaissent un peu convenues me font sortir du règne exclusif du minéral : peut-être est-ce aussi pour cela que je les estime détonnantes dans le paysage.

   Robot   
7/4/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Une poésie de l'angoisse qui peut nous prendre quand l'imagination donne aux perceptions cet aspect de mystère.
L'impression de s'être engagé sur un long chemin dont on ne discerne plus le commencement et dont on ne conçoit pas la fin. Les choses les plus naturelles se transforment en visions, en sons, en imaginaires effrayants comme la traversée d'un univers hanté.
Et tout celà nous apporte une prose poétique dans laquelle on plonge presque malgré soi.

   papipoete   
7/4/2023
bonjour Raoul
" vous avez entendu ? surtout, ne vous retournez pas, avancez et baissez le regard si vous croisez le leur..."
Autour de nous, nulle vie mais ça bouge de partout ; des milliers d'yeux semblent nous regarder, et la Tarasque sa respiration...
NB une odyssée sans monstres effrayants, mais peuplée d'impressions terrifiantes ; même nos pas semblent marcher sur " la chose " ;
un mélange de cauchemar, et de western dans une ville aux boules de pailles qui roulent, et ce silence qui ne cesse de chuchoter.
Belle ambiance pour s'apprêter à dormir...
la strophe du " va crever... " est celle que je préfère
édit DOUBLON

   Edgard   
7/4/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
Un groupe avance, dans un paysage qui tient autant du rêve que de la réalité. Soit. Mais j'aurais aimé un choix entre le minéral, l'immobile (les meilleures descriptions à mon humble avis) et le mobile. Je lis cela comme des contradictions, même si l'onirique est de la partie.
" Il faisait bon, une faucille de lune nous surprit au détour d'une espèce de bosquet coupant et sec. Des buissons ronds couraient à nos côtés, poussés par une brise entêtante et cendrée. Du sable nous cinglait. Des roches noires, massives, posées çà et là comme dans un jardin zen, semblaient être d'une autre planète et nous suivre car jamais, nous ne parvînmes à nous en éloigner."
Des bestioles par milliers...La lune, le bosquet...puis des buissons qui courent, poussés par la brise..., puis de nouveau des roches noires massives...dans un jardin zen (immobile), puis "le sable qui cingle" ...donc vent fort. L'image des roches, toujours pareilles, qui suivent les marcheurs est intéressante, mais dans toute cette confusion, elles sont un peu noyées.Dommage.
Il se pourrait qu'on soit, mentalement ou physiquement dans un autre monde,ou dans un état second, mais il y a une telle profusion d'éléments contradictoires (la lave, le sable, les criquets, les dragons...) qu'on s'y perd un peu.
On a du mal à choisir: une balade après une omelette aux champignons XXL ou une autre planète. Dans le premier cas, on pourrait y aller à fond, et les "rencontres" surréelles sont un peu ternes, dans le second cas ça manque un peu de cohérence. On reste entre les deux et c'est ce qui me laisse un peu sur ma faim.

   Pouet   
9/4/2023
Slt,

je ne sais pas pourquoi j'ai lu que "la nuit (que je dépeuple) murmurait des bestioles", sans doute ce que je voulais entendre, ce "S" sinuant le sens.
Dans l'ensemble, j'ai moins perçu que de "ceux que nous observâmes", j'ai peut-être les tympans siphonnés ceci étant.
Après, à quoi ça tient, je sais pas trop, à une intonation, une accointance, un temps plus ou moins mort, le détour d'un regard ou d'un brocoli.
Je sais pas trop que j'vous dis.


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