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Poésie libre
Raoul : Le Diable et moi
 Publié le 09/07/14  -  16 commentaires  -  1060 caractères  -  336 lectures    Autres textes du même auteur

Avec ou sans un pacte.


Le Diable et moi



Tôt ce matin un grand gars a griffé ma porte
Salut Satan c’est l’heure c’est ça
T’as tout compris mec On y va

On est partis par les ballasts et les talus
pleins de cœurs désolés dans l’herbe

et ma poitrine cette jachère
bien accoutrée dans son cache sanglé poussière
souffle sa quinte de phtisie
d’une buée qui s’empourrit

Je n’ai pas croisé un regard même entendu

À ta fenêtre un terrain vague
donne le sein au petit nous
et des silhouettes frôlent les murs de leurs murmures
là où commercent les poussières
où l’on se grippe à l’engrenage

Sa pogne m’a poussé dans le dos en grinçant
Diable n’est pas un grand bavard

Faut pas être un sentimental

On est passés par l’ironie et le cimetière
c’est là qu’il m’a descendu comme
un passereau à la vingt-deux

Et la vie s’est d’un coup rompue tournant de l’œil
mais de la même et ses verrues
je voudrais une autre embrassade


 
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   Anonyme   
12/6/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Simplement adoré.

Au point de n'oser aucun commentaire sur le style tant celui-ci est personnel et "affirmé".
Un poète qui sait discerner "la" poésie en lui.
Laquelle ?
Celle de notre propre sensibilité.
Bravo surtout, merci ensuite.

   Anonyme   
19/6/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Je suis un peu mitigée. Je trouve dans ce poème (dont j'adore l'idée de base) des choses pour moi absolument superbes :
On est parti par les ballasts et les talus
Je n’ai pas croisé un regard même entendu
tout le dernier tercet, et surtout cet admirable
On est passé par l’ironie et le cimetière

... mais à côté de cela il y a des moments un peu trop bavards à mon goût, qui selon moi nuisent au mouvement sec et sardonique de l'ensemble :
souffle sa quinte de phtisie
d’une buée qui s’empourrit (trop précieux, ce s"empourprit", même s'il se veut parodique)
et des silhouettes frôlent les murs de leurs murmures
là où commercent les poussières
où l’on se grippe à l’engrenage (même type de remarque : les silhouettes qui frôlent les murs de leurs murmures vont à l'encontre complet, je trouve, du "Faut pas être un sentimental")

En gros, je reprocherai à ce poème de ne pas aller au bout de sa logique, de son grinçant, et de se laisser aller par endroits au "joli-poétique", ce qui n'est pas du tout l'ambiance.

Dommage, parce que sinon, Satan en grand gars grinçant, c'est trop la classe !

   Pimpette   
9/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Excellent!
Une ironie coulée dans un sujet grave et surtout, un style personnel,inimitable....précieux ça!

La dernière strophe en particulier m'a plu avec ce salut modeste et courageux à notre chienne de vie qui vaut la peine quand même!

On pense à Malraux:
"Une vie ne vaut rien mais rien ne vaut une vie"

Le diable aussi, dans son cache poussière, ressemble à un personnage des films de Sergio Leone!

la poésie est là, elle aime ce genre de petits textes singuliers!

   Anonyme   
9/7/2014
Bonjour Raoul

C'est donc un défunt qui s'exprime. Bien.

Outre le sujet (qui sort du ronron poétique), j'apprécie vivement le ton de ce texte (qui en sort tout autant)

Ce n'est pas la faucheuse qui vient chercher le narrateur, mais carrément le diable.
Si on en est à court-circuiter les intermédiaires, la crise doit aussi sévir en enfer

Le narrateur l'a mauvaise (on le comprend) et aimerait bien s'offrir un petit rabiot d'existence, même avec des verrues.

Cool Raoul ! J'ai bien aimé ton poème.

   Francis   
9/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Ultime voyage, dernier regard sans complaisance sur un monde à l'agonie. Le temps semble compté même pour le diable imperméable à toute émotion. Dans ce couloir de la mort, le condamné s'aperçoit que rien ne vaut la vie en dépit de ses nombreuses imperfections.
Texte original que j'ai apprécié.

   Anonyme   
10/7/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Raoul,

Déjà la mise en scène et le décor j'aime beaucoup, surtout quand ils sont peints d'images décalées aux accents cyniques bien rodés:

"On est passés par l’ironie et le cimetière"

Ça c'est une image qui claque.

En revanche j'aurais aimé un peu plus de fluidité, ça accroche presque partout. Mais plus je fais ce genre de reproche et plus je me dis que même le rythme, si il n'est pas parfait, pourrait signifier quelque chose. Malgré tout c'est un peu désagréable à la lecture.

Je n'aime pas du tout ce vers de la dernière strophe:

"mais de la même et ses verrues"

ça ne me parle pas.

Comme un film de gangster avec le diable en rôle de mafieux entraînant sa victime souffrant d'une phtisie.
Votre poème est vivant car j'entends les bruits:
"a griffé ma porte", "souffle sa quinte de phtisie", "des silhouettes frôlent les murs de leurs murmures".

Mais aussi je le répète, de par son décor avec sa touche de personnalité: sombre et poussiéreuse.
Merci pour la balade.

   Arielle   
9/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un ton inimitable pour sauter en marche de ce train de vie "On est partis par les ballasts et les talus" en compagnie de ce grand gars taiseux et pas sentimental …
La mort au masculin c’est assez rare en français pour être noté. Tout le texte fourmille d’ailleurs d’images originales qui se télescopent et offrent un théâtre neuf pour un sujet aussi rebattu. Le commerce des poussières, le passage obligé par l’ironie et le cimetière et surtout ce superbe tercet final autour de la vie et de ses verrues …
Vraiment savoureux.

   Anonyme   
9/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'aime beaucoup l'ambiance western qui ressort de ce poème et son petit coté couloir de la mort.
J'imagine ici très bien Satan sous les traits de Sentenza avec en fond sonore le croassement d'un corbeau et en arrière plan un virevoltant qui traverse la rue.

Il y a ceci dit un coté très résigné qui fait assez froid dans le dos dans ce poème D'autant plus que le narrateur se fait abattre comme un chien.
Triste fin.

J'aime beaucoup : "où commercent les poussières"
"on est passés par l'ironie et le cimetière"

   Robot   
9/7/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un texte d'humour sombre raconté comme une promenade. L'approche est originale, quelques expressions bienvenues comme:
"et des silhouettes frôlent les murs de leurs murmures
là où commercent les poussières"
Le choix du libre non rimé convient bien à l'esprit du texte en permettant un vagabondage au travers des longueurs de vers afin de lui donner ce rythme d'errance.
Je n'ai pas saisi le sens de "Ma poitrine... dans son cache sanglé poussière" ???
Pourquoi aussi avoir utilisé deux fois le mot poussière qui doit bien avoir un synonyme ou se prêter à une image ?

   Anonyme   
10/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Là, c'est clair, on change de style ! Et ça fait du bien !
De belles images se dégagent, je pense notamment à ces vers-ci :

"On est passés par l’ironie et le cimetière
c’est là qu’il m’a descendu comme
un passereau à la vingt-deux"

Par contre, je reste un peu sur ma fin pour le dernier ver, qui selon moi sort un peu de ce style si bien mené durant toute la poésie...

En tout cas, bravo !

   Anonyme   
10/7/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Salut c'est TOTO

Qui ne voyait pas le diable avec une carabine mais plutôt avec des sucreries pour nous faire tomber dans ses pièges mais TOTO est malin, il le sait, lui, il ne tombe pas.
Des coeurs désolés dans l'herbe : attention en ramassant des champignons ou en cueillant des pissenlits.
TOTO aime bien la poitrine en jachère même si elle ne vaut pas celle du boucher ou de la boulangère.Allons, ne nous égarons pas, TOTO va encore se faire modérer.
TOTO n'a pas compris l'embrassade mais ce n'est pas grave.

   Louis   
10/7/2014
Satan se présente à la porte un matin.
Il ne frappe pas à la porte, il la « griffe ».
Est conservée cette représentation traditionnelle du diable en monstre griffu, mais c'est tout de même un « grand gars ». Un détail ancien de l'image de Satan est conservé ( les griffes ), mais associé à un aspect inhabituel « grand gars ». Le ton est ironique. Le caractère horrible de la visite matinale se trouve ainsi désamorcé.

Son langage, bien sûr, n'est pas châtié,  « T'as tout compris mec. On y va » ; Satan ne peut que parler un langage rude, sec, argotique, un langage direct, sans fioritures, et sans courtoisie. Satan, ça dit pas bonjour !

Le « moi » du texte, lui, a un accueil plus courtois : « Salut Satan ». Mais ne lui demande tout de même pas s'il se porte bien ! Le ton est familier avec le diable, comme si l'on recevait un vieil ami : « Salut ! ». Satan comme un vieux pote venu nous chercher pour une sortie, l'ultime et définitive sortie.
Il est d'ailleurs immédiatement reconnu lorsqu'il se présente à la porte, on ne s'interroge pas sur son identité. On ne se demande pas : qui est cet hideux machin qui vient griffer à ma porte ? Non, il est accueilli sans surprise. Comme s'il était attendu. Satan s'attend.
On ne croyait pas voir paraître un ange. Que ce soit le diable en personne ne surprend pas. Qu'il se présente « tôt le matin » non plus. On l'avait déjà compris, on le savait : « c'est l'heure c'est ça ». A l'aube, c'est ça ! l'heure du condamné à mort.

« On est partis par les ballasts et les talus »
Sur le sentier, non pas de la gloire, mais de la mort piteuse, on passe par des raccourcis, des « ballasts », les chemins de « traverses ». Ce n'est pas la grand route, plutôt une déroute.
On n'emprunte pas de doux chemins, mais des chemins « de fer ». Ne pas perdre de temps, il faut être à l'heure de sa mort.
Train d'enfer.
Le « moi » souffle comme une vieille locomotive à vapeur. Il souffle sa « quinte de phtisie ». La phtisie ? Cela surprend : cette maladie (la tuberculose) n'est plus très répandue aujourd'hui en France, c'est une pathologie dont on parlait beaucoup au début du siècle dernier, à l'époque des «sanatoriums », or Satan parle un langage d'aujourd'hui.
Cela s'accorde toutefois avec le moi qui souffle comme une vieille loco.
Et la vieille loco avec un contexte mécanique : « où l'on se grippe à l'engrenage » ; « Sa pogne m'a poussé dans le dos en grinçant ». Diabolus ex machina.

« Diable n'est pas un grand bavard » : la mort, ça va sans dire ; le langage diabolique se limite à quelques grincements.

Le chemin emprunté passe par « l'ironie et le cimetière » : joli zeugma ( ou peut-être un hendiadys ?)

C'est au cimetière que le « moi » est « descendu » : dans cet hôtel pour l'éternité ? Non, descendu comme un « passereau », volatile métaphorique dont le nom indique suffisamment que nous ne sommes dans cette vie que de passage. Satan se comporte comme un chasseur. Diaboliques chasseurs ! Il flingue de fragiles oiseaux en plein vol.

La distanciation prise tout au long du texte avec la mort, et son aspect diabolique et infernal, devrait conduire logiquement à ne rien regretter d'une vie qui n'en vaudrait pas la peine, or c'est l'inverse qui se produit, ce qui donne plus de force à l'idée : la vie, même si amère, on en reprendrait bien une rasade, on embrasserait bien une autre vie malgré ses « verrues ».

Le « moi » du texte est à la fois mort et vivant : c'est un mort-vivant qui se représente sa mort, dans une tentative de ne pas trop s'en affliger, mais qui finit par exprimer son attachement à la vie, malgré ses difficultés, ses douleurs et ses souffrances.
Un Oui à la vie, au final, malgré tout.

Les originalités du texte et son final en font un poème intéressant et émouvant.

   margueritec   
10/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'aime bien cette déambulation "diabolique" car le traitement de la mort prend ici une dimension poétique grâce aux images justes et originales ("griffé à ma porte", "ma poitrine cette jachère", "une buée qui s'empourrit", "le sein au petit nous ".

Le registre légèrement familier ("gars"," pogne", "il m'a descendu") donne à votre texte une certain désinvolture qui contrebalance l’âpreté du sujet.

Merci

   Raoul   
12/7/2014
Ventre Saint Gis !
13 commentaires, voilà qui porte bonheur…
Remerciements et saluts à bâton rompu bientôt dans le forum, rude la soif ;-)

   Cox   
12/7/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aime bien ! C'est bien écrit, c'est sans prétention et c'est drôle. Ta plume a du chien; elle intrigue elle intéresse, elle pousse à la lecture.
Par contre, l'histoire en elle-même est assez décevante, je dois dire. A la vue du style en tout cas on 'attend à quelque chose de plus piquant et inattendu.
N'empêche, ton cornu est classe, et le texte agréable a lire. Et quelques petites trouvailles symathiques dans les images

   MissNeko   
9/9/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J ai beaucoup aimé lire votre poème teinté d une pointe d humour.
J adore le début :
"Salut Satan c’est l’heure c’est ça
T’as tout compris mec On y va "

J ai aimé l'attelage dans ce vers "On est passés par l’ironie et le cimetière"

Une réussite


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