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Poésie contemporaine
romainT2 : Ce côté du rocher
 Publié le 18/06/22  -  7 commentaires  -  2929 caractères  -  94 lectures    Autres textes du même auteur

Cantate.


Ce côté du rocher



Je suis ce côté du rocher,
Où las, ne monte plus la vague,
Et puis ce sourire écorché,
Ah déjà, que la ride nargue.
Et ce mort que l'on traîne encor
Entre les plis tachés d'ivresse
De la cité du long remords,
Quand il faut soûler la tristesse.

Mais voilà que pêche le jour,
Qui lance les soleils aux lunes,
Balloté de rousseurs d'amours,
Je regrette ces îles brunes,

Là quand se cachait l'horizon,
Sous le pied de notre jeunesse,
Là, soûl, dans l'âge de raison,
Le cœur, gonflé de sa promesse.

Or voilà, déjà, vieux drapeau
Jeté dans le courant des anses,
Moi, dont la carcasse ivre d'eau,
Ne pêche que les médisances.

Je traverse une mer sans bord,
Au rire infini et amère
Qui se déroule sans effort,
Pour retrouver son éphémère.

Comme quand va un cœur de son pied d'éléphant,
Lourd et berçant ses pleurs du lit au cimetière,
À travers un ciel blanc, cynique et triomphant,
Au rire indifférent à sa pâle misère,
Je porte l'avenir dans ses ivoires blancs,
Cloué par le destin d'une main qui sent l'ombre.
Là, on perd les cheveux dans l'échine du temps,
On se meurt d'espérer le froid tunnel sombre !

De l'espoir, je suis la forêt,
Quand on brûle le dernier arbre,
On pensait trouver le secret,
En taillant l'horizon au sabre.
Depuis, tout soleil est bruyant
Et la moindre lune est jalouse,
On s'est perdu en s'enfuyant,
Vieille tristesse, mon épouse !

Du désir, je suis l'animal
Dont la gorge déjà fêlée
N'ameute que les loups du mal
Tant sa voix au sang est mêlée,

Comme ce long sanglot brumeux,
Que tinte la cloche enrhumée,
Qu'allument des vents capricieux,
Dans l'aube de crêpe embaumée !

Des regrets, je suis la saison,
Où ne poussent que des ronces,
Pas une rose à l'horizon,
Et neige après neige s'enfoncent
Les souvenirs de mon Printemps,
Qui faisaient l'été sur ta bouche,
C'est curieux qu'écorche le temps,
Au moindre soleil qui se couche.

Comme ce cri lointain qui fit perdre sa voix
À la lune sans pleurs et qui surprit l'espace,
J'entends déjà graver sur la table des lois
Le destin qui s'écrit : « Mais il n'a pas sa place,
Au festin de la vie, on est déjà complet. »
« Bon comme tu es là, tu seras la serviette »,
Criaient, se caressant mais sur un ton simplet,
Quelques sales couverts, qu'excitait la fourchette.

Quand ont-elles fané les neiges de ce temps ?
Et comment désormais inventer le Printemps ?

Qu'il est dur de passer l'hiver loin de ta bouche,
Et puis le dos boiteux s'enfoncer dans le vent !
Mais si l'avenir prend l'œil froid et farouche,
Est-ce mieux de mourir étant encor vivant ?


 
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   Anonyme   
3/6/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
En général j'apprécie qu'un poème ait une trajectoire nette, évite de ressasser son propos que, de même, je préfère clair ; aussi une longueur excessive m'est-elle souvent un obstacle à la lecture. Vos vers, je dois dire, prennent à rebrousse-poil mes goûts.
J'ai vraiment aimé votre poème qui creuse en litanie la même ornière, avec opiniâtreté, tel un laboureur fou de douleur qui, après avoir enterré sa femme, encore en costume attelle un bœuf à sa charrue et l'oblige à reprendre toujours le même sillon. Je crois que c'est l'intensité de l'expression qui me convainc, des trouvailles comme le jour qui lance les soleils aux lunes, le vieux drapeau jeté dans le courant des anses (aucune idée de ce que ça veut dire, n'importe, je suis émue), bien sûr la cloche enrhumée tellement parlante, je la vois dans sa brume !
Quelque chose d'halluciné dans cet opus, quand on en est à tailler l'horizon au sabre, me dis-je, ça ne doit pas aller bien fort.

Je suis sous le charme. Tout concourt pour moi à l'impact de l'expression, y compris l'abondance de qualificatifs qui d'ordinaire me rebute (le ciel blanc, cynique et triomphant, n'en jetez plus !) et les incertitudes du rythme, parce qu'il m'est absolument impossible de scander
On se meurt d'espérer le froid tunnel sombre !
Où ne poussent que des ronces,
Mais si l´avenir prend l´œil froid et farouche,
en octosyllabe et alexandrins, et que j'aime ces trébuchements ; le laboureur, en plus, a trop bu après l'enterrement. Il va bientôt s'effondrer ivre-mort dans le sillon dément creusé jusqu'à six pieds sous terre.

   Vilmon   
10/6/2022
 a aimé ce texte 
Pas
Bonjour,
Qu’est-ce cette cantate me raconte ou veut me dire ? Qu’il vaut mieux mourir que d’être éloigner de son amour ? J’ai tenté de comprendre la signification tout au long des vers et, alors que je croyais tenir en mes mains un fin fil de compréhension, il se dérobait au vers suivant. Désolé, les rimes sont là, je ne connais pas la structure pour une cantate, je n’ai pas réussi à apprécier car c’était incompréhensible pour moi.

   Provencao   
18/6/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour romain T2, et Bienvenue



"Quand ont-elles fané les neiges de ce temps ?
Et comment désormais inventer le Printemps ?"


J'ai lu plusieurs fois votre poésie, et le mot qui me vient est "hallucination" avec cette écriture qui se caractérise, selon moi, par l'etre-là immédiat de l'impression sensible,mais à condition que cette hallucination soit traitée comme "ce côté du rocher"de manière brute , qu'elle soit :

-visuelle: "Mais voilà que pêche le jour,
Qui lance les soleils aux lunes,
Balloté de rousseurs d'amours,
Je regrette ces îles brunes,"

-sonore:"Je traverse une mer sans bord,
Au rire infini et amère
Qui se déroule sans effort,
Pour retrouver son éphémère."

Je me suis perdue dans vos vers....et au fond, c'est ce que j'ai aimé

Au plaisir de vous lire
Cordialement

   Corto   
18/6/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Quel souffle !
Au fur et à mesure de ma lecture, rebondissant d'image en image, d'évocation en souvenir, je me suis senti brinqueballé dans les remous de ce texte qui n'hésite pas à défier le réel sans détourner les yeux devant le tragique.
Il y a de l'espoir, du regret, du présent, du passé et un futur déjà périmé.
J'ai applaudi à certains vers particulièrement évocateurs
"Je suis ce côté du rocher,
Où las, ne monte plus la vague"

ou "Moi, dont la carcasse ivre d'eau,
Ne pêche que les médisances"

ou bien sûr "De l'espoir, je suis la forêt,
Quand on brûle le dernier arbre"

mais il faudrait tout citer tellement l'ambiance du poème dresse un tableau aussi bien individuel que collectif, introspectif ou projectif "Comme quand va un cœur de son pied d'éléphant".

Le dernier vers conclue magnifiquement cette geste.

Un grand bravo
Corto.

   papipoete   
18/6/2022
bonjour romainT2
Sévère d'entrée, je vous avoue que la longueur de votre texte, dissuadera bien des lecteurs !
Surtout que " ce côté du rocher " fourmille d'images, de couleurs et douleurs, de pensées philosophiques ; aussi, risque-t-on de perdre en chemin l'idée maîtresse de votre cantate !
NB je remarque la recherche de rimes, tout du moins des assonances, qui peuvent justifier votre texte façon " poème " ; mais je pense qu'il put vu sa densité, faire l'objet d'un " récit poétique "
De très beaux vers, aussi je ne note pas pour l'ensemble !

   Cyrano   
18/6/2022
Tout cela m'est apparu comme un triste charabia, c'est à dire suivant la définition du mot : un langage incompréhensible, inintelligible, incorrect et déconcertant.



Or voilà, déjà, vieux drapeau
Jeté dans le courant des anses,
Moi, dont la carcasse ivre d'eau,
Ne pêche que les médisances.


Quel vieux drapeau et pourquoi déjà ?
Qu'est ce que c'est que le courant des anses ? (d'aisance ?)
Qu'est ce qu'une carcasse ivre d'eau ?
Et pourquoi étant ivre d'eau faut-il qu'elle ne pêche que les
médisances


Je traverse une mer sans bord,
Au rire infini et amère
Qui se déroule sans effort,
Pour retrouver son éphémère.

une mer sans bord ??? le propre d'une mer c'est d'en avoir
le rire infini et amère??? faut-il comprendre le bruit du ressac
!!!!!?????
J'en reste là.
La poésie ne se résume pas à des rimes .

   Cyrill   
18/6/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J’ai été emporté par ce poème et pourtant je dois dire que vous avez bien failli me perdre, à plusieurs reprises. Surtout au moment des premiers alexandrins, où j’ai l’impression d’entrer dans un second poème, voire plus. Mais les images ont une force qui m’ont maintenu à flot, bien que buvant la tasse régulièrement. Elles s’entourent d’un mystère qui ne faiblit pas.
Il se dégage de l’ensemble une grande puissance d’évocation, une passion jamais démentie. Si, comme semblent l’évoquer les derniers vers, ce long délire né d’un amour contrarié, alors c’est à n’en pas douter un bien bel amour.
Un bémol pour ces deux vers esseulés que je trouve bien en dessous du reste :
« Quand ont-elles fané les neiges de ce temps ?
Et comment désormais inventer le Printemps ? »


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