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Poésie en prose
SaintEmoi : Insomnie [Sélection GL]
 Publié le 08/07/22  -  7 commentaires  -  1237 caractères  -  101 lectures    Autres textes du même auteur

Nuit du 13 au 14 septembre 2012.


Insomnie [Sélection GL]



En ces heures tardives, alors que la lune gravit l’horizon ténébreux, je ressens mes semblables, ceux qui, comme moi, ancrés dans cette terrible solitude de l'insomnie, chavirent un peu plus chaque nuit.
Dans mon agitation, je froisse tant de livres, tant de mots, tant de lettres, qu’une langue entière se cogne à mon front.
Puis ma bouche s’ouvre béante sur le silence du corps.
Puis je ne bouge plus.
La nuit est noire.
Puis mon corps me revient.
Je passe une main sur ma joue, hissée d'une barbe de cinq jours, végétation sur un sol en jachère.
Je pense à me rendre à mon lit. Me lever, prendre ces escaliers pour coucher ce dos, ces bras, ces jambes.
Une force me tient là, en bas, loin de ce qui n'est plus un lit conjugal, loin de cette chambre qui ne s'abandonne qu'à mes odeurs.
Je sais que dans quelques minutes, j'y poserai le pas lourd de la résignation, je livrerai à ces draps les nœuds musculaires qui font de moi un corps tendu.
Le sommeil viendra ou ne viendra pas, mais à l'aube, à ces minutes tristes où la nuit perd ses secrets, je contemplerai le soleil qui se lève, ivre de cette fatigue qui me creuse, éveillé par la plus vitale des vertus, la patience.


 
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   Miguel   
23/6/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Le début est bien terne; la poésie à mon sens commence avec "Je pense à me rendre à mon lit". À partir de là, il y a de vraies trouvailles, des mots percutants, des images, ce corps comme distancié de son possesseur, ce lit comme vide, etc.

Miguel, en EL

   Anonyme   
29/6/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
je froisse tant de livres, tant de mots, tant de lettres, qu’une langue entière se cogne à mon front.
Bravo pour cette image, je la trouve saisissante !

D'une manière générale, selon moi vous parvenez en peu de mots à exprimer les affres d'un temps où le repos se montre à la fois indispensable et impossible. Une belle efficacité. Je regrette un peu que la cause de l'insomnie, le malheur conjugal du narrateur, soit identifiée, il me semble que du coup ce mal nocturne perd son statut de drame surplombant, existentiel, pour prendre un caractère contingent, circonstanciel. Mais c'est votre choix d'auteur ou d'autrice, rien à dire. Fort bonne clôture à mon avis.

   Queribus   
30/6/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Une belle réflexion sur cette maladie, hélas si répandue, l'insomnie, le tout rendu de façon très réaliste et poétique à la fois. Sur la forme, je reste plus dubitatif: pourquoi tous ces paragraphes d'une ligne alors que le texte, étant assez court aurait pu former un seul bloc. La répétition de trois "Puis" ne me semble pas du meilleur effet; par contre, j'ai bien apprécié: je passe, Je pense, Je sais.

En résumé, il me semble que votre texte devrait être repris sur quelques petits points pour le rendre tout à fait acceptable.

Bien à vous.

   Cyrill   
2/7/2022
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Chronique d’une insomnie. Rien ne me retient vraiment dans ce texte. La curiosité tout juste titillée par les détails des actes effectués et des pensées du narrateur, je n’ai pas vraiment mon content de poésie.
Je n’ai pas ressenti non plus les heures qui devraient passer très lentement ( selon mon expérience ) ni l’ivresse de la fatigue que le narrateur dit éprouver.
Je me dis que ce pourrait être le départ d’une nouvelle introspective, où le lit qui n’est plus conjugal serait abordé et développé.

   papipoete   
8/7/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
bonjour SaintEmoi
Je me tourne, me retourne... tu ne me bouscules pas puisque nous ne dormons plus au même lit.
Je songe, passe en revue des moments, des scènes disparues et ne me résigne pas, mais ce corps en silence trouvera-t-il un jour, le réveil...
NB dur dur de n'être plus ! même les " comme d'habitude " ont franchi cette chambre à " dormir seul "... dur dur
Un récit bien ordinaire sur la vie ; c'est la vie !

   senglar   
8/7/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour SaintEmoi,


Sévère ! Il faut reconnaître qu'être insomniaque n'est pas drôle. Sévère !

Ce poème-là est sec. Il ne concède pas. Il n'y a pas de lumière dans cette nuit (pas même celle de la lune qui pourtant a gravi...), elle est lourde, implacable, hoquetante... fébrile. La seule issue est l'aube, le soleil que l'on attend. Mais le poète semble déjà attendre la nuit à venir...


Je relève le passage "Je pense à me rendre à mon lit". Le lit apparaît comme une destination, au bout d'une escalade ("ces escaliers) vers un lieu de solitude. Or l'homme n'a plus la force, plus les muscles. Et puis la chambre n'est même pas un refuge,c'est une prison, Sing Sing sur le Mont de la nuit blanche !

"Noir c'est noir ! Il n'y a plus d'espoir !"
AH QUE... ! Sacré Johnny ! Bon, il a eu un plus bel enterrement que Victor Hugo.

   Vincente   
8/7/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Le passage " Dans mon agitation, je froisse tant de livres, tant de mots, tant de lettres, qu’une langue entière se cogne à mon front.
Puis ma bouche s’ouvre béante sur le silence du corps.
Puis je ne bouge plus.
La nuit est noire.
" m'a vraiment accroché. Grâce à ce moment, l'expression a gagné une dimension singulière qui fait de cette narration qui aurait pu rester plutôt classique voire banale vu le thème de l'insomnie très propice à l'écriture. Mais non rien n'est ici "banal".

Si bien que "la patience" qui clôt l'évocation trouve une place en forme de creux, en suspension jusqu'au prochain assaut du sommeil fuyant, attendre, mais attendre quoi ! La question est prégnante, elle sature de sa vacuité le texte, dont la force paradoxale avoue une impuissance très frustrante.
Beaucoup aimé tout ce montage narratif, et cette expression incisive ajustée à ce sujet mordant.


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