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Poésie libre
sauvage : Houle
 Publié le 04/04/21  -  8 commentaires  -  1028 caractères  -  230 lectures    Autres textes du même auteur

Penderecki, Stravinski, Artaud.


Houle



– Crie, Artaud ! –


sforzando


Le
printemps
qui
thrène !


Crachons

– staccato –

ces syllabes par tombeaux !


Être

ce printemps, ce sacre,
rustre, rude ;

être

la jeune fille, la sacrifiée ;
pour les anciens, le corps,
la terre ; frénésie,
chevelure, foule ;
hurle la houle !


Devenir

thrène, et le chant-cri,
Nagasaki, ici ;
monde cinglé, sanglant ;
des Penderecki noués aux cordes.

Puis,

perdendosi

cris à demi.


 
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   Anonyme   
4/4/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Disons-le : je n'ai à peu près rien compris, ce qui en général me gêne et me donne l'impression que l'auteur ou l'autrice fait dans l'esbroufe. Ici, le poème malgré son opacité (pour moi) me touche, j'y lis une tentative d'associer écoute d'un morceau de musique et remuements de l'âme qu'éveille ce morceau chez l'auditeur ou l'auditrice.

Alors Stravinsky, Le sacre du printemps, OK. Pour le reste c'est la bouteille à l'encre, mais des échos résonnent en moi à défaut de raisonner, les syllabes par tombeaux, la houle qui hurle, la jeune fille sacrifiée, il se passe quelque chose, la fin d'un monde, l'annonce du chaos. J'ai l'impression d'être un poisson dans un étang, qui ressent une espèce d'agitation au-delà de la surface, là où éclatent les bombes et où arrivent les troupes violeuses et massacreuses.

   Anonyme   
4/4/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Sauvage,

Votre poème est "remarquable", à mes yeux.
Ne connaissant ni "Penderecki" ni beaucoup "Stravinski", j'ai pu entendre le rythme et l'essentiel de ce que ce poème contient.
La mise en page est originale (et attirante). Ensuite les sonorités et les mots en italien ont aussi les tonalités de cet Extrême-Orient blessé.
Passée par le net, je goûte et comprends un peu plus ce poème.

J'imagine que vos sources sont précises et que vous ouvrirez un sujet en forum pour partager et échanger autour de ce poème.

D'autre part, la date de parution, à presque un an de la mort de Penderecki et en pleine pandémie actuelle, ajoute à mon sens valeur au texte.

Merci du partage
Éclaircie

   Ligs   
4/4/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,
Voilà un poème pour le moins sauvage !

On dirait que la musique de Stravinsky et Penderecki (que je suis allé écouter du coup) a été mise en paroles, et scandée par Artaud ( j'ai cru entendre sa voix)

J'aime beaucoup la mise en forme, et le choix des termes musicaux italiens pour indiquer comment le texte doit être lu.

Ce n'est pas vraiment ma tasse de thé, mais j'apprécie le travail, qui m'a tout de même emporté !

   Lebarde   
5/4/2021
 a aimé ce texte 
Pas
Si c’est de la poésie soit, ce sera pour moi une question de vocabulaire sur lequel il faudra nous mettre d’accord.
Sur le fond je n’ai rien compris ou si peu que je n’ose pas m’exprimer.
Sur la mise en plage, pourquoi pas, mais qu’apporte-elle au poème?
Sur l’expression et le texte où je relève quelques associations de mots « qui thrène » ou « ces syllabes par tombeaux » qui pourraient faire illusion en s’étreignant le cervelet.
Sur l’écriture qui fait fi de la syntaxe habituelle où l’on s’étonne de trouver une ponctuation et des majuscules mais pas nécessairement là où on les attend.

Peut être que derrière tout cela il y a un message subliminal ou une grande cause à défendre, mais je n’ai pas perçu laquelle, alors que dois-je en penser?
Peut-être devrais-je chercher un peu mais j’en n’ai pas envie.
Désolé je ne voulais pas noter ...je le fais quand même.
Lebarde

   Capry   
6/4/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Bonsoir Sauvage,

Il y a de la maîtrise, je m'interroge à mon tour : êtes-vous chef d'orchestre ? (ou Mickey dans Fantasia :-) )

Vous avez osé un tel texte, oui une poésie torturée en premier lieu par sa musique, les mots passent au second plan. L'émotion suscitée ici est avant tout musicale. Même si l'italien ne m'est pas familier j'imagine un départ tempétueux... la Houle, justement ! Alors, je suis embarquée sur une embarcation en pleine tempête!

Dans votre poème, ici il y a un langage universel, on vous comprend sans maîtriser votre langage. Pourquoi ? Car les mots seuls font office de phrase, j'aime à les nommer mot-idée. La Houle serait-elle personnifiée ?
La corde : élément du bateau ou annonçant la mort ?
Est-ce le covid qui angoisse le narrateur par les morts qu'il annonce ? "tombeaux" "printemps" et "être" on suppose qu'allons-nous être ? "monde cinglé". Nos libertés brimées "cris à demi"...

J'aime bien ce poème pour son côté excentrique et la diversité de ses interprétations.

   Malitorne   
6/4/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Je n’y comprends que dalle, la musique classique me casse les pompes en général, Artaud (Antonin?) ne me fait pas kiffer, et pourtant, pourtant j’ai apprécié votre poésie. Davantage par sa structure éclatée, ses associations décousues de mots, que par sa beauté formelle. Car on ne peut pas dire que c’est beau – au niveau de la musicalité puisque vous insistez dessus – mais il y a néanmoins une tonalité générale qui fait qu’on s’y s’attarde. C'est marrant, au contraire de me faire penser au classique, je trouve que cette poésie colle mieux à l’univers du doom metal (« tombeau » « hurle la foule » « cri » « chevelure ») : https://www.youtube.com/watch?v=UZjuzPU9UE4

   sauvage   
8/4/2021

   Louis   
8/4/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un poème-partition pour un « chant-cri ».
Partition et livret d’un opéra de douleur, de chaos et de guerre, qui indique une mise en scène de la profération, dans une dramaturgie d’un théâtre-opéra de fureur et de révolte.

L’opéra commence avec un cri.
Celui émis par Artaud en 1947 dans l’émission radiophonique : "Pour en finir avec le jugement de Dieu".
Cri déchirant, de douleur et de révolte.
La vocifération ici doit prendre de l’ampleur, « sforzando », se prolonger, se renforcer, atteindre les limites de l’insoutenable.

Cela commence par la parole perdue, dans une clameur, voix dénuée de toute prétention à dire le sens d’un monde insensé.
Le cri encore doit s’intensifier. Crescendo. Sforzando. En voix distordue, fracturée, convulsivante.

Hurlement en diapason avec ceux de Cathy Berberian dans Visage, composé par Luciano Berio.
En voix inarticulée, qui désempare le langage, pour se plonger dans le bruit et la fureur du monde.

Sur la portée, un cri introduit dans la profondeur sonore et douloureuse de l’existence, comme déjà le cri du nouveau-né introduit dans la vie.

Pour un nouveau printemps ? Pour une renaissance ?
Comment y croire ?
Il faut l’entendre :

« Le
printemps
qui
thrène »

Il tarde le temps du renouveau, il traîne. Il s’attarde en complaintes, gémissant.
Et déjà se mêlent l’écho des sonorités de Stravinsky et du Sacre, les sonorités de Penderecki et "La Thrène à la mémoire des victimes d’Hiroshima’’.
Il tarde, le printemps, parce qu’il faut payer la vie de maints sacrifices comme si la vie ne pouvait s’obtenir qu’en sacrifiant la vie. Artaud l’avait écrit : « Cette cruauté (…) qui ne craint pas de payer la vie le prix qu’il faut la payer » ( Le théâtre et son double).

Il faut mourir avant de naître. Râle du mourant avant le cri du nouveau-né.

D’abord la mort du langage articulé.
Exprimer, ainsi qu’un fruit, le mot comme un crachat, excrément vital :

« Crachons
-staccato-
Ces syllabes par tombeaux ! »

Dans une révolte contre la poésie. Poétique rébellion contre le langage poétique convenu.
Suspendre d’abord la valeur représentative de la parole. Ne laissant errer que des "ombres de signification", et les échos lointains d’une parole évanouie.

L’opéra-spectacle en appelle à chacun, et à tous : « crachons », ensemble collectivement. Pour en finir avec la séparation entre l’opéra-théâtre et la vie, la représentation-spectacle et le public.

La vie ne peut refleurir que sur le tombeau des syllabes, dans une langue écorchée, suppliciée, sur les mots qui se décomposent pour devenir « humus viride », langue « fécale » et fertile, selon les expressions d’Artaud ; et dans les glossolalies ; dans les interjections, et le cri, matrice de tous les possibles de la parole, athanor du langage ; cri d’avant la langue quand la langue a touché ses limites.

Le langage ramené à ses sonorités, à ses vibrations tonales, peut se poursuivre en musique, danse et ballet, cérémonie, sacre « rustre », « rude », quand le geste devient son, quand le mouvement se déploie en gestuelle théâtrale, en une « barbarie très élaborée » comme disait Pierre Boulez.

Dans le premier tableau du Sacre, « chacun piétine la terre avec extase » ( indication de Stravinsky)
La terre célébrée, adorée, dansée. La Terre-mère, la terre matrice universelle.
Danse ‘’à corps perdu’’ ; ouvert comme un trou, le corps, une béance, ainsi ouvert pour recevoir tous les surgissements de l’être.
« C’est comme la plainte d’un abîme qu’on ouvre; la terre blessée crie, mais des voix s’élèvent profondes, comme le trou de l’abîme, et qui sont le trou de l’abîme qui crie. (…) Pour lancer ce cri, je me vide. » (Artaud Le théâtre du Séraphin)

Il faut passer de « l’Être » au « devenir », au n’être plus, pour "re-naître" dans « un corps sans organes », selon l’expression d’Artaud, reprise par Deleuze.

« Au vacarme
au rugissement, si l'on donnait un corps... »
à suivre la proposition d’Henri Michaux dans Mouvements. Et le même poète dans Signes :
« Leur danse faisait l’homme-écrevisse, l’homme-démon, l’homme-araignée, l’homme dépassé, cent mains, cent serpents lui sortant de tous ses côtés en fureur. »

Le renouveau printanier "se paye" d’un sacrifice.
« La jeune fille, la sacrifiée » se présente dans le mythe dansé, dans la quintessence vive du mythe retrouvé dans sa force originelle, primitive, initiale.
Alors se lève la « houle », dans une « frénésie », une fureur sacrée ; une houle dans la « chevelure » de la « foule » sauvage.
Alors « hurle la houle ».

La houle qui ouvre les creux, qui creuse les "cavernes de l’être’’, comme l’avait vu André Breton qui déclarait : « Le cri d’Artaud – comme celui d’Edouard Munch – part des « cavernes de l’être ».

Hurlement et mouvement, comme un océan sur les têtes, comme la vague d’une marée humaine qui attend de la mort terrible, atroce, le renouveau d’une vie régénérée, "productrice d’une prodigieuse volée de formes’’ si l’on parvient à « remettre en cause organiquement l’homme, ses idées sur la réalité et sa place poétique dans la réalité» (Antonin Artaud, in "Premier manifeste du théâtre de la cruauté") ; productrice d’une « vie guérie », où changent les corps et les esprits.

Houle : ondes sonores, sinistres et désespérées, à la fois cris de détresse et cris de liesse.

Il faut « devenir », mais nous ne sommes encore que dans le "n’être", pas encore dans le "naître".

De l’anatomique à l’atomique, des milliers de morts à Nagasaki.
Sacrifices et violences, nullement symboliques.
Alors ce Guernica sonore de Penderecki.

Les cris vont, pour terminer en decrescendo : « perdendosi ».
La crise paroxystique est terminée, mais les cris d’un monde «cinglé, sanglant » n’ont pas cessés : « cris à demi ».


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