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Poésie en prose
Skender : La cohorte des ombres
 Publié le 16/12/23  -  7 commentaires  -  2225 caractères  -  92 lectures    Autres textes du même auteur

Une fuite en avant, sans se retourner.


La cohorte des ombres



J’ai mangé dans ton cœur un peu de ce qu’il y a, aujourd’hui pour nous et demain pour tous les autres. Un peu de la pitance que l’on convoite, toi et moi, un peu de nos chairs que l’on laisse traîner et s’avilir, sur le carrefour des vices et des illusions perdues. Ils sont un millier, que dis-je ? Ils sont un million et ils ferraillent et se battent. De leurs prières émane un doux parfum, de leurs cris s’échappe un paradis de paroles. L’esprit ils ne l’ont plus hélas ! Il y a déjà des lustres qu’ils l’ont perdu mais ils daignent encore y croire, à leur vie qui leur a fait faux bond. Aux esbroufes de tous ceux qu’ils ont croisés en chemin et qui les ont lacérés de paroles acerbes et de sortilèges diaboliques. Que nous veulent-ils ? Je n’en sais rien. J’ai cherché, au fond de leur pupille noire et même, sais-tu, dans le blanc de leurs yeux, j’ai cherché comme on draine une vilaine humeur et comme on espère que cela nous guérira du mal qui nous ronge. Mais il n’y avait rien, pas même un abysse d’ennui. Alors j’ai tremblé très fort et je t’ai prise par la taille. Et je t’ai hurlé de t’enfuir car cette cohorte inerte s’apprêtait à fondre sur nous. Mais toi qu’as-tu fait ? T’en souviens-tu seulement, de ce que tu as fait ? Tu as éclaté d’un grand rire comme un feu d’artifice, des gerbes d’or ont jailli de ton regard et de ton sourire. Tu m’as fixé comme on fixe un condamné, comme on fixe un homme dont les dernières volontés sont trop extravagantes pour qu’on les lui accorde. Et notre cœur est tordu d’un étrange chagrin. « Pourquoi veux-tu partir ? Ils sont là pour nous tu sais, ces petits pantins affriolants. Ils ont cultivé toute leur vie ces fleurs de douleur et ils désirent maintenant nous les offrir. Allons donc, tu ne vas pas leur refuser ça. » Mais j’avais très envie de refuser moi, d’ailleurs si je m’étais écouté, en cet instant coincé à mi-chemin entre ciel et terre, j’aurais éclaté dans un hurlement sauvage et j’aurais crié mon refus. Or ton sourire avait quelque chose à la fois de la tendresse et de la folie. Et tandis que je les sentais indistinctement se couler dans mon dos comme une lave glacée, j’ai fermé les yeux et j’ai couru. Depuis ce jour-là, je ne me suis jamais retourné.


 
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   Provencao   
16/12/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Skender,

Plusieurs lectures pour mieux recevoir et percevoir vos mots et leurs sens.

"De leurs prières émane un doux parfum, de leurs cris s’échappe un paradis de paroles. L’esprit ils ne l’ont plus hélas ! "

Ce passage est à mon sens celui du poète: vous qui nous invitez à prendre de la graine.
C’est le savoir juste et impétueux de la langue française celle des mots parfois abscons qui n'ont rien à voir avec la littérature proprement dite, où l'inconscient prend forme sonore et dont vous le poète en cueillait l'essence. En l'effleurant cette essence, d’aussi près que vous pouvez....

J'ai été sous le charme....incontestablement.

Au plaisir de vous lire
Cordialement

   jeanphi   
16/12/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour,

Il est peu aisé de se représenter la relation qui régit les différents groupes. Le couple soumis au tango de la tentation exotique, la fragilité de tels rapports, peut-être.
Des images très marquantes malgré ce chao et cette emphase voulus.
Explorez-vous le thème de la contradiction ? On se demande quelles sont les raisons d'être d'un tel écrit alors que ces raisons crèvent l'œil, extérioriser ou simplement faire hommage à l'expérience ou à la vision du narrateur.

   papipoete   
16/12/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
bonjour Skender
Votre récit pourrait dissuader le lecteur, par la densité de sa prose, et force lignes que cette " cohorte des ombres "
Sans crier " j'ai tout compris ", je retiendrais mon sentiment personnel
- je sais que tu ne les aimais pas, et pourtant ils sont tous venus, pour t'accompagner, même LUI !
NB surement aucun rapport avec le thème ici développé, mais songer à ce moment qui viendra, où l'on se recueillera pour le dernier voyage, autour de qui s'en va.
Se dire que certaines ombres sont peut-être de bonne foi ; ne pas envoyer paître tout le monde... à part les charognards

   Eskisse   
16/12/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour Skender,

Une prose très bien tournée et imagée mais ce qui m'a manqué dans cette poésie en prose, c'est une musicalité plus affirmée. Certains passages ont un rythme : " tu as éclaté/tu m'as fixé / comme on fixe / comme on fixe" mais celui-ci me semble dilué dans l'intégralité du poème.

Sur le fond, je vais y aller de mon interprétation toute personnelle : je vois une situation cauchemardesque dans laquelle la cohorte représenterait toutes les raisons qui menacent le couple. La divergence des réactions du couple semble sonner son malheur et la phrase finale appelle l'image d'un Orphée enchaîné. :)

Merci

   Eki   
20/12/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Tout ce qui retient, tout ce qui nous abîme, tout ce qui entrave...
Est-ce bien cela la cohorte des ombres ?
Tous ces aléas de la vie, ses grandes peines et doutes qui traversent un couple. Tout ce qui met en péril l'union pour ne pas s'éparpiller sur le chemin de la vie.

C'est ce que j'ai compris de ce texte que j'ai aimé : l'histoire d'un couple "combattant" pour sa survie...

   Skender   
22/12/2023

   Cyrill   
24/12/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour Skender,

les deux premières phrases de cette prose me donnent tout de suite de la matière à images. Je suis avec intérêt ce millier, million d’on ne sait trop quoi qui probablement représentent la cohorte. Le ton de dépit, de colère, de désenchantement, me convainc d’un couple en bout de course, et dont la moitié-narrateur liste les griefs partagés, ces ombres au tableau.
J’aime bien ce que cet écrit soulève de poussière laissée sous le tapis.
Le mélange du trivial et de la métaphore donne un étrange résultat. Je me dis que la poésie peut sauver les restes d’une passion chancelante. Je trouve toutefois que des passages comme « Mais j’avais très envie de refuser moi, d’ailleurs si je m’étais écouté » manquent un peu de classe. On dirait que vous l’avez laissé tel que c’est venu alors que dans l’ensemble, l’écriture est perchée largement plus haut.

Merci pour le partage.


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