La dormeuse
L'aurore se lève, pâle, bleue et indolente. Pas un souffle de vent n’agite les lauriers. Vénus est encore visible, infiniment brillante. La colombe dort, la tête sous son aile repliée.
Étendue, nue sur le lit, comme une odalisque, Ses reins cambrés sur d’adorables rondeurs, Elle sommeille, insouciante du moindre risque Son corps, ouvert à la nuit, n’a pas de pudeur.
L’ombre mauve fait doucement marche arrière Car le ciel se pare des teintes ocrées du jour. Bientôt le soleil va la nimber de douce lumière Et la révéler, dans toute la beauté de l’amour.
Elle se retourne, paresseuse et se renverse. Ses bras s’ouvrent et se dressent ses seins. Reste accroché un rêve, qui encore la berce Et son parfum de fleur s’exhale du coussin.
La dormeuse s’éveille et ouvre ses prunelles, Touche de sa main le ventre au tendre arrondi. Dans l’arbre la blanche colombe secoue ses ailes Et s’envole dans le soleil. La nuit secrète est finie.
Le dormeur
Ce champ de coquelicot, à perte de vue, L’avait accueilli dans le soleil, tout nu. Il avait attendu patient se lever l’aurore Et sentait le vent caresser son corps.
Il avait débouché par ce petit chemin Sur ce champ rouge, et le lendemain Il se découvrait innocent et rajeuni La peau, hâlée par la brise, rafraîchie.
Les graminées le cachaient des regards Mais il était si loin d’âmes qui vivent, Que seul un aigle, ou bien un busard, Le voyait étendu, tout près de la rive.
Il venait au monde pour la seconde fois Et sentait en lui monter une étrange foi Dénudé, et rempli de candide espérance C’était hier qu’il fut aimé de Laurence
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