Je sais en vous contant cela, vous serez crédule Et cependant je vous jure, qu'à l'instant J'ai cru apercevoir le fantôme de Théodule, Se dresser immense dans son drap blanc.
Et pourtant la nuit n'était pas funèbre, La lampe était allumée depuis un moment, La lune éclairait le mur, chassant les ténèbres, Et rien ne pouvait attirer, ici, un revenant.
Théodule, on le disait, hantait la maison Les nuits où régnait la lune roussâtre, Mais je possédais une raison si opiniâtre, Que je n'avais jamais admis ces péroraisons.
Comment un homme, qui passait pour un bellâtre, Pouvait avoir mis un terme ainsi aux jours, Peu de temps après leur mariage, à la marâtre Qu'il prétendait lui jouer de bien vilains tours ?
Peu après le jour où furent célébrées leurs noces, Théodule ne put jamais accomplir le devoir conjugal, Car, sa soi-disant mégère de femme était si rosse, Qu'elle se moqua crûment de son problème fatal.
Même auprès de ses nombreuses et belles maîtresses, Qui n'avaient eu à se plaindre de ses prouesses, Il ne pouvait oublier ces paroles blessantes, Si bien qu'il assassina sa femme, devenue gênante.
Théodule, pourquoi venez-vous me hanter ce soir ? J'ai acheté votre maison, soit, mais vous savez Que je n'ai rien à voir dans votre pauvre histoire ! Je vous en prie, allez, un bon geste, déguerpissez…
Le fantôme fit tomber sur le sol son voile blanc, Et, médusée, je vis apparaître une vieille femme Qui pleurait en l'appelant, son mari et piètre amant, Car il n'était pas encore allé brûler en enfer son âme
Il avait séduit, pour son argent et ses biens, L'épouse qu'il avait vite délaissée pour d'autres Avec qui il dépensa tout jusqu'à ce qu'il ne reste rien, Et, parti loin, il réussit même à passer pour un bon apôtre
|