Maria, devant un verre de citronnade est attablée. Et avec une fausse indifférence elle observe la salle. Près de la porte, agglutinés, des jeunes gens excités Supputent déjà qui des filles ce soir baisserait la garde.
Luis, que l’on nomme "El Francesito" le petit Français, A débarqué en Argentine à peine âgé de deux ans, Suivant sa mère, partie du port de Bordeaux émigrer En Argentine, alors qu’elle n’avait que vingt-sept ans.
Depuis il avait grandi dans cette capitale fourmillante Faite d’une immigration espagnole, italienne, mais aussi D’Arabes et de Juifs, d’Allemands, de Hongrois en attente, D’un travail hypothétique, sur les quais et cela jour et nuit.
Buenos Aires comptait plus d’hommes que de femmes Car exilés, ils étaient venus seuls ici tenter leur chance, En se retrouvant souvent à fréquenter des bouges infâmes, Où explosaient des bagarres, d’une imprévisible violence.
Maria se retourna et soudain se troubla devant le sourire De celui qu’elle avait aperçu il y avait un instant danser Avec une superbe fille et son attitude semblait lui dire Que c’était pour aiguiser sa jalousie qu’il l’avait fait.
Soudain, il l’attira à lui par les pans de son châle soyeux, Assura sa prise d’une main, autour de la taille élancée, Détacha l’hibiscus, le porta à sa bouche tandis que ses yeux Ne quittaient pas de Maria, les joues vite empourprées.
D’un doigt preste, il défit la fine épingle d’écaille ponceau Retenant la chevelure sombre et opulente de sa cavalière. Les longs cheveux croulèrent dans le dos, tels un ruisseau, Et Maria secouant la tête essaya de garder une allure fière.
Luis lui murmura à l’oreille les mots d’une chanson créole Qu’avec son ami José Razzano, qu’on nommait l’Oriental, Ils chantaient dans les bars, récoltant de maigres oboles Mais qui peu à peu, les faisaient connaître dans les bals.
À suivre...
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