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Poésie libre
Vasistas : Effroi
 Publié le 21/11/21  -  7 commentaires  -  551 caractères  -  179 lectures    Autres textes du même auteur

Naufrage.


Effroi



traverser l’abîme
passer de l’autre côté
tuer la misère

ton corps en vie
à la merci de l’onde
brave l’infortune

il flotte par-dessus les morts
leurs bras du fond de l’eau
portent son effroi

vendange marine
la mer les a cueillis
par grappes entières

il ne reste que lui
sous un drap d’écume
les yeux ouverts au ciel

enfin immobile
transi sur la rive
de l’autre côté

il se lève
et brandit le poing
à l'immensité


 
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   Lebarde   
13/11/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Poème vif, percutant et cinglant sur un sujet d'une cruelle et dramatique actualité sans solution.

Fuir la misère, partir à tous prix et pour cela "traverser l’abîme/
passer de l’autre côté" vers des contrées meilleures?

Les difficultés et les risques sont multiples, beaucoup en mourront
"il flotte par-dessus les morts
leurs bras du fond de l’eau
portent son effroi"

mais à force de courage et d'audace souvent déraisonnables certains réussiront à franchir les obstacles et atteindre leur "Oldérado"?:

"enfin immobile
transi sur la rive
de l’autre côté

il se lève
et brandit le poing
à l'immensité"

Un texte diablement violent, incisif et sobre, qui atteint son but sans pathos.

Bravo, ce poème me touche dans son efficace simplicité.

Merci

En EL

Lebarde

   papipoete   
21/11/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour Vasistas
Il y eut les " boats-people " et d'autre bateaux de fortune, en qui des peuples oppressés confièrent leur vie, s'ils voulaient bien les conduire au-delà des abîmes !
ici, nous embarquons dans un voyage cauchemar, où les dauphins sont des hommes morts, les passagers ceux du radeau de la Méduse ( s'il faut se battre contre la faucheuse ) parfois comme ici plus tard un seul survivant qui parvient de l'autre côté du miroir... en vie !
NB faut-il du courage pour prendre la mer, non point l'onde calme d'un étang, et s'attendre à affronter un grain, des vagues scélérates ! avec femmes et enfants qui, loin de l'acajou d'un yatch purent se réfugier au sofa d'un salon... mais vont se retourner les tripes, invoquer en pleurs et cris un dieu, qui les entendra ?
j'ai cru un moment à des haïkus, qui purent sonner à merveille ces moments tragiques, mais non...
la 3e strophe est celle que je préfère, quand la dernière célèbre cette victoire sur la mort !

   LioText   
21/11/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Vasistas,

Un poème que l'on a vite englouti, sa ponctuation manquante le rend encore plus impitoyable que la mer que vous décrivez et cela m'a plu.

L'élu des eaux, celui qui se lèvera alors que les autres finiront par couler vit certainement ''la misère'' mais je ne parviens pas ressentir cet ''effroi''. En effet, il est pour moi plus survivant que rescapé à brandir le poing face à la mort après avoir été bercé dans ''un drap d'écume'' comme un chouchou des eaux. Peut-être est-ce le titre qui oriente mal ma lecture ?

Pourtant, il n'était qu'un ''corps en vie/ à la merci de l'onde'' comme un bout de bois vide qui ''flotte'', impuissant et effrayé. Mais ce dernier tercet ''héroïse'' un peu trop à mon goût le tableau.


Malgré tout cela, il s'agit d'un poème agréable, osé dans sa structure et avec de belles images, en particulier dans le 4ème tercet. Merci pour cette lecture et j'attends à vous relire !

LioText

PS: Je viens de relire votre poème, à distance de la 1ère lecture, l'esprit différent. Le sens de ''l'autre côté'' m'avait échappé et je ressors avec une nouvelle lecture, engagée et qui donne un tout autre sens au dernier quatrain et au titre (ce n'est donc pas un effroi personnel mais collectif). Je ravise alors mon appréciation mais je vous laisse ma première lecture pour que je puisse vous partager mes deux visions.

   Doute   
21/11/2021
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Poème qui heurte, lâche l'évidence au visage du lecteur. Cependant cette évidence brutale, d'une situation que nous connaissons tous est ici très joliment mise en poésie. Le contraste entre les images poétiques que vous nous proposez et le fond est à la fois horrifiant et perturbant.

L'absence de ponctuation, je trouve, sied particulièrement à ce poème.

J'ai particulièrement apprécié le quatrième et le cinquième quatrain. Le dernier m'a paru un peu trop... mis en scène, avec le poing dressé face à l'immensité. À mon sens, cela "glorifie trop" le rescapé, qui a su faire face à la mer et a survécu là où ses compagnons ont péri. Il a vu l'horreur, la mort... Le poing me semble donc un peu déplacé, même si j'apprécie l'idée de combativité qui se dégage de ce dernier quatrain : passé de l'autre côté, le survivant peut commencer une nouvelle vie et il se battra. Après tout, il a échappé au pire...

Merci pour cette lecture.

   Anonyme   
22/11/2021
L'effrayante vendange marine n'a pas besoin de plus de mots, la forme s'ajuste fort bien au fond. Le personnage n'en est qu'au début de ses déconvenues. J'aurais volontiers lu un poème en trois volets dont celui-ci aurait été le deuxième.

   Cyrill   
23/11/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour Vasistas,
Il y a une grande force dans ce poème court qui dit l'essentiel.
Les vers sont percutants, les tercets 4 et 5 m'ont particulièrement plu, les images frappent fort.
L'infinitif du premier tercet indique une nécessité absolue.
Le passage du "tu" au "il", en revanche, a perturbé ma lecture. Je crois comprendre que "il" correspond au corps de "tu", mais il me semble qu'il aurait fallu revenir au "tu" au dernier tercet. Il me semble, hein !

   Vincente   
23/11/2021
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Depuis la sensibilité exacerbée du survivant, ce poème très économe de mots, adresse ses arguments qui rationnent pour la maintenir à flot la vie terriblement chancelante des naufragés.

Ce que j'ai particulièrement apprécié, c'est que cette économie ne s'est pas faite au détriment de l'évocation soucieuse, généreuse et empathique envers ces embarqués dans une histoire tellement plus grande qu'eux. À hauteur d'homme, en ses douleurs physiques et mentales, à hauteur de société, en ses aberrations si peu vertueuse envers les individus, à hauteur d'histoire où les imbrications entraînent ceux-ci dans l'intempérance des flux, des flots…, à chaque "niveau", ce texte sobre pense la problématique et s'émeut de ses conséquences. Peu d'étalement narratif, quelques images crues, simples, inspirées et voici le message qui parvient à ce final, une espérance comme une vengeance des camarades qui s'y sont noyés :

"se lève
et brandit le poing
à l'immensité
"

Quand on parle de pertinence poétique, souvent on manque d'exemples aboutis, en voici un qui sans fanfaronner se montre et prouve plus que sa bonne foi, sa belle et bonne résonance.


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